Ce livre publié l’an dernier à L’Harmattan sort de l’oubli un pan de l’histoire coloniale du Congo-Brazzaville concernant la période de 1907 à 1915. Mais les précieux renseignements qu’apportent le Prof. Assori Itoua-Ngaporo vont aussi au-delà.
Soixante ans après l’indépendance de la République du Congo, les résistants à l’oppression coloniale, qu’on peut également compter parmi les « pères de l’indépendance », ne sont pas assez valorisés, à leur juste mesure. En dehors de Mabiala-Ma-Nganga, Boueta-Mbongo et André Grenard Matsoua, qui sont connus à cause de certains édifices publics éponymes, plusieurs d’entre ces artisans de l’indépendance restent inconnus surtout de la part des jeunes congolais de la génération 2000. Les raisons sont multiples, notamment on peut relever le fait que leur mémoire n’est pas divulgué à travers les médias et les programmes d’enseignements de l’école primaire jusqu’à l’université.
Contre ce délit de mémoire, le professeur Assori Itoua-Ngaporo a voulu faire œuvre utile en creusant sur la vie de quelques figures de proue de la résistance coloniale dans la partie septentrionale du Congo, de façon critique et objectif, non moins avec passion par patriotisme. Il s’agit notamment de quatre patriotes martyrs de la colonisation, Ngue-Mbon, Ngaa-Lien, Nga-Atsèsè et Obambè Mbunzè, qui menèrent la résistance dans le bassin de l’Alima-Nkéni aux pays mbochi, moye et ngangulu entre 1907 et 1915.
Les causes de ces batailles de résistance ont été pour la plupart les mêmes dans le territoire national comme le démontre l’auteur, avec des preuves historiques : L’occupation violente ou par ruse des territoires en bouleversant les systèmes sociaux et les mœurs, les corvées et l’impôt de capitation imposés aux indigènes, les déportations, et d’autres abus causés par des firmes concessionnaires. Le plus lourd tribut est celui généré quelques années plus tard par des travaux forcés liés à la construction du chemin de fer Congo-Océan, la récolte du caoutchouc et l’enrôlement forcé des valides pour la libération de la France contre les forces nazies.
Voilà autant d’éléments historiques bien contextualisés dans ce livre qui au finish présente une revue générale des personnages principaux du pays, femmes et hommes, et des événements ayant concouru au fil de nombreuses décennies de lutte contre l’oppression coloniale jusqu’à l’indépendance. L’un des événements déclencheurs de la résistance coloniale au Congo, sur lequel l’auteur met l’accent, est la bataille de Mbaya en 1911 sous le règne de « Nguaa-Nkaan, couronné Ngue-Mbon VI qui avait pour premier conseiller Anlour-Ngobian, couronné Ngaa-Lien IV » p.67.
Cet ouvrage qui est aussi d’une grande importance anthropologique est, comme l’affirme l’auteur, un vibrant hommage à ces résistants oubliés de l’histoire de la colonisation du Congo, un pan de l’histoire qui compose le berceau de la nation, une histoire à connaître et à divulguer.