La conférence animée par le Pr Krishna Amen Ndounia, maître-assistant CAMES de l’Université Marien-Ngouabi, a eu lieu le 7 novembre dans les jardins du Mémorial Pierre-Savorgnan-de- Brazza.
La thématique de l'exposé « Sagesse et sorcellerie : un héritage ancestral chez A’ngbœ-ngbœl » est une réflexion critique suscitée par l’exploration de quelques ouvrages publiés par certains chercheurs africains…, a souligné, d’entrée de jeu, le Pr Krishna Amen Ndounia.
Pour explorer ce thème, le conférencier s’est servi de quelques interrogations préalables d’orientation, à savoir : Qui sont A’ngbœ-ngbœl ? Quelle représentation ce peuple avait-il de l’être humain et du monde dans leur existence ancestrale ? Quel est le fondement ontologique ou métaphysique de la « sorcellerie » et de la « sagesse » chez A’ngbœ-ngbœl ? Or, si la sorcellerie est quelque chose de négatif, la sagesse l’est assurément de positif. Quelles possibilités la tradition A’ngbœ-ngbœl disposait-elle alors pour juguler le phénomène de sorcellerie et cultiver la sagesse ?
Partant de ces différentes interrogations, et en se servant de l’herméneutique et de l’historicisme comme méthodes d’étude, il a construit sa réflexion critique en trois moments essentiels : La structure de l’être humain selon la tradition A’ngbœ-ngbœl ; Sagesse et sorcellerie comme prédispositions et pratiques ancestrales ; Des mécanismes de lutte contre la sorcellerie et d’ouverture à la sagesse.
La sagesse et la sorcellerie d'après le Pr Krishna Amen Ndounia sont des prédispositions de sang, donc héréditaires.
Pour le conférencier, la tradition ngbœ-ngbœl préconise un certain nombre de mécanismes pour combattre la sorcellerie et cultiver la sagesse. Le plus fondamental de ces mécanismes est l’éducation. Celle-ci est fondée non seulement sur les contes mythiques et la conversion à la religion E’nk’ri en tant que célébration des mystères de Nk’ri, mais aussi sur la pratique de la justice traditionnelle sur le plan visible et les « pièges invisibles » comme Okwo-onh sur le plan invisible. Mais d’un point de vue moderne, la sorcellerie peut aussi être combattue par l’éducation intellectuelle ou scientifique, mais aussi par le développement socioéconomique, le développement de la technologie, l’amélioration des conditions de vie, bref le bien-être social.
Bien auparavant, la directrice générale du Mémorial Pierre-Savorgnan- de- Brazza, Belinda Ayessa, a, dans son mot introductif, félicité le Pr Krishna Amen Ndounia d’avoir abordé un sujet si complexe qui touche aux rationalités africaines sur ce qu’on nomme les phénomènes paranormaux. Comment repenser « sagesse » et « sorcellerie » à travers une alliance de mots qui soulagerait de la fibre redoutable de l’une et l’ombre redoutée de l’autre ? s’est-elle interrogée.
« Pour notre rencontre de ce matin, relier « sagesse et sorcellerie » ne relève pas simplement d’un fonctionnalisme de cette pratique. De manière générale, une telle approche vise à contextualiser le phénomène de sorcellerie sans forcément forger un nouveau paradigme. C’est dans cette perspective que ce phénomène est une forme de « sagesse », certes nocive, mais réelle dont certains peuvent se prévaloir de détenir », a déclaré Belinda Ayessa.
Ajoutant que la conférence du Pr Krishna Amen Ndounia est une opportunité d’élargir les vues sur le croyable, ou sur les croyances possibles qui dépendent forcément des situations historiques et sociales. « J’énonce là ce que l’homme du commun peut aisément esquisser puisque nous avons, nous-mêmes, d’innombrables récits entendus sur la sorcellerie. Chacune, chacun de nous sait combien l’imaginaire des peuples de nos contrées est habité par l’omniprésence de la croyance à la sorcellerie », a-t-elle laissé entendre.