Disparition : la Côte d’Ivoire perd un pilier de la politique, Hamed Bakayoko

Jeudi, Mars 11, 2021 - 11:34

Le Premier ministre ivoirien, Hamed Bakayoko, s’est éteint à l’âge de 56 ans, le 10 mars à Berlin en Allemagne, des suites d’un cancer.

Evacué de Côte d’Ivoire pour des raisons médicales le 18 février après une aggravation de son état de santé, Hamed Bakayoko avait été transféré dans un hôpital de Fribourg le 6 mars dernier pour y subir un traitement expérimental de la dernière chance. Il a succombé le mercredi à un cancer foudroyant.

Lors de son voyage à Paris la semaine dernière, Alassane Ouattara avait rendu visite à Hamed Bakayoko. Samedi il avait indiqué que l’hospitalisation du Premier ministre devait être prolongée.

L’annonce de son décès a été donné mercredi soir par la présidence ivoirienne dans un communiqué lu à la télévision nationale. « C’était un grand homme d’État, un modèle pour notre jeunesse, une personnalité d’une grande générosité et d’une loyauté exemplaire », a déclaré Alassane Ouattara.

Pilier de la politique ivoirienne, du RDR puis du RHDP, celui que l’on surnommait « Hambak » jouissait depuis longtemps d’une forte popularité. « Hamed », comme les Ivoiriens l’appellent souvent, n’était pas un grand orateur mais il avait les qualités d’un tribun, la voix, la stature, le charisme. Il parlait à tout le monde, même lorsque la Côte d’Ivoire était divisée en deux camps irréconciliables, rendait des services, cultivait ses réseaux dans tous les milieux, politique, artistique, sécuritaire, diplomatique.

Une popularité que sa famille politique a utilisée comme un atout. Mais elle inquiétait aussi parfois jusque dans son propre camp. Parce que l'histoire d'Hamed Bakayoko est celle d'une ascension balzacienne, favorisée notamment par la confiance de Dominique Ouattara, l'épouse du président, puis du couple présidentiel. L’histoire d’un garçon qui, le bac pour seul diplôme, sera successivement leader étudiant, journaliste, patron de radio, député, maire d’Abobo, ministre de l’Intérieur, de la Défense, puis Premier ministre à la suite du décès brutal de son prédécesseur Amadou Gon Coulibaly en juillet 2020. Hamed Bakayoko venait d’être élu samedi - malgré son absence -, député de Séguéla.

Certains lui attribuaient des velléités présidentielles, notamment après la mort de son prédécesseur Amadou Gon Coulibaly en juillet 2020. C’est de toute façon Alassane Ouattara qui a alors remplacé son dauphin. Hamed Bakayoko venait d'être réélu député, malgré son absence, à Séguéla.

La dernière apparition publique d’Hamed Bakayoko remonte au 10 février. Ce jour-là, le Premier ministre présente les candidats RHDP aux législatives. Dans les jours qui suivent, son absence commence à interroger. Le 18 février, le Premier ministre s’envole pour Paris, officiellement pour y subir des examens médicaux. Très rapidement des informations sur l’aggravation de son état de santé occupent toutes les conversations à Abidjan.

« Une grande perte » dans la sphère politique

« La Côte d’Ivoire perd un de ses valeureux fils, un grand serviteur de l’Etat », a réagi le directeur exécutif du RHDP, Adama Bictogo, qui estime que le parti perd « un de ses piliers ». Il salue la mémoire d'un compagnon de route et d'« un des fidèles parmi les fidèles » d'Alassane Ouattara. « Nous nous sommes rencontrés avec le président Ouattara le 14 février 1994, il y a 27 ans et depuis nous sommes restés tous ensemble, se souvient Adama Bictogo. Pour le président Ouattara, c’est très dur. C’est la perte d’un deuxième fils. »

Dans l'opposition, on déplore « une grande perte ». Malgré des choix politiques différents, « Hamed Bakayoko n’était pas un ennemi, bien au contraire, mais un ami », témoigne Franck Anderson Kouassi, secrétaire national du FPI, qui retient de lui « beaucoup de souvenirs ». « Avant qu’il accède aux responsabilités, nous avons eu nos années d’étudiants, nos années de journalistes. Nous nous chahutions beaucoup. Politiquement nous n’avions pas la même vision, mais nous n’étions pas des ennemis, bien au contraire. »

Le PDCI aussi rend hommage au Premier ministre, un homme « dynamique et ouvert » pour le vice-président du parti, Alphonse Djedjé Mady. « Nous sommes très attristés qu’Hamed Bakayoko, un jeune homme très dynamique soit parti de cette façon-là. Il faisait partie de nos jeunes cadres dynamiques, enthousiastes, sympathiques qui est en contact avec pratiquement toutes les couches sociales du pays. Il s’était fait remarquer par son dynamisme, sa disponibilité, son ouverture d’esprit. » Le responsable du PDCI pointe par ailleurs que « la perte en moins d'un an de deux Premiers ministres est une calamité dont la Côte d’Ivoire n’avait pas besoin ».

Josiane Mambou Loukoula
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