Les élections législatives européennes, tenues les 24, 25 et 26 mai, vont donner une nouvelle configuration à l’institution de Strasbourg. Si la poussée des partis nationalistes et eurosceptiques a été limitée, les écologistes et centristes libéraux ont enregistré, quant à eux, une nette progression.
Les projections rendues publiques en attendant que les Etats affinent les résultats officiels montrent que le Parti populaire européen (PPE, droite pro-européenne), première force de l’hémicycle, reste en tête, avec cent soixante-dix-neuf sièges, contre deux cent seize actuellement.
En Allemagne, le PPE et les sociaux-démocrates (S&D) restent certes les deux principales formations de l’hémicycle européen, mais ils perdent leur capacité à réunir à eux seuls une majorité pour faire passer des textes législatifs. Les deux groupes politiques devront composer avec les écologistes, qui grimpent de cinquante-deux à soixante-dix sièges, grâce à leurs bons résultats en Allemagne et en France, mais aussi avec les Libéraux (Alde), dont le parti du président français, Emmanuel Macron, qui obtiennent cent sept sièges contre soixante-neuf actuellement. C’est fort de cette victoire que les dirigeants du PPE ont déjà réclamé la présidence de la Commission pour leur chef de file, Manfred Weber, un conservateur dont le profil ne fait pas l’unanimité.
Le chef de l’Etat français, l’un des dirigeants les plus attachés à l’approfondissement de la construction européenne, a perdu de peu le duel des élections européennes face au parti d’extrême droite de Marine Le Pen, le Rassemblement national (RN). La liste LREM-MoDem a notamment acquis 22,41% contre 23,31% pour le RN, soit 0,9 point d’écart. L’extrême droite devance donc de très loin le parti de la droite classique, Les Républicains, qui s’effondre comme jamais avec 8%.
Réagissant après l’annonce des résultats, le RN a immédiatement appelé à la « constitution d’un groupe puissant » au parlement européen réunissant les formations eurosceptiques, des forces hétéroclites qui n’ont pas réussi par le passé à se fédérer. Ce qui fera qu’après la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne (UE), les deux listes obtiendront le même nombre d’eurodéputés, soit vingt-trois chacun.
En Italie, la Ligue de Matteo Salvini, arrivée sans surprise en tête avec environ un tiers des voix, entend, avec le RN de Marine Le Pen, fédérer une large alliance de partis nationalistes, eurosceptiques et populistes. Leur groupe parlementaire, l’ENL, est crédité de cinquante-huit sièges contre trente-sept.
S’agissant de la Grande-Bretagne, les nationalistes du Brexit Party - formation qui a remplacé la sensation d’il y a cinq ans, le UKIP - bondissent en tête à Londres.
Les Verts obtiennent de bons résultats
Les troupes de Nigel Farage ont notamment réussi à fédérer les tenants d’un Brexit dur, obtenant 31% des voix. Reste maintenant à savoir si ces eurodéputés, démissionnaires de l’UE, vont siéger au parlement européen. Le mandat des élus britanniques doit cesser à la sortie de leur pays de l’Union, et leurs sièges seront en partie redistribués à d’autres pays.
En Pologne, le PiS au pouvoir est crédité de 46% des voix, devant une alliance d’opposition pro-européenne (38%) et les progressistes de Printemps (6%). Contrairement aux projections « sorties des urnes » d’Ipsos, la Confédération, coalition d’extrême droite, est sous le seuil d’éligibilité, avec 4%.
La Hongrie fait partie des pays où les eurosceptiques ont remporté les élections. Le parti du Premier ministre, Viktor Orban, est largement en tête du scrutin avec 52% des suffrages. Mais il est suspendu du groupe démocrate-chrétien du PPE, en raison de ses dérapages anti-Bruxelles.
En Autriche, les estimations donnent le parti conservateur du chancelier autrichien de Sebastian Kurz en tête, devant les sociaux-démocrates et le parti d’extrême droite FPO. En Espagne, le chef du gouvernement espagnol, Pedro Sanchez, est le seul socialiste à sortir grand vainqueur du scrutin.
Outre la poussée des nationalistes et des eurosceptiques, il sied de noter que dans l’ensemble, les élections européennes sont marquées également par les bons résultats obtenus par les écologistes. Ce qui est le cas en France où ils occupent la troisième place avec 12% des voix et en Allemagne où ils sont deuxièmes du scrutin, selon les sondages, juste derrière le camp centre-droit d’Angela Merkel, qui enregistre un plus bas score historique.
Le taux de participation à ces élections était inférieur à celui des scrutins nationaux, mais il atteint, avec 50,5%, son niveau le plus élevé depuis vingt ans, selon le parlement européen. Au total, quatre cent vingt millions d’Européens étaient appelés aux urnes afin d’élire, pour cinq ans, les sept cent cinquante et un membres du parlement européen.
Avec les législatives européennes de cette année, les nouveaux équilibres au sein de l’hémicycle seront déterminants dans la course aux postes clés des institutions européennes, dont celui du successeur de l’actuel président de la Commission, Jean-Claude Juncker, membre du PPE. Dans cette perspective, les chefs d’Etat et de gouvernement doivent se retrouver dès le 28 mai pour un sommet afin d’échanger sur les prochaines nominations.