Le salon du chocolat se tient à Paris, en France, alors que la Côte d'Ivoire et le Ghana, principaux fournisseurs mondiaux de la matière première, tentent d'imposer des prix de vente plus rémunérateurs.
Parrainée par Dominique Ouattara, l'épouse du président de la Côte d'Ivoire, premier pays producteur mondial, la manifestation chocolatière a contribué à consacrer une génération de maîtres-chocolatiers et pâtissiers stars. Les responsables de la manifestation entendent servir de trait d'union entre les consommateurs occidentaux et les petits planteurs, dont beaucoup vivent sous le seuil de pauvreté de 1,20 dollar par jour, selon les chiffres de la Banque mondiale.
Alors que la transformation de la matière première, opération très rentable, est rarement assurée dans les pays producteurs. A titre d'exemple, la Côte d'Ivoire, qui produit deux millions de tonnes l'année, en transforme moins de 25%.
"Cette année, nous avons voulu mettre l'accent sur l'importance des pays producteurs de cacao qui seront tous présents, de la Côte d'Ivoire à l'Indonésie en passant par le Ghana ou l'Amérique du Sud", a declaré Sylvie Douce, fondatrice et organisatrice de la manifestation chocolatière.
Le salon 2019 s'est ouvert dans un contexte de confrontation au sein de la filière cacao. Confrontation entre les deux premiers producteurs, la Côte d'Ivoire et le Ghana, qui représentent à eux deux plus de 60% de la production mondiale de cacao, et les négociants de cacao et industriels mondiaux du chocolat. Ils avaient tendance à garder la valeur ajoutée pour eux."Sur les cent milliards de dollars que représente le marché mondial du cacao, seuls six milliards reviennent aux agriculteurs", révèle Capital. "Un juste prix des fèves de cacao serait une grande aide pour appuyer les investissements du gouvernement dans les infrastructures rurales et pour améliorer les conditions de vie", a indiqué le vice-président du Ghana, Mahamadu Bawumia, cité par Capital.
En juin dernier, la Côte d'Ivoire et le Ghana ont suspendu, pendant plusieurs semaines, la vente des récoltes 2020-2021. Un moyen d'imposer aux marchés et aux multinationales un prix minimum plus rémunérateur et moins lié à la volatilité des cours, qui ne soit pas en-deçà de deux mille six cents dollars la tonne. Après des semaines de pression, de nombreux géants du secteur, dont les groupes suisses Barry Callebaut et Nestlé, ont accepté de payer un "différentiel de revenu décent" . Le "différentiel de revenu décent" s'élève "à qutare cents dollars par tonne", auquel s'ajoute "un prix plancher de deux mille six cents dollars la tonne", explique Jeune Afrique.
Cependant, les prix restent encore trop bas pour avoir un niveau de vie convenable en Côte d'Ivoire, indique Fatah Sadaoui, de l'ONG SumOfUs. En Amérique latine, où le cacao est en général acheté un petit peu plus cher qu'en Afrique, l'initiative ouest-africaine est regardée avec beaucoup d'intérêt par les producteurs.
"Ce qui est en train de se passer est très intéressant et constitue un moment important, car il s'agit d'une tentative de rééquilibrage du pouvoir dans la filière" cacao mondiale, analyse Abel Fernandez, producteur de cacao en République dominicaine et dirigeant d'une coopérative en commerce équitable Fair Trade-Max Havelaar. "En moyenne, en Afrique de l'ouest, les producteurs de cacao reçoivent seulement 60% du prix de base d'exportation car les Etats appliquent une imposition élevée, alors qu'en Amérique latine, ils reçoivent de 80% à 85% du prix d'exportation", a-t-il déclaré. Ajoutant: "Mais nous regardons quand même de très près ce qui est en train de se développer dans les semaines et mois à venir, en Afrique de l'ouest, car cela peut nous amener à questionner les acheteurs pour obtenir nous aussi des prix plus élevés".