Centrafrique : les mercenaires russes accusés d’atrocités sur des civils

Mercredi, Juin 16, 2021 - 14:15

Un rapport alarmant, publié le 14 juin par CNN et l’ONG The Sentry, dénonce les atrocités commises en Centrafrique par les mercenaires russes pour contrôler les mines d’or et de diamant.

Le rapport fait ainsi état « de massacres, d’exécutions extrajudiciaires, de cas de torture, de pillage, d’enlèvements pour rançon, d’incendies de villages et de viols collectifs » perpétrés par le groupe Wagner, une société militaire russe ayant des liens avec le Kremlin, en alliance avec des forces armées loyales favorables au président centrafricain, Faustin-Archange Touadéra.

Les enquêtes menées par CNN et The Sentry leur ont permis de rassembler des preuves et témoignages sur plusieurs cas de violations de droits humains, dont sont victimes les civils centrafricains qui se trouvent au milieu de la lutte entre les forces armées nationales soutenues par les mercenaires russes et les rebelles connus sous le nom de Seleka.

CNN et The Sentry ont cité un rapport compilé par la force de maintien de la paix de l’ONU en Centrafrique (Minusca) qui corrobore les accusations. Ce rapport indique que « les Faca et les forces bilatérales, en particulier les Russes et des éléments supposés être syriens, pourraient avoir commis des crimes de guerre, notamment en exécutant des civils et d’autres individus qui ne participaient pas aux hostilités ».

Plus de 2000 formateurs russes

Ce nouveau rapport dénonce une croissance de la présence de militaires russes en Centrafrique. La plupart des mercenaires sont présentés comme des formateurs venus de la Russie pour entraîner l’armée locale. Seulement, apprend-on, si en 2017, le nombre de ces formateurs pour l’armée centrafricaine était au nombre de 170, en 2021, il s’élève à 2300.

Selon les auteurs du document, cette croissance sert des objectifs multiples, y compris le contrôle des zones riches en minérais. Près de Bambari, par exemple, il existe d'importants gisements d'or à Ndassima. En 2020, le gouvernement aurait révoqué la licence d’une société canadienne dans cette zone et l’aurait accordée à une autre dénommée Midas resources répertoriée comme une entité russe. Des témoins affirment aussi que ces mercenaires russes expulsent les habitants des zones minières.

« Tout ce qui est minier est leur priorité [...]. A Bambari, dans les quartiers de Bornou et d'Adji, ils pillent à la recherche d'or et de diamants », déclare un témoin.

Pour John Prendergast, cofondateur de Sentry, « Ce nouveau mode de pillage très lucratif constitue une menace grandissante, semant la mort et la dévastation, et mettant en danger la paix et la sécurité non seulement en République centrafricaine, mais également dans diverses autres zones sensibles de par le monde. Des mesures urgentes sont requises de la part de la communauté internationale ».

The Sentry et CNN ne sont en réalité pas les premiers à s’inquiéter de l’escalade de violences en Centrafrique. Dans un communiqué publié le 31 mars, l’ONU a émis des inquiétudes sur la présence de mercenaires russes en République centrafricaine. Trois organisations russes ont été pointées du doigt par l’institution dans son rapport. Il s’agit en l’occurrence de: Sewa security services; Lobaye invest SARLU et le fameux groupe Wagner, déjà connu pour être impliqué dans la guerre civile libyenne.

D’après les Nations unies, il est essentiel de clarifier les rôles de tous les partenaires internationaux de la RCA et de distinguer les actions des forces de la Minusca, de celles des organisations militaires privées. Dans leur rapport publié le 14 juin, CNN et The Sentry ont également fait un certain nombre de recommandations aux gouvernements et institutions financières internationales pour l’arrêt des atrocités en Centrafrique.

Face à l’urgence de la situation, l’heure ne devrait normalement plus être aux dénonciations, aux expressions d’inquiétude, ou aux recommandations, mais plutôt à une prise de conscience de la gravité des incidents en RCA. Il faut pour la communauté internationale agir pour mettre fin à ces cas de violations des droits humains, dont plusieurs pays africains riches en ressources minières font l’objet. Plusieurs ONG ont par le passé dénoncé comment des conflits sont entretenus sur des années en Afrique centrale (RDC, Rwanda, Ouganda, Burundi) avec pour but le pillage des ressources minières.

Josiane Mambou Loukoula et Ecofin
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