Présidentielle 2021 : L’UE prône un scrutin inclusif et apaisé

Jeudi, Février 4, 2021 - 18:00

A l’orée de l’élection présidentielle fixée au 21 mars prochain au Congo, l’ambassadeur chef de la délégation de l’Union européenne (UE) au Congo, Raul Mateus Paula, a rappelé au cours d’un entretien aux Dépêches de Brazzaville l’entière souveraineté du Congo sur la gestion de son processus électoral. Il a, par ailleurs, formulé le voeu que ce scrutin soit inclusif, apaisé et se déroule dans la paix avec une grande adhésion de la population. 

Les Dépêches de Brazzaville (LDB) : Comment l’’Union européenne entend-elle accompagner le Congo dans la mise en œuvre du processus électoral en vue de la présidentielle de mars prochain ?

Raul Mateus Paula (R.M.P) : Nous tenons à rappeler la souveraineté du Congo sur cette question ainsi que son entière responsabilité dans la gestion de ce processus qui concerne les Congolais en premier lieu. De façon générale, l’UE peut décider d’envoyer des observateurs suivre une élection, à condition qu’une requête ait été envoyée par le pays organisateur des élections et ce, bien avant la tenue du scrutin. Or à ce jour, aucune demande en ce sens ne nous ait parvenue de la part du Congo.

En revanche, nous avons souhaité contribuer à cette élection, en organisant, à l’endroit des médias, un séminaire d’information, de réflexion et de formation en coopération avec le Conseil Supérieur de la Liberté de Communication. Les médias ont un rôle très important à jouer lors de cette élection : nous espérons que ce séminaire sur le processus électoral contribuera à l’objectif partagé d’une élection apaisée, libre, équitable, transparente et crédible tant sur les aspects de sensibilisation des électeurs que sur ceux liés à la couverture médiatique et au respect de l’équité pour tous les candidats, conformément aux normes et principes déontologiques de leur métier. 

Je me réjouis en tous cas, de la qualité des échanges et des discussions qui se sont déroulés tout au long de ce séminaire.

LDB : Quelles sont vos attentes au terme de cette élection ? 

RPM : Nous formulons le voeu qu’elle soit démocratique et donc inclusive, transparente, apaisée, crédible, qu’elle rencontre l’adhésion des populations et surtout, qu’elle se déroule dans la paix. Les processus électoraux peuvent en effet être des sources de tensions et de violences qu’il convient de prévenir.

Au-delà du processus électoral en soi, il est en tout état de cause fondamental que le président qui sera élu mette en place un gouvernement qui s’attèle à de profondes réformes pour assurer la transition du Congo vers une économie verte. En effet, il est important de réduire la trop grande dépendance de l’économie vis-à-vis du pétrole en mobilisant tous les atouts et énergies dont dispose le pays pour émerger et créer la prospérité. Cela est d’autant plus urgent que le Congo fait face à une dette extérieure, intérieure et à l’égard des traders de pétrole substantielle, qui limite les marges budgétaires pour conduire des politiques ambitieuses.

Les réformes à conduire sont de nature à améliorer la transparence des finances publiques pour engranger de nouvelles recettes budgétaires et améliorer la gouvernance publique, la transparence et la lutte contre la corruption.

Bien entendu, ces réformes permettront de poursuivre les efforts en cours en matière de gouvernance et de renforcement des institutions démocratiques.

LDB : Cette élection s’organise dans un contexte marqué par le Covid-19 et l’accès aux vaccinations suscite d’inquiétude pour les pays en développement. Quelles sont les dispositions prises par l’UE pour rendre le vaccin disponible au sein des pays pauvres ?

RMP : La crise sanitaire causée par la pandémie de coronavirus a effectivement des impacts négatifs, tant sur le plan économique, social et même sur la mobilité des personnes pour tous les pays du monde.  Il convient cependant de souligner, pour s’en réjouir, que des vaccins contre la Covid-19 ont été élaborés dans un temps record. Cependant, dans la stratégie de vaccination des différents pays, il serait totalement illusoire d’avoir des approches purement nationales au détriment d’une approche globale qui s’avère indispensable pour protéger l’humanité. C’est dans cet esprit que les dirigeants de l’Union européenne ont soutenu dès le début le dispositif multilatéral Covax, avec une contribution de 850 millions d’euros auxquels se sont ajoutées des contributions substantielles de ses Etats Membres, pour permettre aux PMA et pays à revenus intermédiaires comme le Congo de bénéficier d’un accès rapide au vaccin.

A cet égard, il y a lieu de se réjouir que le Congo dispose d’ores et déjà d’une stratégie pour vacciner 60% de sa population et qui s’inscrit pleinement dans le cadre du mécanisme Covax.

Par ailleurs, face aux difficultés des laboratoires de produire massivement les vaccins et d’organiser la logistique et la distribution sur le plan mondial, des tensions bien compréhensibles ont été observées récemment. C’est dans ce contexte que l’Union européenne vient de décider d’un contrôle des exportations des vaccins jusqu’à fin mars, en excluant de ce contrôle les PMA et pays à revenus intermédiaires ainsi que les acteurs humanitaires pour leur faciliter un accès plus rapide aux vaccins tant nécessaires.

LDB : Dans le cadre du partenariat UE-Afrique, quels sont les projets inscrits en priorité dans l’agenda du Congo à court et moyen terme ?

RMP : Au Congo, plusieurs projets engagés dans le cadre de notre partenariat suivent leur cours normal. Il s’agit, entre autres, des projets d’appui au commerce et au secteur privé (PRCCE II), du soutien au climat des affaires, à la diversification de l’économie, aux chaînes de valeur agricoles, à la construction du port de pêche artisanal à Pointe-Noire et à la gouvernance des ressources halieutiques, ainsi que dans le cadre du développement durable, à l’émergence de villes résilientes (Nkayi et Owando) ; sans oublier la gouvernance forestière (APV-FLEGT) et la lutte contre le changement climatique.

Tous ces projets ont bien progressé et font l’objet d’une mise en œuvre progressive. Par ailleurs, l’Union européenne prépare en concertation avec les pays ACP, un nouveau programme pluriannuel (2021-2027). S’agissant du Congo, des consultations ont déjà eu lieu et se poursuivront avec le gouvernement et les institutions dont le Parlement, la société civile et le secteur privé.

En lien avec les priorités définies dans le PND, les grands axes qui dessinent et s’inscrivent par ailleurs dans la continuité de la précédente programmation concernent :

  1. La gouvernance économique et la transition vers une économie verte et diversifiée avec un appui renforcé au secteur privé, l’amélioration du climat des affaires, l’accès au financement des PME et la promotion du commerce ;
  2. La gestion durable des ressources naturelles, la préservation de l’environnement, la lutte contre le changement climatique, la promotion des énergies renouvelables et de villes plus résilientes ;
  3. La promotion de la démocratie et de la gouvernance participative pour contribuer au renforcement des capacités de la société civile à participer activement au développement socio-économique et à la protection des droits de populations vulnérables.

Enfin, pour répondre à ces défis majeurs, qui exigent de plus en plus une action collective, rapide et décisive au niveau multilatéral, l’UE a renforcé sa synergie avec ses Etats membres en inscrivant sa coopération dans le cadre de « l’Equipe Europe ». Cette approche qui consiste à rassembler les expertises et à combiner les ressources de l'UE, de ses États membres et des Partenaires techniques et financiers (PTF) permet d’apporter une réponse européenne plus solide. 

En République du Congo, de concert avec la France, l’Allemagne, l’Italie, la Belgique, mais également les Etats membres basés à Kinshasa avec mandat au Congo, des actions ont déjà pu être menées, notamment en réponse à la lutte contre la pandémie. Ces actions ont permis  d’appuyer les efforts du gouvernement tout en réaffirmant le rôle de l’Union européenne en tant qu’acteur mondial de premier plan.

Propos recueillis par Guy-Gervais et Gloria Imelda Losselé
Légendes et crédits photo : 
Raul Mateus Paula, Ambassadeur, chef de la délégation de l'UE au Congo/ Adiac
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