A la base, la décision du chef de l'exécutif national de confier la gestion de la commission ad-hoc chargée de régler la problématique de l'instabilité dans les institutions provinciales au ministre de la Justice, proche du PPRD, en lieu et place de celui de l’intérieur d’obédience « thisekediste », n’est pas du goût de l’UDPS qui y voit une provocation de trop.
Une situation assez confuse tend à mettre actuellement en mal la coalition gouvernementale FCC-Cach. Il s’agit de la dernière décision du Premier ministre Sylvestre Ilunkamba confiant au vice-Premier ministre de la justice, Célestin Tunda ya Kasende, la direction de la commission ad-hoc instituée par le Conseil des ministres du 6 décembre dernier. Cette commission chargée d’apporter une thérapeutique efficace à l’instabilité, qui caractérise actuellement les institutions provinciales du Kongo central, de l’Ituri, du Sankuru et du Haut-Lomami, est désormais au cœur d’une vive controverse au sein de l'exécutif national.
La querelle ayant pris corps au sein de la coalition porte sur la nomination du ministre de la Justice à la tête de cette structure en lieu et place du ministre de l'Intérieur, Gilbert Kakonde. Ce dernier qui considère qu’il s’agit là d’un domaine relevant de sa compétence, ou mieux de ses attributions, a très mal digéré l’incursion de son collègue de la Justice telle que cautionnée par le Premier ministre. Le fait que ces deux derniers soient membres de l’ex-parti présidentiel, le PPRD, n’a hélas fait qu’exacerber la polémique entre les partenaires de la coalition.
A l’UDPS où le ministre de l’Intérieur est un des cadres actifs, on crie déjà à la provocation de la part du FCC. Le président intérimaire de ce parti aujourd’hui aux commandes du pouvoir est monté au créneau pour s'insurger contre ce qu’il a qualifié de « monarchie majoritaire » instaurée par le FCC tout en se réservant le droit d'y donner incessamment une réponse appropriée. « En tant que numéro deux du gouvernement, Gilbert Kakonde est habilité à piloter cette commission ad hoc, le contraire étant une aberration administrative et politique », argumentent les défenseurs du ministre de l’Intérieur. Ces derniers s’appuient notamment sur l’Ordonnance n° 17/024 du 10 juillet 2019 portant Organisation et fonctionnement, modalités de collaboration entre le président de la République et le gouvernement ainsi qu’entre les membres du gouvernement. Il en découle qu’en cas de nécessité, le Conseil des ministres peut effectivement créer, à titre exceptionnel, des commissions ad hoc en vue d’étudier des questions spécifiques (art.53). La commission est alors présidée par le vice-Premier ministre, par le ministre d’Etat, le ministre ou le ministre délégué principalement concerné par la matière traitée (art.55).
Dans une correspondance adressée au Premier ministre, le ministre de l'Intérieur lui a rappelé ces dispositions légales, faisant ainsi prévaloir sa compétence dans la conduite de ladite commission. Il s’est heurté au mutisme du destinataire qui, dans une autre circonstance, a répliqué en ces termes : « C’est une question de droit et non de politique pure et de sécurité… Cette question ne peut se traiter qu’à l’éclairage de la Constitution. C’est donc du ressort de la Justice même si l’on vise un arrangement à l’amiable ». C’était tout dire.
Quand bien même aucune disposition constitutionnelle ne fait mention des cas susévoqués, en l’occurrence les épreuves de force entre les assemblées provinciales et les exécutifs provinciaux en Ituri, au Kongo central, au Sankuru et dans le Haut-Lomami, d’aucuns critiquent le manque d’élégance dont aurait fait preuve le Premier ministre. Il aurait géré ce dossier avec tact en faisant un bon dosage entre les considérations du droit et les exigences politiques au nom du maintien de la cohésion gouvernementale, réfléchissent nombre d’analystes. Le mariage d’intérêt entre le FCC et le Cach n’a pas encore volé en éclats, mais tout laisse entrevoir un effritement de la confiance mutuelle au niveau des membres du gouvernement provenant de ces deux regroupements politiques en coalition.
Pour rappel, la commission interministérielle instituée est chargée d’examiner la situation d'instabilité qui prévaut dans les institutions provinciales de quatre provinces précitées et de proposer des mesures concrètes en vue de recréer la confiance entre les gouvernements provinciaux et les assemblées délibérantes. Dossier à suivre.