Les chefs d’Etat présents se sont accordés sur ce point, le 13 janvier, à Pau (sud-ouest de la France), lors du sommet qui les a réunis, et qui avait pour but de chercher à ramener la paix dans la zone, confrontée à une escalade des attaques djihadistes.
La rencontre a permis aux dirigeants du G5 Sahel (Roch Marc Christian Kaboré du Burkina, Ibrahim Boubacar Keïta du Mali, Mohamed Ould Cheikh El Ghazouani de la Mauritanie, Mahamadou Issoufou du Niger et Idriss Déby du Tchad) et aux autorités françaises de signer une déclaration commune dans laquelle ils ont « exprimé le souhait de la poursuite de l’engagement militaire de la France au Sahel ». Ce que la France attendait depuis quelque temps d’autant qu’une montée du sentiment anti-français, en particulier au Mali et au Burkina, n’était pas appréciée par le président français, Emmanuel Macron.
A l’occasion, il a été également convenu des évolutions stratégiques de la lutte anti-djihadiste dans le Sahel, notamment en concentrant les efforts sur certains points, et d’augmenter les efforts de formations des armées des pays de la région. Les participants ont, par ailleurs, appelé tous les pays et partenaires souhaitant contribuer aux opérations de lutte contre le terrorisme à participer à une « Coalition pour le Sahel ».
Les dirigeants présents ont décidé de coordonner leur action militaire en la concentrant sur la zone des trois frontières (Mali, Niger, Burkina), et en visant en priorité de l’Etat islamique au Grand Sahara. C’est sous le commandement de la force Barkhane et de la force conjointe du G5 Sahel que s’effectuera cette coordination, selon la déclaration commune, qui évoque aussi des mesures pour restaurer la présence de l’Etat, des administrations et des services publics dans de vastes zones où elle n’est plus, notamment au Mali, et la poursuite des efforts en matière d’aide au développement.
S’agissant de Washington qui envisage un désengagement de ses troupes en Afrique, les pays du G5 Sahel ont salué ses efforts entrepris pour combattre le terrorisme au Sahel. Ils ont « exprimé leur reconnaissance à l’égard de l’appui crucial apporté par les Etats-Unis et ont exprimé le souhait de sa continuité ».
Le président burkinabè, Roch Kaboré, président en exercice du G5 Sahel, a reconnu le rôle joué par les Etats-Unis dans la lutte contre le terrorisme dans la région. « C’est un allié important que nous devons sauvegarder », a-t-il insisté. Quant à son homologue français, il a dit que le désengagement de Washington « serait une mauvaise nouvelle pour nous ». « J’espère pouvoir convaincre le président Trump que la lutte contre le terrorisme se joue aussi dans cette région », a-t-il ajouté.
Emmanuel Macron qui, au départ, avait évoqué un possible retrait des soldats français dans la région, critiqués par une partie des opinions publiques africaines, a montré la détermination de la France pour combattre les djihadistes au Sahel en annonçant l’envoi de 220 soldats supplémentaires. Ces militaires vont renforcer les troupes françaises de l’opération Barkhane, déjà fortes de 4.500 hommes.
Le président français a saisi cette opportunité pour dénoncer les discours antifrançais. « Les discours que j’ai pu entendre ces dernières semaines sont indignes » parce qu’ils servent d’autres intérêts, « soit ceux des groupements terroristes, soit ceux d’autres puissances étrangères qui veulent simplement voir les Européens plus loin, parce qu’elles ont leur propre agenda, un agenda de mercenaires », a-t-il relevé. « Moi, je sais qui est tombé pour la sécurité des Maliennes et des Maliens, des Nigériens et des Burkinabè : des soldats français », a-t-il martelé, en référence aux 41 militaires français tués au Sahel depuis 2013.
Lors d’un dîner de travail auquel ont pris part le secrétaire général des Nations unies, Antonio Guterres, le président de la Commission de l’Union africaine, Moussa Faki, et le président du Conseil européen, Charles Michel, les dirigeants africains et leur allié français ont plaidé pour un appui renforcé des Européens à s’investir pleinement dans la lutte anti-djihadiste au Sahel. Un appel qui venait à point nommé en raison de l’aggravation de la situation dans la région dont le Niger, qui a subi, le 12 janvier, de pires pertes dans une attaque djihadiste : 89 soldats tués, dans le camp de Chinégodar, près du Mali.
L’ONU estime que plus de 4.000 personnes ont été tuées dans des attaques terroristes en 2019 au Burkina Faso, au Mali et au Niger.
Avant de se séparer, les chefs d’Etat du Sahel et de la France se sont accordés pour qu’un nouveau sommet se tienne en juin 2020 à Nouakchott, pour faire le point sur la stratégie annoncée.