De récents travaux scientifiques viennent confirmer l’impact dramatique du réchauffement climatique sur les cultures céréalières en Afrique de l’Ouest, cultures extrêmement importantes pour la sécurité alimentaire en Afrique. En 2019 a paru une étude qui venait confirmer les effets alarmants du réchauffement climatique en Afrique de l’Ouest.
Ces travaux scientifiques, parus dans la revue « Scientific reports (Nature) », ont été réalisés par deux agro-climatologues de l’Institut de recherche pour le développement (IRD), rattachés à l’unité de recherche « Espace – Dev », en partenariat avec l’Institut national japonais pour les sciences environnementales et l’agriculture.
L’étude démontre que les changements climatiques ont eu un impact sur les rendements agricoles à partir du 20e siècle et mettent en péril la sécurité alimentaire de nombreuses populations. Leur méthode, basée sur la modélisation, a consisté à imaginer deux situations climatiques. La première, sans l’empreinte de l’Homme, telle qu’elle était au 19e siècle et une avec des conditions climatiques altérées par l’Homme, en prenant en compte les émissions de gaz à effet de serre engendrées par l’activité humaine. « Nous avons lancé des simulations de rendement pour le mil, le sorgho et le maïs dans l’ensemble de l’Afrique de l’Ouest, puis dans des pays, en particulier le Nigeria, le Niger, le Mali, le Burkina Faso et le Sénégal », explique le chercheur Dimitri Defrance, co-auteur de cette étude. Cette dernière énonce que « le mil semble être plus affecté par le changement climatique que le sorgho dans les deux modèles de culture. En moyenne, en Afrique de l’Ouest, le modèle simule une perte de rendement énorme de 17,7% pour le mil et de 15,0% pour le sorgho». D’un point de vue économique, cela engendre des pertes allant de deux à quatre milliards de dollars pour le mil et entre un à deux milliards pour le sorgho.
Sur place, initiatives et adaptations se multiplient : l’association de culture, l’agroforesterie, le maintien des branches au sol pour conserver l’humidité, le choix de planter des céréales plus adaptées aux fortes températures, l’enrichissement et la conservation des nutriments dans le sol s’imposent comme une priorité. Heureusement que les populations sur place n’ont pas attendu ces études pour agir, se félicitent les auteurs de l’étude. Par exemple, l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) a mis en place des systèmes d’adaptation locale. Une autre méthode est la mise en place par le centre régional météorologique d’un système de pré-alerte qui permet d’informer les agriculteurs sur le début de la mousson et de leur permettre de savoir quand semer les graines.
Quels impacts auront ces travaux pour éviter que les populations locales s’appauvrissent ?
L’étude a vocation à être prise en compte, elle a déjà été reprise par d’autres études et confirme que l’Homme a déjà un impact sur le climat. Il faut rappeler que l’Afrique représente une part infime des émissions de gaz à effet de serre globales mais est le continent le plus touché par les changements climatiques, faire en sorte de diminuer les émissions de gaz à effet de serre et que les populations les plus vulnérables s’adaptent aux changements climatiques passe par l’agriculture. La COP22 tenue à Marrakech en 2016 a marqué un tournant décisif permettant à l’agriculture africaine de lui donner la place qui lui revient dans les dialogues internationaux. Cette prise de conscience a été le précurseur d’un changement dans les conditions de vie des 240 millions d’Africains qui souffrent de sous-alimentation et des 80 % de la population qui tirent ses revenus des activités agricoles.
La consommation de céréales est de plus en plus importante en Afrique, dans un contexte de croissance démographique élevée. Cette ressource constitue une base alimentaire et fait partie du quotidien d’un grand nombre de personnes : 80 % de la population active malienne travaille dans le secteur de l’agriculture. Consommées sous forme de grains, de farine, de couscous, les céréales constituent l’alimentation de base pour de nombreuses personnes. L’amidon qu’elles contiennent est une très bonne source énergétique. Le continent aurait donc besoin de tripler ces rendements pour s’assurer une sécurité alimentaire.