Certains pays occidentaux ont démarré la vaccination anti-covid-19. Mais les besoins dépassent la capacité de production mondiale. L'Afrique est la grande absente.
Selon des estimations, 14 milliards de doses de vaccin seraient nécessaires pour mettre fin à la Covid-19. Les pays à revenu élevé et intermédiaire ont signé des accords avec les fabricants de vaccins pour une réserve de 6,8 milliards de dollars. A ce rythme, il faudrait attendre jusqu'à 2024 pour avoir un accès généralisé aux vaccins. Les plus marginalisés seraient les pays à faible revenu, dont les pays africains. Si le mécanisme Covax commence à accumuler des financements pour l'achat de vaccins anti-Covid-19, les doses disponibles à l'achat restent insuffisantes. A cela s'ajoutent des défis infrastructurels et logistiques.
L'accès à des vaccins de mauvaise qualité est pire que l'inexistence
Pour Peter Tosso, un scientifique, spécialiste des technologies de fabrication avancées à l'USP, une fabrication locale devrait assurer la qualité, protéger les patients et favoriser la confiance dans la sécurité des vaccins, rendre l'approvisionnement stable, éviter ou réduire l'entrée dans la chaîne d'approvisionnement des vaccins de qualité inférieure et/ou falsifiés.
L'absence d'une sécurité sanitaire va diminuer encore la confiance étriquée dans les vaccins et systèmes de santé en Afrique. Le renforcement des capacités à maîtriser le processus de fabrication jusqu'à la conservation des vaccins ne sont pas à négliger.
L'autre aspect, concerne la naissance d'une industrie pharmaceutique pour aider le continent à bénéficier d'une autosuffisance dans ses besoins croissants en vaccins, et à anticiper sur de futures crises d'accès aux vaccins lors des pandémies à venir.
La fabrication africaine des vaccins
La production pharmaceutique locale avance en Afrique, ouvrant la voie à une industrie naissante des vaccins (Nigéria, Éthiopie, Afrique du Sud, Égypte). Ces pays sont en train de devenir les principaux producteurs de médicaments prioritaires pour leurs pays et régions. Ces pays ont bénéficié du soutien de l'USP, de l'Usaid pour renforcer les systèmes d'assurance qualité des fabricants de produits pharmaceutiques dans les PRFI en vue d'atteindre les normes de qualité internationales. Ce qui a rendu certains de leurs produits plus compétitifs. L'Afrique francophone est en retard.
Il reste que 70 à 90% des produits pharmaceutiques utilisés en Afrique sont toujours importés. Si le renforcement de la production locale devient une priorité pour anticiper les pénuries des vaccins anti-covid-19, la production de vaccins a connu des échecs pour démarrer. Et la production locale de vaccins représente moins de 1% des vaccins utilisés sur le continent. Certains fabricants ont d'ailleurs arrêté la production, en raison de leur incapacité à concurrencer les vaccins importés.
Des obstacles à la fabrication régionale du vaccin anti-covid-19
En 2017, l'Afrique comptait 8 fabricants de vaccins, dont deux exécutaient tous les aspects du processus de la fabrication à la production d'ingrédients actifs à l'emballage. Le marché des vaccins est fragmenté, le coût élevé et la complexité de la fabrication, et l'absence de volonté politique d'investir. Mais ces obstacles sont aussi surmontables, grâce à des mécanismes d'approvisionnement groupé, des investissements en capital et le mandat politique. En s'appuyant sur la capacité actuelle de production de vaccins, des pays comme le Sénégal, l'Égypte, la Tunisie, l'Éthiopie et l'Afrique du Sud, peuvent offrir une opportunité d'intégration progressive de la capacité de production de vaccins.
La question des transferts de technologie
Selon Peter Tesso, les récents transferts de technologie par les principaux développeurs de vaccins constituent un tremplin pour faire face aux menaces actuelles et futures. Un premier accord a déjà été conclu avec Aspen Pharmacare en Afrique du Sud, pour développer les dernières étapes de la fabrication avec un développeur majeur de vaccins Covid-19. De plus, les Centres africains de contrôle des maladies travaillent avec huit entreprises en Afrique. Ces sociétés pourraient servir de sites pour la production future de vaccins à travers l'Afrique.
Les conditions de réussite de sites de fabrication de vaccins
Au-delà de la complexité du processus de fabrication des vaccins, lui-même, Peter Tesso plaide pour des installations et l'expertise scientifique, et une assurance d'un retour sur investissement, tout en rivalisant avec d'autres fabricants (Inde, Chine, Indonésie, Pakistan). Des efforts visant à mettre en commun l'expertise et à rationaliser la surveillance réglementaire des vaccins sur le continent progressent dans le cadre du Forum africain sur la réglementation des vaccins.