Cameroun: l’opposition menace de boycotter les élections régionales

Mardi, Octobre 6, 2020 - 12:04

La convocation des élections régionales laisse augurer un nouveau bras de fer entre le pouvoir et l’opposition qui dénonce « l’inertie » autour de la mise en œuvre de la décentralisation et du statut spécial pour les régions anglophones, promesses phares issues du dialogue d’octobre dernier. Ces scrutins prévus par la Constitution depuis 1996 sans être tenus, sont désormais fixés au 6 décembre prochain.

A la date indiquée, il sera organisé un scrutin indirect au cours duquel des collèges électoraux choisiront 90 conseillers régionaux aux pouvoirs limités, dont 20 représentants de chefferies traditionnelles. Dans cette perspective, le Mouvement pour la renaissance du Cameroun (MRC) de Maurice Kamto et le Front social-démocrate que dirige Ni John Fru Ndi disent qu'ils boycotteraient l’élection. Ce qui n’est pas le cas du mouvement de l’opposant Cabral Libii, le Parti camerounais pour la réconciliation nationale.

Le dirigeant du MRC a, en ce qui le concerne, appelé récemment à des manifestations populaires « pour faire partir le président Paul Biya » qui a annoncé la tenue de nouvelles élections avant la réforme du Code électoral et la non résolution de la crise anglophone. Ce leader de l’opposition assure qu’en dépit de ses appels à manifester qui vont se poursuivre, il est toujours disposer à dialoguer avec l’actuel chef de l’Etat camerounais.

Estimant que sans mise en place effective des conseils régionaux, il est impossible d’appliquer la loi sur la décentralisation, les leaders de l’opposition dont ceux des groupes armés séparatistes appellent les populations anglophones à ne pas participer à ces élections qu’ils considèrent comme « illégitimes ».

Répondant à cette préoccupation, le gouvernement, par la voix de Paul Atanga Nji, ministre en charge de l'Administration territoriale, menace d’agir contre toute tentative de troubles à l'ordre public et de « réprimer toute insurrection » en vertu d’une loi antiterroriste. « Il nous est revenu que certains responsables de partis politiques en perte de vitesse ont lancé des mots d’ordre irresponsables en posant des préalables pour la tenue de l’élection des conseils régionaux, faute de quoi ils engageront des actions visant à déstabiliser les institutions républicaines et contre celui qui les incarne, son Excellence Paul Biya », relève-t-il.

Le gouvernement qualifie d’imposture les revendications de l’opposition

Jugeant les déclarations de l’opposition de prétextes fallacieux, le ministre prévient qu’elles exposent leurs auteurs à de graves représailles. « Refuser de participer aux élections et prétendre défendre les intérêts du peuple camerounais, sans mandat électif, est une imposture qui ne saurait prospérer au Cameroun. Nous y veillerons », martèle Paul Atanga Nji.

Pour montrer à l’opinion nationale et internationale que les choses avancent, le ministre de l’Administration territoriale, Paul Atanga Nji, souligne que la tenue de ces élections régionales - les premières au Cameroun - constitue « un pas de géant » et une réponse au désir exprimé par les Camerounais d’une plus forte « décentralisation ».

Les élections régionales vont se tenir, alors que le Cameroun est secoué depuis longtemps par une crise dans les régions anglophones, qui a des causes assez lointaines.

En effet, après la Première Guerre mondiale, cette ancienne colonie allemande, avait été partagée par la Société des nations (ancêtre de l’ONU), entre la France et le Royaume-Uni.

La partie française accéda à l’indépendance en 1960. Un an plus tard, celle sous tutelle britannique (le Nord majoritairement musulman) opta pour son rattachement au Nigeria, mais l’une de ses zones se rattacha au Cameroun francophone, pour former une République fédérale à partir du 1er octobre 1961. Douze ans plus tard, soit en 1972, un référendum mit fin au fédéralisme. C’est à partir des années 1990, sous la présidence de Paul Biya, que les revendications anglophones vont se multiplier en faveur d’un référendum d’indépendance.

 

Nestor N'Gampoula
Légendes et crédits photo : 
Maurice Kamto, le leader de l'opposition
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