Voir ou revoir : « Difret » de Zeresenay Berhane Mehari

Vendredi, Février 19, 2021 - 11:37

Le 21 février prochain, l’humanité célébrera la journée internationale des langues maternelles. Identité culturelle et patrimoine inestimable, certaines langues se retrouvent malheureusement en voie d’extinction.  Et pour tenter de sauver la mise, le cinéma contribue, à sa manière, en proposant aux populations différentes œuvres. « Difret » en est une belle illustration.

Occupant la deuxième place après l’arabe en Ethiopie, l’amharique est la langue utilisée pour ce long-métrage drame de Zeresenay Berhane Mehari, sorti en 2014. Il est parlé en Ethiopie par une majorité de la population, soit comme langue maternelle, majoritairement par les Amharas, soit comme langue véhiculaire. Grâce à l’usage de cette langue maternelle, le long-métrage avait été nominé, en 2015, à la 87e cérémonie des Oscars dans la catégorie du meilleur film en langue étrangère.

D’une durée d’environ 1h 39 min, « Difret » relate une histoire vraie, ayant défrayé la chronique en Ethiopie au milieu des années 90 et permis de faire évoluer les mentalités sur la cause des femmes face à la « telefa ». Il s’agit en réalité d’un enlèvement prénuptial et brutal de jeunes filles à peine pubères, faisant partie de la tradition rurale qui perdurait depuis des siècles.

Dans le film, c’est Hirut qui endure cette tragédie. Adolescente de 14 ans, résidant dans un village rural aux mœurs ancestrales, elle fait les frais d’un kidnapping alors qu'elle rentre de l’école. Séquestrée, battue et violée, la jeune fille parvient à s'échapper, mais alors qu’elle est rattrapée par ses ravisseurs, elle tue accidentellement l’un d’eux. Accusée de meurtre, la loi locale veut qu’Hirut subisse le même sort que sa victime. L’avocate Meaza, pionnière du droit des femmes en Ethiopie, prend alors sa défense et enclenche une bataille tenace qui bousculera l’une des plus anciennes traditions du pays.

D’une part, valorisant la langue maternelle et d’autre part, traitant d’un sujet sensible sur la protection de la femme face à certaines traditions rigides, « Difret » renferme une bonne dose de sensibilité. La prise d’image, le jeu d’acteur et la dureté de certaines scènes, la bande sonore mélancolique, le paysage naturel mis en exergue, insufflent au film beaucoup de réalisme. Publié récemment en intégralité sur YouTube, « Difret » récolte plus de 2,5 millions de vues.

Notons qu’avec l’évolution des sociétés, la reconnaissance et le respect pour la diversité culturelle dans le domaine du langage inspirent une solidarité basée sur la compréhension, la tolérance et le dialogue des différences. Aussi, toute action favorisant l’utilisation des langues maternelles sert non seulement à soutenir la diversité linguistique et l’éducation multilingue mais sensibilise davantage à la multiplicité des traditions linguistiques et culturelles dans le monde.

Merveille Jessica Atipo
Légendes et crédits photo : 
L’affiche du film/DR
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