Flambée des prix : difficile compromis entre le gouvernement et les commerçants

Lundi, Décembre 30, 2019 - 10:42

Le panier de la ménagère a été durement affecté en 2019 par l’augmentation vertigineuse des prix des denrées alimentaires et des produits de première nécessité. Les autorités, les commerçants, y compris la société civile restent divisés aussi bien sur les causes de la crise que sur les réponses à y apporter.

Après plusieurs semaines de négociations infructueuses avec les syndicats des commerçants, le ministère du Commerce a décidé de passer à la vitesse supérieure. Début octobre, il a publié une circulaire fixant les prix homologués des denrées alimentaires et des produits de première nécessité.

Dans une note d’avertissement, publiée le 18 novembre, le directeur de cabinet du ministre d’État, ministre du Commerce, des approvisionnements et de la consommation, Victor Nguilou-Mpemba, a sommé les grossistes d'afficher les prix dans leurs rayons et de délivrer des factures aux détaillants. Pour la tutelle, ces mesures constituent le meilleur moyen de s’attaquer à la flambée des prix.

Mais, face à la résistance des commerçants, les autorités vont passer à une autre étape en lançant à Brazzaville et Pointe-Noire, le 26 novembre, les brigades de contrôle des marchés. À en croire le directeur des fraudes commerciales, Florian Nicaise M’Voulaléa, l’objectif de cette opération est de veiller au respect des prix homologués par l’État.

La crise des prix va conduire l’Assemblée nationale à convoquer le ministre du Commerce, Claude Alphonse Nsilou, le 13 novembre, pour s’expliquer sur les causes de la situation et les mesures envisagées par l’exécutif. Devant les députés, le ministre a indiqué que la hausse du prix des péages, la pénurie de devises ainsi que le surcoût des séjours prolongés des conteneurs au port de Pointe-Noire étaient à l’origine de la flambée des prix observée dans le pays.

Comme dans ses précédentes déclarations, Claude Alphonse Nsilou s’est montré intransigeant envers les commerçants. « Le Congo traverse une situation économique très difficile qui a fortement dégradé le pouvoir d’achat des ménages. L’argent se raréfie, l’argent ne circule plus. Dans ces conditions, nous ne pouvons pas accepter une quelconque augmentation des prix des produits de première nécessité quelle qu’en soit la raison », a-t- il martelé.

Les commerçants mécontents

L’Union nationale des commerçants du Congo (UNCC) est l’une des organisations qui défendent la cause des milliers de marchands. Dans un entretien exclusif avec Les Dépêches de Brazzaville, le président de l’UNCC, Nicodème Nzoutany Eloye, a souligné l’inquiétude des commerçants locaux.

Celui-ci est allé plus loin en dénonçant les tracasseries dont font l’objet les commerçants depuis le lancement en mai 2019 d’une opération interdisant l’importation et la commercialisation des produits libellés en langues étrangères. « La responsabilité revient plutôt à l’administration publique qui octroie des autorisations d'importation. Si les agents du ministère du Commerce faisaient convenablement leur travail, aucun problème ne se poserait », a estimé Nicodème Nzoutany Eloye.

La société civile dénonce la parafiscalité

Pour le secrétaire exécutif de l’Observatoire congolais des droits des consommateurs, Mermans Babounga, la flambée des prix des denrées alimentaires et des produits de première nécessité est due à la multiplication des taxes imposées par le gouvernement. Il réfute les arguments du ministre du Commerce selon lesquels la pénurie de devises et le surcoût des séjours prolongés des conteneurs au port de Pointe-Noire sont la cause de l’augmentation des prix.

Selon ce dernier, cette hausse est due essentiellement à une pression fiscale et parafiscale. « Nous avons été surpris par l'annonce faite par le ministère du Commerce, car l'augmentation des prix ne peut pas être due à la rareté des devises (…) Ce qui est curieux, c'est que tous les produits de première nécessité ne figurent pas sur la liste des produits homologués par le ministère tels que le ciment dont le prix a aussi augmenté de plus de 35% », a expliqué Mermans Babounga.

Son organisation et sept autres associations locales ont lancé, le 6 septembre, une plate-forme unique de défense des droits des consommateurs, pour essayer de faire monter la pression.

La réponse à cette flambée des prix viendra peut-être du plus haut sommet de l’État. Puisque dans son message sur l’état de la nation en 2019, le 17 décembre, devant le Parlement réuni en congrès, le président de la République a mentionné la faible capacité de production agricole nationale. Il a, à peine voilé, instruit le gouvernement à accélérer les projets en faveur de la mécanisation de l’agriculture et de l’irrigation.  

Fiacre Kombo
Légendes et crédits photo : 
Les étalages dans un marché de Brazzaville/Adiac
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