La décision de Félix-Antoine Tshisekedi de nommer un informateur chargé d’identifier la nouvelle majorité, après le constat d’échec de la coalition FCC-Cach en deux années de gestion, continue à faire tache d’huile dans le microcosme politique congolais.
Les réactions fusent de partout et vont dans tous les sens. La classe politique est plus que jamais divisée autour de la question, les uns et les autres développant un juridisme répondant à leurs convictions. Nomination d’un informateur, renversement de l'actuelle majorité parlementaire et éventualité d’une dissolution du Parlement, des sujets qui font polémique à l‘heure actuelle.
Ce qui est sûr, c’est que les positions connues de la plupart d’acteurs politiques et sociaux n’ont pas véritablement changé. La plupart sont restés constants dans leur façon d’appréhender le pouvoir de Félix Tshisekedi. C’est notamment le cas de l’ex-Premier ministre Adolphe Muzito qui incarne l’aile pure et dure de Lamuka. Pour ce dernier qui n’accorde pas de crédit à la rupture de la coalition FCC-Cach, il est fort que l’on soit dans une possible continuité du deal entre Joseph Kabila et Félix Tshisekedi. « On nomme un informateur quand il n'y a pas de gouvernement en place, ou quand le gouvernement en place tombe. Et le gouvernement Ilunga tombera quand ce dernier démissionnera. Et s'il démissionne, c’est que Kabila est d'accord, et s'il est d'accord, c’est que le deal Kabila-Fathi continue », a-t-il déclaré au cours d’une intervention médiatique. Cet acteur majeur du présidium de Lamuka estime, par ailleurs, que Félix Tshisekedi n'a pas le pouvoir de révoquer le Premier ministre. A ceux qui pensent que le chef de l’Etat peut contraindre le Premier ministre à la démission en retirant simplement l’ordonnance le nommant, Adolphe Muzito est formel : « Seule la Cour constitutionnelle peut constater l'inconstitutionnalité de l'ordonnance nommant Ilunga Ilunkamba, et cette constatation doit être préalable à la nomination de l'informateur ».
D’autres acteurs politiques ont également abondé dans le même sens à l’instar de François Nzekuye, député national du Parti du peuple pour la reconstruction et la démocratie (PPRD). Ce dernier pense que l’initiative du chef de l’Etat de nommer un informateur chargé d’identifier une nouvelle coalition majoritaire au Parlement viole la Constitution et le règlement intérieur de l'Assemblée nationale. « C'est au début du mandat qu'il aurait dû nommer un informateur pour identifier la majorité. Il a fait confiance à la majorité FCC-Cach tenant compte de nombre important de députés que cette coalition avait et aujourd'hui il est tenu d'aller avec cette majorité jusqu'à la fin de son mandat. Toute autre initiative est une violation de la Constitution », a-t-il déclaré. Pour lui, la majorité existe, il n'y a aucun élément qui prouve le contraire. « Le fait qu'il y ait une pétition de deux cent cinquante députés ne signifie pas que la majorité n'existe pas », a-t-il ajouté.
Enfonçant le clou, Jean Kaanga se demande sur quelle base irréfutable le chef de l’Etat a pu jauger l’effritement de l'actuelle majorité qui, d’après lui, existe. Quant à une possible dissolution de l’Assemblée nationale telle qu’envisagée par Félix Tshisekedi au cas où l’information n’obtenait pas gain de cause dans sa quête d’identification de la majorité, le cadre du FCC pousse l’outrecuidance à l’extrême : « C'est de bonne guerre que le président de la République tente d'avoir une majorité qui lui soit plus acquise. Mais là où le bât blesse, c'est lorsqu'il menace de dissoudre l'Assemblée nationale, si son " informateur de fait" n'arrive pas à atteindre la mission lui assignée, qui n'est pas celle d'identifier la majorité, mais plutôt celle de construire une majorité quoiqu'il en coûte, au goût du président de la République », a-t-il fait savoir.
A tout prendre, le FCC qui ne digère pas la nomination d’un informateur est visiblement déterminé à engager un bras de fer avec le chef de l’Etat comme en témoigne l’entêtement du Premier ministre Sylvestre Ilunga à ne pas rendre le tablier. Mêmement à la chambre basse du Parlement où Jeanine Mabunda et son bureau continuent à faire de la résistance prétextant la non-conformité des pétitions initiées à leur encontre aux textes régissant le fonctionnement de leur institution.