Voir ou revoir : « La rue n’est pas ma mère » de Jérôme Nabonsewend Yameogo

Vendredi, Juin 11, 2021 - 13:45

Court-métrage burkinabé de 27 mn sorti en 2018, « La rue n’est pas ma mère » est une sonnette d’alerte contre la maltraitance des enfants qui poussent certains d’entre eux à se réfugier dans la rue.

S’il est une évidence, c’est que la rue n’a jamais donné naissance à un être humain. On s’y retrouve le plus souvent au gré des circonstances, tant volontaires qu’involontaires. Et c’est le cas pour le jeune Alidou, acteur principal du film. Il n’a que 6 ans, et comme le veut obligatoirement son père, il doit rejoindre une école coranique pour apprendre les bonnes mœurs. Une fois sur les lieux, Alidou et les autres enfants subissent toutes formes de maltraitances de la part de leur maître. Epuisé, Alidou s’échappe du centre pour aller se réfugier dans la rue. Ce, à l’insu de ses parents, pendant plusieurs mois.

« La rue n’est pas ma mère » dresse un portrait tragique sur la responsabilité des parents face à l’éducation de leurs enfants. En effet, il est bien d’orienter sa progéniture, tout en veillant à son bien-être. Ce qui n’a pas été le cas dans ce court-métrage, car pendant un an, Alidou errait dans la rue, se livrant aux liqueurs fortes, au vol ainsi qu’à toutes sortes de calamités que pouvait lui desservir la rue. Quelques scènes présentent de façon crue la manière dont sont traités ces enfants de la rue et c’est triste à voir.

Comme le précise d’ailleurs Alidou sur son lit d’hôpital, « la rue n’est pas ma mère. J’ai une mère et elle s’appelle Aminata ». On ressent du chagrin, de la culpabilité et un soupçon d’appel à l’aide que lancent ces adolescents. Nombreux souhaiteraient grandir dans une vraie famille, mais ne le peuvent pas. D’autres encore donnent l’impression de se plaire dans cette vie, mais en réalité ils ne traduisent que leur profonde colère et leur frustration face aux aléas du destin.

S’il est une chose à faire, comme l’estime le réalisateur, c’est de s’approcher de ces enfants, de les entretenir pour bien les comprendre et pouvoir leur apporter l’aide nécessaire. En mettant en exergue une ONG dans ce court-métrage, c’est une manière d’inciter davantage les associations ou les personnes de bonne volonté à lutter contre ce fait dont aucun pays n’est épargné. Car il est vrai, l’apport de l’Etat ne suffit pas. Il faut donc plus de parties prenantes pour tenter d’arriver à bout de cette problématique.

On déplore cependant l’amateurisme de quelques enfants dans l’interprétation de leur rôle. Le brin d’émotion on le doit remarquablement à Aminata, la maman d’Alidou. L’annonce de la conversion d’Alidou en garçon de rue ainsi que son hospitalisation ont laissé paraître le désespoir d’une mère qui depuis le début ne voulait pas que son fils soit arraché de son affection.

D’ailleurs, cette réalité interpelle sur la position patriarcale dans nos sociétés qui a longtemps été considérée comme la meilleure option. C’est le père qui décide, il a le dernier mot, et c’est tout. Une vision un peu erronée qui mériterait d’être perçue sous plusieurs angles. En effet, privilégier le dialogue n’est peut-être pas si mal que ça dans plus d’un cas ! 

Merveille Jessica Atipo
Légendes et crédits photo : 
L’affiche du film/DR
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