Zone de libre-échange continentale : des défis "importants" de sécurité à relever

Lundi, Octobre 7, 2019 - 16:49

Du djihadisme à la piraterie, en passant par la prolifération des groupes extrémistes, l’insécurité devient le premier obstacle à la réalisation du marché commun africain.

La Zone de libre-échange continentale africaine (Zlecaf) est l’une des étapes clés pour la mise en œuvre de l’Agenda 2063 de l’Union africaine (UA). En s’appuyant sur les efforts d’intégration déjà effectués aux niveaux sous-régionaux, elle vise à créer un marché commun de 1,2 milliard de personnes, représentant un produit intérieur brut (PIB) de deux mille cinq cents milliards de dollars. L'objectif affiché est d’accroître le commerce intra-africain de 52,3 % d’ici à 2022. Une mise en œuvre qui pourra être rattrapée par le climat d’insécurité qui prévaut sur le continent.

Le djihadisme et la piraterie constituent les nouveaux défis sécuritaires auxquels l’Afrique est confrontée. Selon l’UA, la liste de groupes qualifiés de terroristes et opérant sur le sol du continent ne cesse de s’allonger. Plus de seize groupes seraient aujourd’hui actifs.

La zone sahélienne a connu une prolifération des groupes extrémistes liés à al-Qaïda (Aqmi et Ansar Dine), notamment depuis que la Libye a sombré dans le chaos après la chute du régime de Kadhafi en 2011. Le nord-est du Nigeria où sévit la secte Boko Haram, la Somalie, et la Corne de l’Afrique en général, qui sont aux prises avec les milices shebab et enfin, la région du Sahel, au sud du Sahara, sont les principaux foyers du terrorisme sur le continent.

Quant à la piraterie, elle s’est développée dans les années 2000 dans le golfe d’Aden, avant d’étendre sa zone d’action qui va aujourd’hui du golfe d’Oman (au nord) jusqu’au canal de Mozambique (au sud). Un autre facteur non négligeable.

À ces situations s’ajoutent les violences intercommunautaires qui se multiplient ces dernières années, particulièrement dans la région subsaharienne. L’un des exemples les plus marquants, cette année, a été le massacre de plus de cent soixante Peuls à Ogossagou, au Mali, près de la frontière avec le Burkina Faso.

La porosité des frontières, une aubaine pour les terroristes

À l’intérieur du continent, les zones frontalières sont autant d’espaces utilisés pour perpétrer des actes de violence. Les Etats en situation d'instabilité sécuritaire comme la Libye, le Mali, le Niger, le Nigeria, le Burkina Faso, la Centrafrique, la République démocratique du Congo, la Somalie ont en partage des milliers de kilomètres avec d’autres Etats. Les violences qui ont cours à l'intérieur de ces Etats ont donc progressivement tendance à s’étendre à toute la région à laquelle ils appartiennent, en raison de la porosité des frontières.

Au-delà des dépenses énormes que les Etats consacrent à maintenir une certaine stabilité, l’insécurité fragilise les Etats et ralentit leur activité économique, leur faisant ainsi perdre des points de croissance.

En 2014, la Banque africaine de développement a publié une étude évaluant les coûts économiques subis par les « Etats fragiles » du continent africain, c'est-à-dire ceux connaissant une situation d’insécurité inquiétante. D’après le rapport, sur la période 1980-2010, les pays fragiles ont enregistré une croissance négative de leur PIB/tête à -0,4% par an en moyenne, contre une croissance de 1% par an pour les « Etats non fragiles ».

De plus, cette instabilité sécuritaire a des conséquences économiques au-delà des frontières, notamment en raison de l’afflux des réfugiés dans les pays frontaliers. En 2018, l’Afrique comptait 6,3 millions de réfugiés et demandeurs d’asile politique et 14,5 millions de personnes déplacées à l’intérieur du continent, d’après les chiffres de l’Observatoire des situations de déplacement interne. Des réfugiés qui peuvent parfois entraîner des dépenses supplémentaires pour des pays déjà peu développés alors que les financements des bailleurs de fonds se font souvent attendre.

Pour l’instant, les efforts des pays pour pacifier le continent tardent à donner des résultats concrets. En 2013, l’UA adoptait un plan d’action visant à « faire taire les armes, d’ici à 2020 ». Un objectif qui ne sera vraisemblablement pas atteint, alors que la Zlecaf est prévue pour démarrer effectivement en juillet de la même année.

Josiane Mambou Loukoula
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