COP26: les dirigeants africains face aux promesses des pays riches et aux enjeux environnementaux

Mercredi, Novembre 3, 2021 - 14:53

Une vingtaine de chefs d'État et une trentaine de ministres africains prennent place à Glasgow pour la 26e Conférence des parties des Nations unies sur le changement climatique (COP26). Ils ont exprimé, au cours du sommet, leurs principales revendications, en particulier que se concrétise l'aide promise.

A Glasgow, en Ecosse, des dirigeants africains ont exprimé leurs revendications, notamment la concrétisation de l’aide promise depuis dix ans au continent africain pour qu'il s'adapte au changement climatique. Ils ont défilé devant la tribune pour exprimer leur impatience et proposé des solutions efficaces pour lutter contre la déforestation. Six ans après l’accord de Paris sur le climat (2015), l'Afrique n'a reçu que 70% à 80% des cent milliards de dollars par an promis pour 2020 par les pays riches pour lui  permettre de s'adapter aux événements météorologiques qu'elle subit, à cause d'un réchauffement climatique dont elle n’est pas responsable, mais la solution. Ce montant, largement insuffisant, par ailleurs composé de prêts et non de dons, pourrait n'être atteint qu'en 2023.

Dans leurs discours successifs, les chefs d’Etat africains ont plaidé pour une compensation pour service rendu à l’environnement. Au cas où les dirigeants africains seraient appelés à renoncer à  l’exploitation de leurs forêts ou à leurs ressources naturelles en vue d’atténuer le réchauffement climatique, que leur propose-t-on ? Continent vulnérable, l’Afrique n’est responsable que de 4% des émissions globales. Elle a besoin de moyens financiers pour lutter  contre le changement climatique.  

La restauration de la Grande muraille verte, un projet atteignable

Pour le président nigérian, Muhammadu Buhari, l’ambition que l'Afrique  restaure plus de cent millions d'hectares de terres dégradées pour une agriculture productive est réalisable. « Avec les efforts concertés de tous les dirigeants africains, je suis optimiste que l'ambition de l'Afrique de restaurer plus de cent millions d'hectares de paysages dégradés pour une agriculture productive est réalisable », a-t-il déclaré. Il a annoncé que son pays prendra bientôt la direction de la Conférence des chefs d'État et de gouvernement de l'Agence panafricaine de la Grande muraille verte, un projet de reforestation d'une vaste bande de terre qui traverse onze pays africains (Burkina Faso, Djibouti, Érythrée, Éthiopie, Mali, Mauritanie, Niger, Nigeria, Sénégal, Soudan et Tchad). « Ensemble, nous nous engageons dans le processus de  transformer et de restaurer les terres africaines dégradées », a scandé le président du Nigeria.

Muhammadu Buhari a rappelé que l'une des principales recommandations du quatrième sommet sur la biodiversité, organisé à Paris, en janvier 2021, était l'engagement de 19,6 milliards de dollars par la communauté internationale pour la mise en œuvre de l’initiative de la Grande muraille verte. Avant de conclure par une conviction, qui est que la mise en œuvre de cette initiative allait permettre de prévenir et d'inverser la dégradation de l'écosystème dans les pays touchés tout en améliorant les conditions de vie de la population. Le fondateur d'Amazon, Jeff Bezos, a promis d'allouer un milliard de dollars au profit de la Grande muraille verte. Cette somme vient s'ajouter aux 19,6 milliards de dollars.

Pour un fonds spécial pour les   pays du Sahel

Le sahel est confronté au changement climatique et au terrorisme. Le président nigérien, Mohamed Bazoum, a appelé à la création d'un « fonds spécial » pour soutenir les pays du Sahel confrontés au changement climatique et au terrorisme. « Le phénomène du terrorisme à l'œuvre actuellement au Sahel, loin de relever d'une génération spontanée accidentelle, est en partie grandement liée avec le changement climatique, lequel, en appauvrissant la biodiversité, a remis en cause le mode de vie pastoral », a-t-il expliqué. Puis, il a lancé un appel à la mobilisation internationale à travers un fonds spécial, « aux côtés des pays sahéliens menacés par le sable comme elle se mobilise aux côtés des petits pays insulaires envahis par les eaux des océans », pour aider  « à la reforestation des espaces envahis par le désert », déplorant que  « les pays pauvres, qui n'ont aucune responsabilité dans le dérèglement climatique, sont ceux qui aujourd'hui payent le tribut le plus lourd au consumérisme promu par un modèle de développement qui a fait très peu cas des peuples des pays faibles ainsi que des générations futures ».

Le bassin du Congo en Afrique centrale

Le président de la République démocratique du Congo (RDC), Félix Tshisekedi, et le Premier ministre britannique, Boris Johnson, ont signé un engagement pour une durée de dix ans (2021-2031) pour protéger la forêt de la RDC. Cet accord va débloquer, dans une première phase, 500 millions de dollars (2021-2026). La forêt tropicale du Bassin du Congo représente un réservoir de carbone et une réserve de biodiversité d’importance mondiale (plus de 3,6 millions km2) et couvre six pays ( Cameroun, Centrafrique, Congo, Gabon, Guinée équatoriale et RDC). L'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture a noté une perte annuelle d'environ 3,1 millions d'hectares de forêts naturelles au cours des cinq dernières années. Les réformes politiques et de gouvernance dans la région avancent, mais les efforts visant à conserver et à utiliser durablement les forêts sont encore fragmentés et sous-financés.

La veille du sommet de Glasgow, le président Denis Sassou N'Guesso a rappelé que le bassin du Congo est le premier capteur de carbone de la planète. Il a réaffirmé sa volonté de protéger ces forêts et tourbières. Ce qui ne peut se faire au détriment de son développement. « Le bassin du Congo rend au monde des services écosystémiques inestimables », a-t-il prévenu. La COP26 de Glasgow pourrait être, pour certains pays du Bassin du Congo, une opportunité de s’affirmer géopolitiquement. Car elle porte de grands enjeux, économiques, politiques et environnementaux.  C’est le cas du Gabon, qui cherche à vendre cinq milliards de dollars de crédits carbone ; de la RDC, qui a annoncé l’interdiction de l’export des grumes ; du Congo-Brazzaville qui cherche à raviver le plan régional sur la gestion des eaux et l’exploitation forestière, le Fonds bleu, initié par la Fondation Brazzaville et qui est la vitrine africaine cette année à Glasgow.

La partition de l’UE contre la déforestation du bassin du Congo

La commission européenne s’est engagée à verser un milliard d’euros dédiés à la déforestation, dont un quart sera spécifiquement au bassin du Congo en Afrique centrale. La présidente de la Commission européenne, Von der Leyen, a indiqué que les consommateurs de l'Union européenne (UE) ne sont plus disposés « à acheter des produits responsables de la déforestation et de la dégradation des forêts », et qu’elle proposera bientôt un projet de loi visant à freiner la déforestation mondiale induite par l'UE, en n'autorisant sur le marché de l'UE(Union européenne) que les matières et produits dont la production n'entraîne pas la déforestation. Elle a confirmé la signature, par l'UE, la déclaration engageant le bloc à stopper et à inverser la perte de forêts et la dégradation des terres d'ici à 2030.

« Plus nous tardons à agir et plus cela devient grave », a déclaré le Premier ministre britannique, Boris Johnson.  Pour le président français, Emmanuel Macron, il faut rehausser les ambitions et avoir des stratégies d’ici à 2030.

Noël Ndong
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