Énergie : l'Afrique a besoin du nucléaire pour s'éclairer et s'industrialiser (suite et fin)

Jeudi, Décembre 19, 2019 - 19:00

Si la France, à travers ses grandes entreprises (EDF, Engie), et instituts français (Commissariat de l'énergie atomique), maîtrise le cycle de l’atome, c'est également le cas de la Russie.

L’agence nucléaire russe Rosatom, présente en Afrique, a redoublé son offensive depuis le sommet de Sotchi. En plus de ses nouveaux réacteurs (type VVER), la Russie a diversifié ses technologies (SMR et nucléaire sur barge). L’argument de vente de Moscou réside dans le coût de ses centrales "moins chères" et de l’investissement assorti de prêts avantageux pour une livraison "clé en main".
Moscou compte investir 130 milliards d’euros dans son industrie nucléaire, et accélérer une stratégie commerciale "clé en main". ''À Sotchi, le dialogue a été noué avec l’Éthiopie et le Rwanda. La Russie est déjà au Nigeria et au Kenya. Son VVER est une bonne technologie et elle est beaucoup plus offensive que les Occidentaux", note Claude Fischer-Herzog.
Mais en Afrique, clé en main, c’est compliqué. Elle appelle plutôt à la mise en place des autorités de sécurité nucléaire, la formation locale de la main d’œuvre qualifiée. Et, surtout, permettre une appropriation du nucléaire aux populations "afin de mieux le comprendre pour pouvoir l’accepter sur leur territoire". Rosatom disposerait déjà de protocoles d’accord avec dix-huit pays africains. La coopération avec la Zambie et le Rwanda devrait "aboutir très vite", a affirmé le patron de Rosatom Alexeï Likhatchiov à Sotchi. Moscou aurait déjà supplanté ses rivaux dans un pays d'Afrique francophone (Niger, où Orano ex- Areva a réduit ses activités).
Niamey a trouvé dans l’agence nucléaire russe un nouvel allié potentiel pour l'aider à développer ses ressources en uranium, et à s’équiper très prochainement. Bien que disposant de 20% des réserves mondiales d’uranium, l’expertise nucléaire reste faible sur le continent. La France, la Russie et la Chine, sont déjà des partenaires privilégiés de l’Afrique dans le domaine, et font office de leaders mondiaux. Contrairement à la Russie, la Chine profite simplement de son poids économique pour vendre sa technologie. C'est le cas au Kenya où la China General Nuclear Power a signé un contrat en 2018 pour un réacteur de troisième génération.
Claude Fischer-Herzog reste persuadée que le développement de cette industrie sur le continent est une nouvelle chance pour l’Europe d’apporter à l’Afrique son expertise et son savoir-faire. Face aux enjeux économiques, sociaux et financiers, éthiques et politiques que recouvre l’énergie nucléaire, son souhait est qu’elle soit mise au cœur d’une nouvelle coopération entre l’Europe et l’Afrique. Le Parlement européen a adopté en novembre dernier une résolution soulignant, pour la première fois, l’importance de l’énergie nucléaire dans sa transition énergétique. Il a invité la Cop 25 à "prendre des mesures audacieuses et ambitieuses", en faveur de l’énergie nucléaire.

La place de l'Afrique dans la production d’énergie verte ou décarbonée

Claude Fischer-Herzog conclut : "Les enjeux climatiques sont mondiaux mais l’exigence des pays développés d’une Afrique zéro carbone, est irréaliste et irresponsable! Non seulement celle-ci ne contribue qu’à 4% au réchauffement climatique mais, en plus, elle devrait investir propre si elle veut le développement! À l’heure de la COP25, les pays africains qui le souhaitent doivent pouvoir faire le choix du nucléaire et bâtir un mix diversifié en valorisant tous leurs atouts décarbonés. Ce qui suppose de partager avec eux des technologies de décarbonation des énergies fossiles".

Noël Ndong
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