De tout temps, les peuples ont toujours migré, poussés par des raisons économiques, sociales ou politiques. Le changement climatique vient aujourd’hui s’ajouter aux facteurs de migration : un nombre grandissant d’individus quittent des territoires exposés aux dérèglements climatiques pour s’installer, ailleurs dans leur pays, dans des régions où ils pourront reconstruire leur vie.
Sécheresse, inondations, ouragans, tremblements de terre, érosion des côtes, selon l’International Displacement Monitoring Center (IDMC), au cours de la dernière décennie, les catastrophes naturelles ont déplacé cent soixante-six millions de personnes, soit en moyenne chaque année près de 27,5 millions. Si un grand nombre d’entre elles trouve refuge dans leur propre pays, certaines doivent partir à l’étranger. Or, ces dernières ne bénéficient d’aucune protection juridique internationale. Elles ne sont, en effet, pas protégées par la convention de Genève de 1951. L’afflux de migrants et de réfugiés cherchant asile en Europe est aujourd’hui principalement causé par les guerres civiles et l’effondrement des Etats au Moyen-Orient, mais le rôle du climat, bien qu’impossible à chiffrer, est plus que probable. Si l’Europe en sent déjà les effets directs et indirects, l’ampleur de ces migrations va excéder ce que nous connaissons actuellement, préviennent plusieurs experts, et toucher tous les continents.
Dans les années à venir, le changement climatique conduira à une dégradation des terres et à une raréfaction des ressources en eau. Les terres agricoles disponibles pourraient diminuer fortement d’ici à 2050, quand l’écart entre les besoins en eau et les ressources disponibles pourrait atteindre 40 % dans les deux prochaines décennies. Cette année simplement, soixante millions de personnes pourraient migrer des parties dégradées de l’Afrique sub-saharienne vers l’Afrique du Nord et l’Europe. La question climatique est devenue un facteur majeur de déstabilisation et de migrations dans le siècle en cours.
Une nouvelle étude de la Banque mondiale intitulée « Se préparer aux migrations climatiques internes » analyse ce phénomène récent et ses effets à l’horizon 2050 en se penchant sur trois régions du monde : l’Afrique subsaharienne, l’Asie du Sud et l’Amérique latine. Ses conclusions sont implacables : si l’on n’agit pas de toute urgence contre le changement climatique et pour le développement, ces régions pourraient être globalement confrontées à la présence de plus de cent quarante millions de migrants climatiques internes d’ici 2050. Des habitants forcés de se déplacer en raison des sécheresses, des mauvaises récoltes, de l’élévation du niveau de la mer et de l’aggravation des ondes de tempêtes.
Mais il est encore possible d’éviter le pire : le nombre de migrants climatiques pourrait être réduit de 80% grâce à des mesures concertées au niveau mondial. Il est notamment indispensable d’intensifier les efforts internationaux destinés à réduire les émissions de gaz à effet de serre afin d’atténuer la hausse mondiale des températures mais aussi, au niveau de chaque pays, de mettre en place des plans de développement solides.