Théâtre : "Libres propos" à Louvoulou

Jeudi, Novembre 12, 2020 - 18:33

En off du Festival des Journées théâtrales en campagne,  « La Case du parti » à Louvoulou  s’est transformée, le temps d’un après-midi, en un espace culturel. Retour sur un samedi peu ordinaire au village. 

Le 7 novembre, le collectif 242 était invité en off  de la 13e édition des Journées théâtrales en campagne dans le village de Louvoulou. « Libre propos », la pièce jouée par ce collectif de comédiens ponténégrins,  avait remporté la veille un vif succès sur les planches de la salle Tchicaya U’Tamsi de l’Institut français de Pointe-Noire. Mais qu’en allait-il être au village, là où la définition de la culture est plus tournée vers la terre que vers le sixième art ? C’est à « La case du parti », un vaste nganda au cœur du village, que s’est donc jouée la pièce adaptée des chroniques de Binéka Danièle Lissouba, écrivain, journaliste,  scénariste et fille de l’ancien chef d’Etat congolais Pascal Lissouba. La cour du nganda se remplit peu à peu, femmes et hommes de tous âges confondus, les enfants sont aussi de la partie, attirés par l’agitation inhabituelle dans la case du parti. La salle est comble et la légère pluie qui s’abat sur Louvoulou ne peut perturber l’attente du village où il semble que la curiosité dépasse en vérité l’attrait pour une représentation théâtrale.  C’est l’heure. On coupe le ronronnement du groupe électrogène pour laisser un libre champ aux voix des comédiens.

Le metteur en scène français Jack Percher a joué finement le coup, les « Libres propos » du spectacle se jouent autour d’une simple table, elle même entourée des autres tables, au cœur de la foule. Clovy Mbemba, Marène Missengue, Pavely Manga, Miss Maya et Elvis Tchikaya, les cinq comédiens du collectif 242  s’en donnent à cœur joie pour dénoncer avec humour les travers de notre société. Tout y passe : la religion, l’argent, le sexe, la race blanche et celle des « hommes de couleurs », la malbouffe, les tabous, les vérités et autres contre vérités. Des propos d’une grande liberté, puisque tel est le thème de cette comédie, qui ne laissent pas le public insensible si l’on en croit les rires fusant ça et là dans l’assistance. Pas certain cependant que la langue de Molière soit saisie dans sa subtilité et c’est probablement à demi-mots que Louvoulou aura compris le sens véritable des propos. Qu’importe ! Le théâtre se veut ici un premier marche-pied pour un accès libre à la culture pour éveiller les consciences et les interroger. 

Dans la forêt du Mayombe, après une nuit au bivouac de Kimbakala, au large des carrières de granit de Louvoulou et dans un cadre à la végétation luxuriante jouxtant l’imposante cascade de Kimbakala, le collectif 242 aura repris sa route, celle qui mène à Loango pour une troisième représentation avant d’en finir avec sa mini-tournée à la Côte Mondaine et en off du festival au restaurant Le Vegas.

Rappelons que le Festival Journées théâtrales en campagne s’est déroulé du 8 au 9 novembre à Loango avec les compagnies Ku Konde, Bivelas, Yob Yob, Les Pétroliers, l’Atelier Ting Lia Yu notamment au programme. Le succès de cette treizième édition témoigne de l’importance de décentraliser la culture en dehors des grandes villes que compte le Congo Brazzaville pour que chacun puisse s’imprégner de l’art qui est la conscience du monde.

 

 

Philippe Edouard
Légendes et crédits photo : 
1-Le collectif de comédiens ponténégrins 2-Jack Percher
Notification: 
Non