La pandémie du coronavirus va plonger cette année les pays d'Afrique subsaharienne dans leur première récession depuis un quart de siècle, avec une baisse de 1,6% de leur produit intérieur brut.
Les deux géants économiques du continent - le Nigeria, son principal producteur de pétrole, et l'Afrique du Sud, la plus industrialisée - vont voir leur PIB reculer de respectivement 3,4 et 5,8%, selon les prévisions trimestrielles mondiales publiées par le FMI. Sous réserve de l'ampleur que prendra l'épidémie de Covid-19 sur le continent, l'institution table toutefois sur un fort rebond des économies africaines dès 2021 avec un retour à une croissance subsaharienne estimée à +4.1%.
L'Afrique reste pour l'heure relativement épargnée par l'épidémie avec un total de 15.300 cas officiellement recensés pour 835 morts. Mais de nombreux experts continuent à redouter une catastrophe sanitaire sur le continent. Tous les pays africains « sont confrontés à une crise sanitaire, un choc sévère de la demande extérieure, un resserrement considérable du contexte financier mondial et un plongeon du prix des matières premières qui aura un impact sévère sur l'activité des exportateurs de matières premières », a résumé le FMI. Cette tendance confirme celle publiée la semaine dernière par la Banque mondiale, qui avait anticipé une chute brutale de la croissance de la zone subsaharienne.
Les chiffres avancés par la Banque mondiale étaient plus mauvais que ceux du FMI, avec des prévisions de croissance comprises entre -2,1 et -5,1% en 2020 en Afrique. Les récessions les plus prononcées prévues par le Fonds frappent les pays producteurs d'or noir - comme le Nigeria (-3,4%), l'Angola (-1,4%) et le Congo (-2,3%) - et de matières premières - comme la République démocratique du Congo (-2,2%) ou la Zambie (-3,5%).
Déjà en récession depuis le début de l'année, l'Afrique du Sud devrait enregistrer un recul de 5,8% de son PIB. Le FMI anticipe même une inquiétante augmentation de son taux de chômage de 28,7% à 35,3% de sa population active.
Quelques pays émergent toutefois et devraient garder une croissance positive en 2020. Parmi eux l'Ouganda (+3,5%), l'Ethiopie (+3,2%), le Sénégal (+3%) et la Côte d'Ivoire (+2,7%), selon le Fonds.
Le pape François a appelé dimanche à "réduire" voire "annuler" la dette des pays pauvres. De son côté, le président nigérien Mahamadou Issoufou a réclamé un "plan Marshall" pour aider l'Afrique à surmonter la crise causée par la pandémie de coronavirus. Le Premier ministre éthiopien Abiy Ahmed a lui demandé dès le mois dernier au G20 d'alléger la dette des économies les plus vulnérables et de préparer un plan d'aide financière d'urgence d'une valeur de 150 milliards de dollars.
Faits marquants
- Chiffres. La pandémie de nouveau coronavirus a fait plus de 120.000 morts dans le monde depuis son apparition en décembre en Chine. Plus de 1.923.390 cas ont été diagnostiqués dans 193 pays. Les Etats-Unis sont le pays le plus touché avec 23.649 décès pour 582.594 cas. Suivent l'Italie avec 20.465 morts, l'Espagne (18.056 morts), la France (14.967 morts) et le Royaume-Uni (11.329 morts).
- Confinement. Le gouvernement indien a annoncé mardi la prolongation au moins jusqu'au 3 mai du confinement de ce pays de 1,3 milliard d'habitants. L'Inde a recensé 10.363 cas confirmés et 339 morts, selon le dernier bilan officiel. En France, le confinement est prolongé jusqu'au 11 mai. L'activité pourra ensuite redémarrer avec une réouverture progressive des crèches, écoles et lycées. Les bars, restaurants ou cinémas resteront, eux, fermés jusqu'à nouvel ordre, tout comme les frontières avec les pays non européens. En Italie, où le confinement et l'arrêt quasi total de l'activité économique imposé depuis plus d'un mois a été prolongé jusqu'au 3 mai, quelques commerces, comme les librairies ou les laveries, sont autorisés à rouvrir mardi dans certaines régions. L'Autriche, elle, rouvre mardi ses petits commerces et ses jardins publics, estimant avoir suffisamment "aplati" sa courbe de contamination. L'Espagne, pays le plus endeuillé d'Europe après l'Italie, autorise depuis lundi une reprise partielle du travail mais le confinement général imposé depuis le 14 mars reste en vigueur.
- Dette. La France a obtenu de ses partenaires dans le cadre du Club de Paris et du G20 un moratoire du service de la dette des pays les plus pauvres en 2020, mais pas d'annulation de leurs créances. D'éventuelles annulations, souhaitées par le président Emmanuel Macron, n'interviendront qu'au cas par cas et dans un cadre multilatéral. Sur le service de cette dette qui représente un total de 32 milliards de dollars pour les 76 pays éligibles, dont 40 situés en Afrique sub-saharienne, la France a obtenu le moratoire au niveau des créanciers bilatéraux (12 milliards) et des créanciers privés (8 milliards), soit un total de 20 milliards de dollars. "Nous avons obtenu cela dans le cadre du Club de Paris et dans le cadre du G20 puisque la Chine a soutenu notre approche", a précisé le ministre français de l’Économie.