Ethiopie : la communauté internationale divisée sur le règlement du conflit au Tigré

Dimanche, Août 15, 2021 - 13:15

Des initiatives de négociations enclenchées jusqu’à ce jour pour tenter de trouver une solution au conflit dans la région sont au point mort, et les réactions du monde restent timides pour la simple raison que certains Etats, dont les membres africains du Conseil de sécurité (Kenya, Niger, Tunisie) ne veulent pas, comme l’Ethiopie, que la question du Tigré soit un sujet à discuter formellement par cette instance. Il en résulte que la situation continue de dégénérer sur le terrain.

Le conflit au Tigré relève d’une affaire interne à l’Ethiopie et si des efforts internationaux doivent être réalisés, cela doit être le fait que des Africains, via par exemple l’Union africaine, soutiennent certains pays du continent mais aussi d’ailleurs. Ils sont soutenus par la Russie et la Chine qui disposent d’un droit de veto au Conseil de sécurité. Cela a lieu au moment où la médiation de l’organisation panafricaine peine à convaincre les parties en conflit à résoudre la crise par le dialogue.

Les Etats-Unis pensent au contraire que la crise au Tigré n’est pas une affaire intérieure éthiopienne, mais un sujet qui doit préoccuper le Conseil de sécurité, indique l’ambassadrice américaine à l’ONU, Linda Thomas-Greenfield. C’est pour cela que le président américain, Joe Biden, dépêche cette semaine un émissaire en Ethiopie, avec pour mission d’exiger la fin des combats dans la région du Tigré où la crainte d’une catastrophe humanitaire s’intensifie. Jeffrey Feltman, diplomate chevronné des Etats-Unis pour la Corne de l’Afrique, effectue une visite sur place du 15 au 24 août, selon le département d’Etat.

Auparavant, et dans le but de contraindre les autorités éthiopiennes à s’asseoir sur la table des négociations avec les rebelles pour régler le conflit au Tigré, le gouvernement américain avait décidé d’imposer des restrictions de visa à des responsables érythréens et éthiopiens accusés de l’avoir attisé. Washington avait également annoncé des restrictions « à grande échelle » en matière d’assistance économique et sécuritaire à Addis-Abeba.

Du côté européen, une session tenue en juin avait inscrit le conflit au Tigré à son ordre du jour. A cette occasion, les pays occidentaux s’étaient contentés de renouveler leur appel à « un cessez-le-feu immédiat ».

Bruxelles déplore l’enlisement du conflit

Aujourd’hui, le chef de la diplomatie européenne déplore la dégradation de la situation dans la région, alors que Bruxelles a gelé depuis décembre le versement de quelque 90 millions d’euros d’aide budgétaire à l’Ethiopie. « Ce qui se passe au Tigré est effroyable. Il est temps que la communauté internationale se réveille et agisse », insiste Josep Borrell.

Le conflit au Tigré préoccupe également la France. L’évolution de la situation sur place « requerrait la négociation d’une cessation des hostilités et l’ouverture d’un dialogue politique entre les parties au conflit dans le respect de l’intégrité et de l’unité de l’Ethiopie », estime Emmanuel Macron. « Aux côtés de ses partenaires, la France se tient prête à accompagner l’Ethiopie dans ces directions », souligne la présidence de la République française, qui réitère la position affichée par le président français lors des récents entretiens qu’il a eus avec les deux chefs de gouvernement soudanais et éthiopien.

Les divergences de points de vue des dirigeants du monde sur la crise tigréenne n’empêchent pas le Premier ministre éthiopien, Abiy Ahmed, de répéter sans cesse qu’il est de son devoir de « maintenir l’ordre » dans son pays. Certains dirigeants étrangers, notamment occidentaux, ignorent les crimes du TPLF (Front de libération du peuple du Tigré), parti à l’époque au pouvoir dans cette région du nord du pays et qui défiait le gouvernement central, relève-t-il.

La région du nord de l’Ethiopie a plongé dans la violence en novembre dernier, lorsque le Premier ministre a envoyé l’armée dans la région pour destituer les autorités locales du TPLF à la suite, selon lui, de l’attaque de camps militaires par des forces tigréennes. Alors que le chef du gouvernement éthiopien, prix Nobel de la paix 2019, promettait une victoire rapide, neuf mois plus tard, les forces pro-TPLF ont repris le contrôle de l’essentiel du Tigré et progressé dans les régions voisines de l’Afar et de l’Amhara, l’obligeant à appeler « tous les Éthiopiens aptes et majeurs » à rejoindre les forces armées pour combattre les rebelles.

Nestor N'Gampoula
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