Soudan : les généraux et la contestation trouvent un compromis sur la transition

Samedi, Juillet 6, 2019 - 13:00

Après des mois de tensions, les militaires au pouvoir et les leaders de la contestation sont finalement parvenus à un accord, le 5 juillet, concernant l'instance qui doit diriger la future période de transition, acceptant un partage du pouvoir entre les deux parties.

Le Conseil militaire, qui a pris les rênes du pays à la suite de la destitution et l'arrestation en avril du président Omar el-Béchir, au terme de manifestations de masse, est engagé dans un bras de fer avec le mouvement de contestation qui réclame le transfert du pouvoir aux civils.

Grâce à une médiation de l'Ethiopie et de l'Union africaine (UA), les deux camps se sont finalement accordés sur leur principal point du contentieux : la direction du « Conseil souverain », l'instance qui doit superviser la période de transition.

L'annonce de vendredi est intervenue dans un contexte tendu, après la dispersion, le 3 juin dernier, d'un sit-in de manifestants devant le quartier général de l'armée à Khartoum, qui a fait des dizaines de morts et provoqué un tollé international.

Le Conseil militaire et l'Alliance pour la liberté et le changement (ALC), fer de lance de la contestation, ont accepté une direction « alternée » de cette instance de transition, a annoncé en conférence de presse le médiateur de l'UA, Mohamed El-Hacen Lebatt.

« Les deux parties se sont mises d'accord sur l'instauration d'un conseil souverain, avec une alternance entre les militaires et les civils, pour une période de trois ans ou un peu plus », a-t-il dit, sans détailler le mécanisme utilisé.

Mais selon un plan de transition établi par les médiateurs, l'instance devait initialement être présidée par un militaire pendant dix-huit mois, avant qu'un civil ne prenne la relève jusqu'à la fin de la transition.

Le conseil sera composé de six civils, dont cinq issus de l'ALC, et de cinq militaires, avait annoncé à l'AFP un leader de la contestation, Ahmed Rabie.

Libération de rebelles

C'est sur la direction du Conseil souverain que les négociations avaient capoté en mai. Elles ont repris seulement le 3 juillet, dans la soirée.

Le numéro deux du Conseil militaire, le général Mohammed Hamdan Daglo, surnommé « Hemeidti », a salué l'accord en prenant la parole après le médiateur.

« Nous voulons rassurer toutes les forces politiques (...) et tous ceux qui ont participé au changement », a-t-il dit. « Cet accord sera complet, il n'exclura personne et inclura toutes les ambitions du peuple », a-t-il assuré.

Les deux camps se sont aussi mis d'accord pour « une enquête minutieuse, transparente, nationale et indépendante, sur les différents incidents violents malheureux qu'a connus le pays ces dernières semaines », a souligné Mohamed El-Hacen Lebatt.

A ce jour, la contestation réclamait une enquête indépendante et internationale sur la dispersion du sit-in, le 3 juin, ce que les généraux ont refusé après avoir mis sur pied leur propre comité d'investigation militaire. Depuis lors, la répression a fait cent trente-six morts, dont une centaine dans la seule dispersion du sit-in devant le siège de l'armée à Khartoum, selon un comité de médecins proche de la contestation. Les autorités évoquent un bilan de soixante-onze morts depuis la même date.

Enfin, généraux et contestataires ont accepté de « retarder » la mise en place d'un « conseil législatif », qui doit faire office de parlement de transition, jusqu'à ce que soit installé le conseil souverain et un gouvernement civil.

Par ailleurs, le 4 juin, deux cent trente-cinq membres d'un groupe rebelle du Darfour (ouest), « l'Armée de libération du Soudan », une faction qui fait partie de l'ALC, ont été libérés d'une prison d'Omdourman, ville voisine de Khartoum. Ils ont été accueillis par leur famille, après une « amnistie » prononcée par le chef du Conseil militaire, le général Abdel Fattah al-Burhan.

Josiane Mambou Loukoula et AFP
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