Le G7, le sommet des sept pays les plus riches est constitué du bloc occidental ( France, Allemagne, Canada, Etats-unis, Royaume-Uni, Italie, Japon). Les chefs d'Etat et de gouvernement de ces sept grandes puissances occidentales se réunissent du 24 au 26 août à Biarritz, sur la côte basque française. Mais à quoi servent ces sommets contestés par les altermondialistes ?
Pour les altermondialistes, c'est une rencontre d'abord coûteuse : 24 millions d'euros pour accueillir les chefs d'Etat et de gouvernement des sept pays membres ainsi que 5 000 délégués et journalistes. Et cette enveloppe n'englobe pas les préparatifs de cette rencontre qui a pour thème, "la lutte contre les inégalités". L'utilité du G7 vivement critiqué par les altermondialistes, à quoi servent ces sommets réellement ?
Ce sommet a été créé en novembre 1975, en France, par le président Valéry Giscard d'Estaing ( VGE). L'objectif, "sortir du désordre financier". Ainsi du 15 au 17 novembre 1975, VGE va inviter au château de Rambouillet (Yvelines) les dirigeants des six pays les plus riches de la planète (France, Etats-Unis, Japon, Royaume-Uni, Italie, Allemagne de l'Ouest), pour "créer un contact direct entre les gouvernants", explique le directeur de l'Institut de relations internationales et stratégiques Pascal Boniface.
Très vite, en 1976, ce G6 se mue en G7 en accueillant le Canada. Le club prend sa forme définitive. À l'origine de l'initiative, le choc pétrolier de 1973, qui secoue l'économie mondiale, pousse le bloc occidental à se concerter. L'objectif est d'harmoniser les politiques financières hors des Nations unies. L'universitaire Régine Perron explique que "Valéry Giscard d’Estaing voulait sortir de la pesanteur de l'ONU". En fait, il s'agissait de prendre des décisions rapides pour établir une gouvernance occidentale avec une ligne, à laquelle les émergents devaient se plier.
Résultats
Après un consensus se dégageait "un consensus sur certaines décisions financières qui se traduisaient à l’époque au FMI", détaille Régine Perron. L'objectif était de ne pas tomber dans le protectionnisme et la guerre des monnaies." L'idée est de s'accorder sur de grandes orientations, plutôt que de prendre des décisions concrètes. "Le G7 n’est pas une institution internationale : c’est un groupe informel qui joue un rôle d’orientation et d’impulsion politique, confirme le Quai d'Orsay. Les pays membres se concertent pour faire avancer les questions liées aux politiques de sécurité, de gouvernance de la mondialisation, et de gestion des biens publics mondiaux." Le plus important, c'était de resserrer les liens pour amortir les turbulences.
En 1977, le G7 instaure "un système de concertation permanente entre les Etats-Unis, l'Europe et le Japon pour faire face aux crises".
Quelques grandes dates du G7
Au sommet du G7 de 1984 à Londres (Grande Bretagne), le couple américano-britannique Reagan-Thatcher tente d'imposer l'hégémonie libérale anglo-saxonne. En 1988, A Toronto (Canada), un geste est fait vers les pays en développement, avec l'effacement partiel de la dette. Après la chute du mur de Berlin, les sommets de Londres en 1991 et de Munich en 1992 scellent sous Gorbatchev et sous Eltsine l'intégration progressive de la Russie dans l'économie mondiale. Et dès 1996 à Lyon, le G7 affiche, comme priorité, la lutte contre le terrorisme, après l'attentat contre la base américaine de Dhahran, en Arabie saoudite, qui a fait 19 morts et près de 400 blessés. Le G7 se transforme en "barnum médiatique'" Ordre économique libéral et lutte contre le terrorisme, les grands jalons sont posés. Mais au fil des ans, le machine perd en efficacité, selon Pascal Boniface. "Avec des délégations officielles de plus en plus imposantes et des centaines de journalistes qui participent à ce barnum médiatique, la marge de manœuvre a disparu", analyse-t-il. Le G7 va perdre son caractère discret, informel. Bilan des G7 Ces sommets se déroulent dans des villes barricadées, depuis les heurts entre contestataires et forces de l'ordre au sommet de Gênes (Italie), en 2001, après la mort de Carlo Giuliani, tué par un carabinier. Parmis "les résultats très concrets" de ces dix dernières années, le Quai d'Orsay cite notamment le Partenariat de Deauville, lancé en 2011 "pour aider les pays arabes en transition démocratique" , "l’Initiative de Muskoka pour réduire la mortalité maternelle et infantile en 2010, et le soutien à la mise en œuvre (...) de l’Accord de Paris sur le climat". "Depuis 2010, un rapport annuel de redevabilité permet d’évaluer la mise en œuvre des engagements souscrits lors des sommets du G7", assure le Quai d'Orsay. Le G7, une vitrine d'un "capitalisme brutal", selon les altermondialistes Les altermondialistes n'y croient plus. "Le G7 n’est plus du tout, comme il y a dix ou vingt ans, une instance qui régule l’ordre du monde", regrette Aurélie Trouvé, membre de l'organisation altermondialiste Attac et de la plateforme Alternatives G7, pointant les objectifs affichés dans les communiqués de clôture comme autant de faux-semblants. "Entre autres, les pays membres s'étaient engagés à réduire les gaz à effet de serre ou à garantir la sécurité alimentaire [à Taormina, en Sicile, en 2017]. Or c’est l’inverse qui se passe. La faim dans le monde repart à la hausse. Les gaz à effets de serre aussi", dénonce-t-elle. Elle doute fortement que le thème de"la lutte contre les inégalités", mis en avant par l'Elysée pour l'édition 2019, soit suivi d'effets."La planète est en recul précisément à cause de la politique menée par les pays du G7 !" s'indigne-t-elle. Puis elle ajoute: "Les sommets du G7 restent avant tout la vitrine d’une politique qui fait des ravages et aggrave la crise écologique (...) Derrière son charme suranné, le G7 est une arme de séduction massive pour imposer idéologiquement un capitalisme de plus en plus brutal." Un club éclipsé par le G20 Pour certains spécialistes de politique étrangère la formule du G7 est dépassée et incapable de s'élargir. Le professeurBernard Badie pense que " le G7 permet surtout d’afficher la prétention d'une oligarchie occidentale à gérer le monde, ce qui suppose un minimum de connivence". D'où, selon lui, l'exclusion de la Russie en 2014 : "Le pays avait été intégré au G7 [devenu G8 en 1998]. Il en a été exclu avec Vladimir Poutine, sous prétexte de l'intervention russe en Crimée. Le degré de connivence était trop bas. Cela ne servait à rien de maintenir dans le club une Russie qui ne joue pas le jeu occidental et n’a rien à y gagner." Le rétrécissement du club signe sa perte d'influence, avec la montée en régime du G20, un G7 auquel s'ajoutent la Russie et les nouvelles puissances économiques émergentes (Chine, Inde, Brésil, Turquie ...). "Aujourd'hui, note Pascal Boniface, c’est le G20 qui a le plus d’importance et qui est le plus représentatif du monde." Donald Trump, " seul contre tous" Les restes du G7. "Il restait la coordination des pays occidentaux entre eux, mais il n’y en a plus depuis l'élection de Donald Trump à la Maison Blanche, selon Pascal Boniface. Avec son slogan 'America First', il se fiche complètement des alliés. Sur les communiqués finaux, soit il ne donne pas son accord, soit il les démolit par un tweet." En juin 2018, le président des Etats-Unis saborde le sommet de La Malbaie, au Québec, en retirant son soutien au communiqué final et en menaçant de droits de douanes alourdis l'Europe et le Canada. Il s'affiche "seul contre tous". Emmanuel crée pour éviter la fin du G7 Pour créer un courant d'air, en 2019, Emmanuel Macron annonce un "format renouvelé" qui associera au G7 de Biarritz quatre "grands partenaires" l'Afrique du Sud, l" Australie, la Chili et l" Inde), ainsi que quatre pays africains jouant, selon l'Elysée, "un rôle moteur sur le continent" . A savoir, le Burkina Faso, l'Egypte, le Sénégal et le Rwanda). Mais est-ce Cela suffisant à faire diversion, face à le président américain Donald Trump vrai chef d'orchestre? "Désormais, aux sommets du G7, on voit davantage l’incapacité des pays occidentaux à se mettre d’accord que l’efficacité des pays occidentaux à avancer", constate Pascal Boniface.