Pour réussir sa relance économique post-covid-19, le continent africain aura besoin d’une plus grande coopération entre régulateurs, autorités politiques et opérateurs.
La crise du coronavirus a ralenti l’activité économique de l’Afrique. Au niveau de la production, le continent africain a perdu au moins 115 milliards de dollars en 2020, selon la Banque mondiale (BM). Ce qui serait en partie lié à la baisse des investissements et de la consommation domestique entraînée par les mesures de confinement visant à ralentir la propagation du virus. Une situation pourrait faire basculer 40 millions de personnes supplémentaires dans une extrême pauvreté, venant réduire à néant cinq années de progrès en la matière. Si l’Afrique a été moins frappée directement par la crise sanitaire, elle l’aurait été par des difficultés économiques qu’elle a entraînées, selon l’analyse de Joshua Oigara, PDG de la banque kényane KCB Group. Citant, le cas particulier du Kenya, celui-ci a effectué plus d’un milliard de dollars de restructuration de dettes. Son industrie dans son ensemble, a déjà restructuré près de 45% de ses dettes en souffrance et probablement 25% supplémentaires d’ici 2022.
« Sur l’ensemble de ses dettes, je pense que nous avons une chance d’en récupérer entre 50 et 75% », a indiqué Joshua Oigara. Afin de surmonter la crise et de répondre aux besoins de financement des économies africaines, la coopération entre régulateurs, autorités politiques et opérateurs est essentielle. Pour le directeur des réseaux, région Afrique à la Société générale, Laurent Goutard, un accompagnement d’un apport de liquidités est nécessaire pour assurer la réussite des entreprises. Il a expliqué certaines mesures incitatives supplémentaires prises pour accroître les liquidités des banques locales et ainsi leur donner l’opportunité de financer davantage des PME, grâce à 40 millions d’euros débloqués par les banques d’investissement européennes et 50 millions de dollars de l’IFC. Ce qui a permis d’augmenter les capacités d’accès au crédit pour les PME au Cameroun, au Congo et au Tchad et au Ghana.
Certaines banques centrales africaines ont leur flexibilité monétaire pour baisser les taux d’intérêt jusqu’à 300 points de base, et d’autres encore de manière plus progressive. « Notre rôle à long terme est d’aider le secteur financier et, par ricochet, l’économie dans son ensemble, y compris les PME et les autres acteurs sur le terrain, afin de permettre une reprise résiliente et durable ».
Un objectif de long terme impliquant « des efforts de financement supplémentaire et des conseils continus auprès des bénéficiaires financiers », a déclaré Myriam Brigui, responsable du département du réseau international de Proparco. Il est aussi question du rôle stratégique à jouer par les banques commerciales dans la réussite de la relance économique en Afrique, à travers un ajustement des politiques de crédit pour un meilleur contrôle des coûts et bénéfices. Ce qui permettrait aux acteurs du mobile money de se diversifier en proposant davantage de microcrédits pour soutenir le secteur informel. Une autre façon de stimuler la demande est d’encourager les échanges avec la diaspora africaine, en plus des partenariats avec les institutions financières internationales pour promouvoir l’acquisition d’actifs en difficulté.
Et la place de la Zlecaf ?
L’Afrique ne dispose pas de la marge de manœuvre monétaire ou fiscale nécessaire pour mettre en place de vastes programmes de relance économique. Inciter à une ouverture plus importante de ses marchés, ce qui pourrait réussir à déclencher la reprise post-Covid sur le continent. Le Sg du secrétariat général de la Zone de libre-échange continentale africaine (AfCFTA), Wamkele Mene, conseille aux entreprises africaines – dès que les frontières sont ouverts, « de regarder au-delà de leur région et de leur pays afin de se développer sur de nouveaux marchés ». En 2019, avant le début de la pandémie, sur les dix économies dont la croissance était la plus forte au monde, six se trouvaient en Afrique. À l’époque, la croissance moyenne du continent était d’environ 3,5 à 3,6 % par an. Connecter plus d’un milliard de personnes et élargir les opportunités de marché en Afrique, « nous permettra d’établir un lien de confiance entre acheteurs et vendeurs et ce, à travers de nombreuses régions. Cette architecture permettra à l’Afrique d’accélérer son développement et d’aller de l’avant », a conclu Wamkele Mene.