Soudan : le bras de fer se poursuit entre les généraux et les manifestants

Lundi, Juin 3, 2019 - 11:45

Les relations entre les deux camps sont tendues depuis le mois dernier, suite à l’échec des négociations, suivies des mises en garde du Conseil militaire qui dirige le pays depuis le 11 avril, date de la destitution sous la pression populaire du président Omar el-Béchir.

Le 3 juin, les militaires à la tête du pays ont dispersé le sit-in qui se tient depuis des semaines devant leur QG à Khartoum, la capitale, pour réclamer le transfert du pouvoir aux civils. Selon un comité de médecins, au moins cinq personnes ont été tuées à cette occasion. « Trois personnes de plus ont été tuées sous les balles du Conseil militaire, portant le nombre de martyrs du massacre (...) à cinq », a-t-on précisé dans un communiqué. Le comité des médecins a ajouté avoir enregistré « un nombre important de blessés graves ayant nécessité des interventions chirurgicales et le placement en soins intensifs ».

La situation s’est aggravée lorsque les fers de lance de la contestation ont condamné le « massacre » et appelé les Soudanais à « la désobéissance civile totale pour renverser le Conseil militaire perfide et meurtrier ». L’Alliance pour la liberté et le changement a non seulement appelé à « renverser le Conseil militaire », mais également à poursuivre des « marches pacifiques et des cortèges dans les quartiers, les villes, les villages ».

Il s’en est suivi des bruits de tirs provenant du lieu du sit-in qui étaient entendus dans la ville. Et des témoins ont fait état d’un déploiement important des forces de sécurité dans les rues de la capitale. « Une tentative du Conseil militaire de faire disperser le sit-in par la force est en cours », a indiqué, le même jour, l’Association des professionnels soudanais, actrice majeure de la contestation, dans un communiqué.

Face au climat qui prévaut dans le pays, l’ambassade américaine a réagi sur Twitter, en exhortant les généraux à « cesser » leur opération « injustifiée », prévenant que le Conseil militaire en « porte la responsabilité ».

Des milliers de manifestants campent devant le siège de l’armée à Khartoum, depuis le 6 avril. Ils avaient demandé le soutien des militaires contre le président Omar el-Béchir. Après être parvenus à le destituer, ils réclament désormais aux généraux le transfert du pouvoir aux civils.

Le 20 mai dernier, les négociations entre les deux camps visant à former un Conseil souverain, censé assurer la transition politique pour trois ans, avaient échoué. Depuis lors, le Conseil militaire ne cesse de dénoncer des débordements autour du sit-in, les qualifiant de « menace pour la sécurité et la paix publiques » et promet d’agir « avec détermination » pour faire cesser cette situation.

Pour chercher à ramener la paix dans son pays, le chef du Conseil militaire au pouvoir, Abdel Fattah al-Burhane, s’est rendu récemment en Egypte, aux Emirats arabes unis et en Arabie saoudite, trois pays qui lui ont affiché leur soutien.

Rappelons que les manifestations au Soudan avaient été déclenchées le 19 décembre dernier par le triplement du prix du pain, annoncé par le gouvernement dans un pays à l’économie exsangue. Elles s’étaient ensuite muées en contestation contre le président Omar el-Béchir, qui a finalement été destitué par l’armée, le 11 avril, après trente ans de règne sans partage. Malgré le fait qu’un accord de partage de pouvoir avait été conclu, les meneurs de la contestation n’entendent pas lever leur sit-in puisque les militaires ne veulent pas remettre le pouvoir aux civils.

 

 

 

 

Nestor N'Gampoula
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