Romano Prodi insiste : sauver le lac Tchad est un impératif mondial !

Mercredi, Avril 2, 2014 - 18:32

Une conférence des donateurs se tient vendredi et samedi à Bologne et à Rimini pour sauver les trente millions de riverains

Le représentant du secrétaire général de l’ONU pour le Sahel, l’Italien Romano Prodi, n’en dort littéralement plus : il faut absolument sauver le lac Tchad ! Pour l’ancien Premier ministre italien et ancien président de la Commission européenne, sauver cette étendue d’eau douce aux portes du Sahel n’est pas seulement un impératif écologique : c’est un vrai service que l’humanité tout entière se rendrait à elle-même, car si les effets des bouleversements climatiques font presque l’unanimité, les mesures pour les contrer sont parfois discutées. Or la planète vit de ses équilibres diversifiés, qui ne tiennent aucun compte des races, religions ou technicités ! Si la planète respire grâce à l’oxygène du bassin du Congo, qui peut dire dans quelle partie du globe l’évaporation du lac Tchad cause des ravages à la faune et à la flore !

Sauver le lac Tchad ne consiste pas seulement à venir en aide aux Tchadiens. D’ailleurs, les populations qui tirent l’essentiel de leurs ressources de survie de ce lac ne sont pas les seuls Tchadiens. Nigérians, Nigériens, Camerounais ont autant intérêt à ce que la tendance de ces deux dernières décennies s’inverse. Car le lac Tchad, c’étaient 25 000 km2 de superficie en 1975 et moins de 2 000 km2  aujourd’hui ! Soit 30 millions de personnes en danger de mort, qui pêchent sur le lac, en tirent l’eau pour leurs besoins journaliers, cultivent sur ses berges arrosées ou y font paître leurs troupeaux en transhumance.

Prenant la mesure du drame qui se profile, Romano Prodi a mobilisé les bonnes volontés pour réunir tous les moyens pouvant contribuer à enrayer l’avancée du désert. Le cri d’alarme qu’il lance semble avoir été entendu, et d’abord par les populations riveraines elles-mêmes. Vendredi et samedi, les présidents Mahamadou Issoufou (Niger), Mohamed Ould Abdelaziz (Mauritanie), Idriss Deby Itno (Tchad) et l’ancien président nigérian Olusegun Obasanjo prennent part à cette réunion. La présidente de la Commission africaine, Dlamini Nkosazana Zuma, fera également le déplacement en Italie.

« L’engagement qu’entend assumer la Fondation pour la collaboration entre les peuples [la fondation de Romano Prodi – NDLR] ensemble avec la Commission du bassin du Lac Tchad vise la récolte de fonds pour revitaliser le lac. Cela répond de la meilleure manière aux objectifs même de la fondation, a-t-il expliqué. Si nous ne freinons pas l’étiolement, nous irons au-devant d’un désastre écologique, économique et humain de grandes proportions. Nous verrions s’aggraver encore plus les conditions de populations dont la survie est étroitement liée à l’existence du lac. Et qui sait si l’interaction des facteurs de fragilité et de pauvreté ne finirait pas par rallumer de nouveaux conflits, menaçant la paix mondiale ? »

Pour la coopération italienne, le lac Tchad sera peut-être le premier terrain d’action concrète depuis l’arrivée aux affaires, en février, du gouvernement de Matteo Renzi, qui n’a pas encore donné à voir les sillons qu’il veut tracer en matière de politique africaine. Le sommet de l’Union européenne de Bruxelles, mercredi, a été l’occasion de premiers contacts entre M. Renzi et de hauts dirigeants du continent. La réunion sur le lac Tchad connaîtra la participation de Lapo Pistelli, vice-ministre des Affaires étrangères, figure devenue familière aux interlocuteurs africains. Et donc aussi, sans doute, gage d’une continuité de la politique africaine de l’Italie.

Lucien Mpama