La course électorale a débuté ce 2 septembre en vue d’un scrutin anticipé. Les vingt-six candidats en lice auront douze jours pour convaincre les 7,15 millions d’électeurs.
La mort de Béji Caïd Essebsi a redistribué les cartes sur la scène politique. Lors de ce deuxième scrutin démocratique au suffrage universel direct, vingt-six candidats s’affronteront. L’une des principales têtes d’affiche, Nabil Karoui, est en prison.
La lutte contre le chômage qui dépasse les 15% et les moyens pour faire baisser l’inflation (qui oscille entre 6 et 7% après avoir atteint 7,5% l’an dernier) figurent au cœur des préoccupations affichées par de nombreux prétendants.
Parmi le million de nouveaux inscrits sur les listes électorales figurent 70% d’électeurs de moins de 25 ans ; ce qui placera logiquement l’attention et les aides à la jeunesse parmi les priorités des candidats à la fonction suprême.
Parents pauvres de la Tunisie moderne, les régions intérieures et les périphéries urbaines devraient également attirer les promesses électorales.
Le clivage entre pro et anti-islamistes qui animait la dernière présidentielle s’est effacé au profit de questions plus économiques. L’attitude à adopter face aux créanciers internationaux, comme le Fonds monétaire international, devrait voir les candidats se démarquer les uns des autres.
Nombre d’entre eux évoquent une révision de la Constitution pour renforcer le rôle du président. Ses prérogatives sont, en effet, limitées par la loi fondamentale et le locataire de Carthage est surtout maître des affaires étrangères et de la sécurité.
Le choix des électeurs est rendu particulièrement difficile par la très courte période de campagne officielle et par le fait que plusieurs candidats de poids n’ont pas de différences sur le fond.
Des adversaires de taille
L’Instance supérieure indépendante pour les élections a publié, le 31 août, la liste définitive des candidats ainsi qu’un modèle du futur bulletin de vote. En 2014, le président défunt, Beji Caïd Essebssi, rassemblait beaucoup autour de sa personne et du vote sanction contre les islamistes. Cette fois, le jeu est beaucoup plus serré en raison des poids lourds qui se discutent le fauteuil présidentiel.
Le parti Ennahdha présente pour la première fois son candidat, l’avocat Abdel Fattah Mourou, assez aimé de l’électorat nahdoui, qui pourrait aussi brasser plus large. Youssef Chahed, chef du gouvernement et président du jeune parti Tahya Tounes, va briguer aussi le poste tandis que son ministre de la Défense et adversaire, Abdelkrim Zbidi, va tenter de rallier les progressistes.
D’autres ont également le vent en poupe. L’une des deux seules candidates, Abir Moussi, présidente du parti destourien libre, mise sur les classes populaires comme son rival, l’homme d’affaires Nabil Karoui qui a su séduire les couches les plus défavorisées, mais qui risque de faire campagne en prison. Il a été arrêté le 23 août pour évasion fiscale et blanchiment d’argent.
Cette élection promet donc d’être mouvementée avec des électeurs de plus en plus indécis face à la pluralité des choix.
Pour la première fois
C’est la première fois que l’élection présidentielle se tient avant les législatives en Tunisie depuis la révolution. Ce premier tour sera déterminant pour le scrutin législatif du 6 octobre.
Trois débats télévisés incluant les vingt-six candidats à l'élection présidentielle seront organisés et retransmis en direct sur la chaîne de télévision nationale Wataniya. Une grande première. Ces débats seront organisés par la Haute autorité de l’audiovisuel (Haica) et la Commission électorale tunisienne, avec l’appui d’une ONG dont le but est de promouvoir la démocratie, Munathara.
« On essaie de permettre aux électeurs de se faire par eux-mêmes une image plus précise de chaque candidat », a déclaré Lassaad Dahech, PDG de Wataniya. Les trois débats, d’une durée de 2h30 chacun, auront lieu les trois derniers jours de la campagne, le 11, 12 et 13 septembre.
« C’est la première fois qu’on organise un débat politique [entre les candidats] pendant les élections en Tunisie », a souligné Nouri Lajmi, président de la Haica.
Lors de la première présidentielle de l’après-révolution, certains candidats avaient débattu individuellement avec des électeurs. « L’organisation des débats vise à renforcer la démocratie en Tunisie », a indiqué Belabbed Benkerida, fondateur de l’ONG Munathara.