Rabat a abrité récemment la troisième édition de la Conférence annuelle sur la paix et la sécurité (Apsaco), sur le thème '' La place de l’Afrique et son influence dans un monde changeant''.
Les assises ont permis de débattre des nouveaux défis du continent africain en fonction de ses potentiels, de mesurer le coût de la corruption (25% du produit national brut) et de montrer que celle-ci compromet le développement. L'autre préoccupation a concerné des tensions interétatiques qui retardent l’intégration économique régionale.
A l'entame de la rencontre, l'ex-Premier ministre du Mali, Diango Sissoko, a déclaré : '' Nos dirigeants n’ont pas toujours été à la hauteur des espoirs nourris''.
L'Afrique qui sort à peine de la colonisation y a gardé des cicatrices. Mais elle est aujourd’hui appelée à se prendre en main dans un contexte difficile. Terrorisme, insécurité, instabilité politique et conflits mettent le continent à rude épreuve, alors que les puissances mondiales jouent des coudes pour y avoir une plus grande influence. D'où ces propos de Diango Sissoko:' "Nos partenaires n’ont pas d’ambition pour nous mais pour leurs peuples. L'Afrique doit être responsable de son propre développement et en prendre conscience''.
L'ancien Premier ministre malien est convaincu que la force des jeunes et des femmes peut changer la donne. Parlant de l'Afrique du Sud, ''l’idéal de Mandela semble être trahi et il faut aujourd’hui que l’ANC (Congrès national africain, ndlr) se ressaisisse'', a-t-il souligné, faisant allusion aux dernières élections sud-africaines qui ont marqué un affaiblissement du parti, malgré son maintien au pouvoir.
Pour le président du Policy center for the New south, Karim El Aynaoui, les Africains doivent décider eux-mêmes des relations qu’ils veulent avoir avec le monde. Il pense qu'''il est temps de redéfinir les priorités et d’entamer un débat sérieux sur la place de l’Afrique sur l’échiquier mondial''. Cet impératif d’ownership ou d’appropriation est primordial alors que le traité sur la Zone de libre-échange économique africaine vient d'être ratifié. Il a regretté le fait que les Africains consomment sans modération les grilles d’analyses anglo-saxonnes alors que les think tank africains et centres de recherches sont à même de porter un regard nouveau sur les problématiques continentales. Il en va, selon lui, de la capacité de l’Afrique à déterminer ses propres paradigmes face à sa ''porosité'' qui l’expose aux jeux stratégiques internationaux.
" Un besoin d'autonomie stratégique pour l'Afrique"
Pour Hugo Sada, conseiller spécial du Forum international de Dakar sur la paix et la sécurité en Afrique, le continent a un problème de leadership et un besoin d’autonomie stratégique. Il a relevé les cinq défis majeurs du continent : l’impératif de développement alors qu’il dépend de l’exportation de ses matières premières au lieu de les transformer; la corruption qui, selon les chiffres de la Banque africaine de développement, happe 25% du produit national brut africain, l’équivalent de cent cinquante milliards de dollars; les crises et les conflits qui s’ajoutent à un ensemble de menaces sécuritaire, climatique et terroriste; les divisions politiques qui compromettent les intégrations régionales. Il a ajouté la démographie et l’émigration, qui nourrissent la confrontation Nord-Sud qui n’est pas prête de s’atténuer malgré l'accord de Marrakech sur la migration.
La troisième édition de l’Apsaco a été l’occasion de présenter le rapport annuel sur la géopolitique de l’Afrique, qui traite des sujets liés aux perspectives du continent et retrace les contours actuels. Parmi les sujets phares figurent la migration, l’embrigadement des enfants par les milices, la criminalité transnationale et le terrorisme. Dans le chapitre géopolitique, les problématiques traitées soulignent les nouvelles dynamiques que traversent l’Afrique. Par exemple, le jeu des puissances étrangères en action dans le continent.