Le Premier ministre, Aristide Gomes, a défié, le 30 octobre, le décret présidentiel consacrant son limogeage, arguant que l’agissement du chef de l’Etat ayant nommé un nouveau chef du gouvernement n’avait pour but que d’instaurer un « désordre total » durant l’élection présidentielle, prévue le 24 novembre.
Aristide Gomes a assuré qu’il reste en place alors qu’un successeur est déjà connu, en la personne de Faustino Imbali. Un imbroglio politique qui inquiète la communauté internationale s’est installé dans le pays, parce que le nouveau Premier ministre est désavoué par la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest (Cédéao), qui soutient le chef du gouvernement déchu.
Après avoir réuni le cabinet démis, Aristide Gomes a indiqué qu’il avait reçu le soutien appuyé de la Cédéao, médiatrice dans l’interminable crise politique qui secoue son pays. Et l’organisation sous-régionale a même déclaré le décret présidentiel « illégal », soulignant qu’Aristide Gomes avait « tout son soutien ». Elle a également brandi la menace de sanctions au régime actuel à Bissau.
Si l’un des enjeux immédiats dans la vie politique en Guinée-Bissau est la tenue ou non de la présidentielle à la date prévue, il faut signaler que la Cédéao, l’ONU et l’Union africaine tiennent toujours au respect du calendrier. Les dirigeants de cet espace communautaire avaient, en juin dernier, chargé le gouvernement d’Aristide Gomes de préparer la présidentielle et de diriger jusque-là les affaires.
A l’issue de la prestation de serment de son nouveau Premier ministre, l’actuel président bissau-guinéen, José Mario Vaz, a déclaré : « Je voudrais réaffirmer, et surtout insister sur le fait que l’élection présidentielle aura lieu à la date fixée, le 24 novembre. Des gens disent que nous en sommes incapables. Eh bien, nous allons leur montrer que quand on veut, on peut ». Ce gouvernement « aura comme principale mission la réalisation de la présidentielle, le 24 novembre. Des élections transparentes, impartiales, avec le dialogue comme mot d’ordre », a répondu à ses côtés Faustino Imbali.
Des doutes sur la tenue du scrutin présidentiel
Pour nombre de Bissau-Guinéens, le décret annonçant la démission des membres du gouvernement jette le doute sur la tenue de la présidentielle. Dans ce document rendu public, le 28 octobre, le chef de l’Etat relève avoir constaté une « grave crise politique qui empêche le fonctionnement normal des institutions de la République », le conduisant à démettre le gouvernement.
Le décret publié est le dernier épisode en date d’une confrontation de plusieurs mois entre présidence et gouvernement, parce qu’il sème l’incertitude sur les lendemains politiques de la Guinée-Bissau, ce petit pays d’Afrique de l’ouest peuplé de moins de deux millions d’habitants.
Le président José Mario Vaz a annoncé la dissolution du gouvernement, alors qu’il y a quelques jours, le Premier ministre, Aristide Gomes, dénonçait un projet de coup d’Etat, accusant le candidat de l’opposition, Umaro Sissoco Embalo, d’en être le commanditaire.
Dans le but de favoriser le bon déroulement de l’élection présidentielle, l’Ecomib, la force de la Cédéao, a renforcé ses patrouilles dans la ville, selon des sources concordantes. Cette force avait été déployée, en 2012, en Guinée-Bissau, pour y sécuriser la transition politique, après le dernier putsch, qui avait interrompu la présidentielle cette année-là.
Le 10 mars dernier, les élections législatives s’étaient bien déroulées dans le pays. Malgré cela, la Guinée-Bissau tente encore de sortir de la crise qu’elle traverse depuis le limogeage, en août 2015, par le président José Mario Vaz, de Domingos Simoes Pereira, chef du PAIGC, jusque-là son Premier ministre et qui sera candidat, le 24 novembre.
L’actuel président a terminé son mandat de cinq ans, le 23 juin. Depuis lors, il est resté à la tête du pays, mais a laissé la conduite des affaires au gouvernement qu’il a formé début juillet, jusqu’à la tenue de la présidentielle, à la suite d’une décision de la Cédéao.
La Guinée-Bissau est une ancienne colonie portugaise, devenue indépendante en 1974, après une lutte de onze ans. Depuis lors, elle a connu quatre putschs, seize tentatives de coup d’Etat et une valse de gouvernements.