Lire ou relire : « La République des renards » de Ernest Bompoma Ikele

Vendredi, Novembre 13, 2020 - 09:57

Publié aux éditions L’Harmattan Congo-Brazzaville, ce roman est une histoire imaginaire qui laisse transparaître des travers sociaux proches des réalités africaines actuelles.

Ndonga, l’unique bachelier de son village qui fait la fierté de sa famille, vit une mésaventure qui le détourne du chemin de l’université. Il est inculpé injustement de meurtre et atterrit en prison où il fait la rencontre d’un chef de rebelles du pays voisin. Aidé par ce dernier, il s’évade et devient plus tard membre du gouvernement quand son ancien ami de prison accède au pouvoir par un coup de force.

Devenu Yossa et nommé en effet ministre du pourcentage, Ndonga instaure un système qui consiste à prélever dix pour cent dans tous les chantiers de la République afin de renflouer les caisses de l’Etat. Cette pratique qui frise l’escroquerie s’étend à tous les niveaux de la société au point de paralyser le bon fonctionnement de l’administration, à cause de la concussion généralisée.

Quand il sera retiré du gouvernement, l’ex-ministre, honni et haï de tous pour ses mauvais services rendus à la République, est lui-même victime du système qu’il a créé, à la mort de son épouse. « Le jour de l’inhumation, monsieur Dix-pour-cent croisa les services de Dix pour cent qui exigèrent à leur (ancien) patron dix pour cent du cercueil, du nettoyage du corps, du maquillage du corps, du corbillard, de la fosse et autres petits besoins. Tellement qu’il y avait trop de dix pour cent qui atterrissaient dans tous les sens, Yossa fut excédé et fut obligé de réagir :

-Même pour un cadavre ! vous n’avez pas pitié de moi, dans mon état de veuf ! Vous m’extorquez beaucoup d’argent, alors que je dois vivre après » (page 139).

Le livre interpelle au sujet de plusieurs phénomènes sociétaux assez courants : les bavures policières, les conflits armés, l’aliénation des sectes, les clivages identitaires, les violences de tout genre et les injustices sociales…Une thématique qui, grosso modo, donne à ce roman une teinture réaliste et engagée.  

Ancien inspecteur d’Etat à la présidence de la République du Congo et ancien président du Forum des gens de lettres, l’écrivain Ernest Bompoma Ikele qui a rejoint les limbes en 2018, continue d’instruire la postérité à travers ses trois titres publiés à L’Harmattan. « Le chaos » (recueil de nouvelles en 2012), « Le compte à rebours » (roman en 2015) et « La République des renards » (roman en 2016).

Aubin Banzouzi
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