Sous la direction artistique du défunt contrebassiste Rigobert Mbila, le chœur Mgr Luc Gillon et bien d’autres des églises protestantes, catholiques et néo-apostoliques de Kinshasa, notamment Sacré-Cœur, Sainte-Anne, Saint-Luc, Sebyera et Notre-Dame-de-Grâce d’où est venue Dena Mwana ont bénéficié d’un appui qui a porté ses fruits.
Rigobert Mbila était avant tout enseignant à l’Institut national des arts (INA). C’est là qu’il a fait ses preuves comme professeur de musique. En créant Musique pour Tous, avec Michel Lutangamo et René Impwa, ils ont fait œuvre utile. Le trio avait à disposition ses connaissances musicales en dehors de la sphère de de l’INA, en travaillant notamment avec les enfants de rue. Ces derniers n’auraient pas eu les moyens de s’y inscrire. Et donc, pas l’occasion de faire de la musique dans les normes.
En outre, Musique pour Tous avait, dans un de ses projets, initié des sessions d’encadrement des chorales. C’est dans ce cadre, affirme Michel Lutangamo, qu’il a rencontré la chanteuse Dena Mwana. « Si Dena Mwana est sortie du chœur de l’église Notre-Dame-de-Grâce de l’UPN, c’est sous le conseil de Rigobert Mbila », nous a dit le violoniste. Et de poursuivre : « c’est en travaillant avec les chorales que Rigobert avait décelé des talents particuliers comme le sien de sorte qu’il avait créé un groupe vocal. Il était composé uniquement de chanteurs sans accompagnement. Elle y avait alors presté lors de productions tenues notamment au Centre Wallonie-Bruxelles ». Pour autant que l’on sache, Musique pour Tous a concouru à la vision de Dena de lancer sa carrière professionnelle, le cadre l’a aidé à percer et trouver l’issue pour créer son groupe. Et à René Impwa de renchérir au sujet de l’appui accordé aux chœurs de la ville : « Avec Rigobert, nous avons travaillé énormément avec beaucoup de chorales ». Et de préciser : « Le chœur Mgr Luc Gillon a bénéficié d’une contribution artistique de l’orchestre de chambre. La plupart des grandes chorales, Sacré-Cœur, Sainte-Anne, Saint-Luc, Sebyera et Notre-Dame-de-Grâce d’où est venue Dena Mwana sont celles avec lesquelles nous avons travaillé. Dans presque toutes les paroisses catholiques, protestantes ou néo-apostoliques, il existe aujourd’hui des chorales classiques issues de l’encadrement que nous leur avons accordé avec Rigobert comme directeur artistique ».
Michel Lutangamo, professeur de violon, chef d’orchestre de l’INA, nous a expliqué que l’ASBL avait pour objectif d’encadrer musicalement les jeunes. « Nous prenions sous notre aile des jeunes enfants pour en faire des musiciens professionnels », a dit le cofondateur de Musique pour tous. Au départ, le projet lancé avec des élèves de l’Institut des arts du spectacle (Inas), de manière naturelle, il s’est étendu au-delà du cadre de l’école d’application de l’INA. « Nous avons ensuite commencé à associer des enfants dont nous avions décelé le talent évoluant au sein des chorales ou carrément des enfants de rue », a-t-il raconté au Courrier de Kinshasa. Par ailleurs, en plus de la plateforme consacrée aux cours de musique à destination des jeunes, Musique pour Tous avait une section dédiée à l’orchestre de chambre, musique exclusivement classique et une autre section qui élaborait toutes sortes de projets musicaux.
Cheville ouvrière de Musique pour Tous
Le violoniste nous a appris que « Waassa est né à partir de l’encadrement assuré aux jeunes ». « Nous avons déniché des talents avec lesquels nous avons décidé de former ce groupe. Il avait percé au point que c’était devenu la vitrine de Musique pour Tous de sorte que c’était le département le plus connu. C’est Waassa que l’on voyait en premier, nous y avions investi tous nos moyens », a soutenu Michel Lutangamo. Cheville ouvrière de Musique pour Tous, « Rigobert Mbila était également musicien du groupe Waassa. Il y jouait du piano alors que moi j’étais au violon », a-t-il affirmé.
Effacé est le qualificatif que plusieurs des journalistes qui l’approchaient s’accordent à utiliser pour décrire le contrebassiste dont les mérites sont loués dans l’univers musical. Cela tiendrait au fait qu’il évitait à tout prix de se mettre en vedette en dépit de son charisme. Il savait esquiver les interviews et évitait les photos comme s’il en avait une sainte horreur. Une description de son collaborateur et ami que n’approuve aucunement Michel Lutangamo : « Rigobert n’était pas effacé, c’est juste que généralement dans nos groupes, les stars ce sont les chanteurs. Ce sont eux les plus connus mais les musiciens, tous ceux qui sont derrière eux passent inaperçus même si ils font le gros du travail. C’est cela qui fait que l’on paraisse effacé. Cela était renforcé par le fait qu’en concert, l’on présentait plus les chanteurs et les chanteuses que les musiciens ».
Par ailleurs, nous a signalé René Impwa, au niveau de l’INA même l’on sait voir l’impact du travail accompli par le contrebassiste décédé il y a une semaine. « Il y a trente ans, il y avait plus d’étudiants en art dramatique qu’en musique. Nous avons constaté les retombées du travail réalisé dans les églises par l’orchestre de chambre de Musique pour Tous. L’INA a accueilli un grand nombre d’étudiants. Nous avons commencé à recevoir jusqu’à cent étudiants en préparatoire alors qu’à l’époque où nous étions étudiants, il y en avait à peine douze ou quatorze. Ce travail au sein des églises a été une large contribution au fait que des parents ont décidé d’envoyer leur progéniture y étudier. Alors qu’autrefois, les parents étaient réticents à l’idée qu’ils fassent de la musique et les en dissuadaient », a expliqué René Impwa ami de longue date du défunt qu’il tenait pour son frère.