Vient de paraître : « Hosties du désert » de Gaëtan Ngoua

Vendredi, Mars 26, 2021 - 12:41

L’Afrique actuelle est sujet d’une peinture lugubre à travers ce recueil de quarante et une pages publié par les éditions+. Recueil préfacé par Guy Armand Mampassi Nkosso, docteur en littératures francophones.  

L’écrivain est quelquefois l’historien de son temps. Dans ce recueil poétique écrit en vers libres, Gaëtan Ngoua s’insurge contre les phénomènes homicides qui endeuillent le continent noir, particulièrement dans la zone du Sahel marquée par une grande insécurité. Le poète s’insurge sur cette réalité critique pour attirer l’attention des Africains afin de mettre fin aux exactions terroristes et aux pratiques esclavagistes de Ténéré à Gao, et aux alentours.

Le sahel est devenu un véritable cimetière de jeunes immigrés qui tentent de s’arracher de la misère et de la violence régnant en Afrique par des voies d’infortune. Si ce n’est pas le sable, c’est la mer qui avale au quotidien le sang des fugitifs et des innocents tandis que les causes de cette catastrophe humanitaire perdurent sans une mobilisation continentale et internationale conséquente pour y remédier.

« Suivez mon regard vous apercevrez une mer, / Elle se nomme méditerranée / Au fond de sa natte se repose mon sang, arraché du haut de sa fleur d’âge par le dictat de la misère planté sur les perrons des radeaux où gronde et gronde la haine », écrit le poète à la page 23. Ou plus loin à la page 27 : « J’endure mes eucharisties et romps la chair de mes agneaux pour des cènes pascales au carillon de la méditerranée. / (…) / Moi qui depuis fort longtemps marche époumoné par les cliquetis d’armes. »

Gaëtan Ngoua invite donc à la tolérance et au vivre-ensemble entre peuples du Sahel et d’Afrique pour construire un présent radieux, dans une société où chacun se sentira épanoui, et le pouvoir cessera d’être une pomme de discorde.

« Invitons les berbères à la fête, qu’est-ce ça coûte un clin d’œil ? Laissons aussi venir les Touaregs, que vaut une embrassade ? Appelons les mandingues à la danse, quoi de plus beau qu’un baiser sur la joue d’un semblable ? Qui a dit que les Mossi sont de maigres chanteurs ? / Le trône est la chaise commune à un peuple, sa fesse n’est pas un bien privé au service d’un seul son de cloche. / Rendons-leur leurs kalachnikovs, sombres outils aux langues funestes, / Ce ne sont pas les dabas de notre fonderie / Et reprenons dans nos mains nos coras et nos sanzas, perles qui inhibent la danse et le plaisir. Sons qui dégraissent les hanches…» (page 35). 

Et pourquoi tous ces malheurs et martyrs au cœur de l’Afrique, sinon la convoitise des richesses dont regorge son sous-sol. « Afrique de Kimbangu, Shaka Zulu, Nkrumah, Lumumba, Sankara, Mandela, Afrique terre du mbongui et du baobab, inapte aux compromissions, me voici je frappe à la porte de ta belle-grâce, offre-moi le cœur de Salomon / (…) Pour ton pétrole, ton or, ton uranium, ton manganèse, ton mercure et biens d’autres merveilles qui font déjà le bonheur d’autres horizons, tu t’es fait gribouiller l’âme. Ô Afrique « tête calaminée » du monde ».

Avec Gabriel Mwènè Okoundji et Huppert Malanda, Gaëtan Ngoua est l’une des grandes révélations de la poésie congolaise du XXIe siècle.  Il est auteur de neuf recueils de poèmes et récipiendaire de plusieurs prix nationaux et internationaux.

Aubin Banzouzi
Légendes et crédits photo : 
Photo: couverture de l'ouvrage
Notification: 
Non