France : panthéonisation de Joséphine Baker

Mercredi, Décembre 1, 2021 - 18:00

« Ma France, c'est Joséphine Baker », a déclaré le président français, Emmanuel Macron, lors de la cérémonie de la première femme noire à être admise dans le temple républicain.

Joséphine Baker est la première noire, la sixième femme - après Sophie Berthelot, Marie Curie, Geneviève de Gaulle-Anthonioz, Germaine Tillion et Simone Veil - la deuxième personnalité du peuple noir, après le Guyanais Félix Eboué (1949), à entrer dans la grande scène de l’histoire de la France, que représente le Panthéon, dédié aux personnes exceptionnelles, depuis une décision de l'Assemblée nationale en 1791.

« Nous, qui sommes une nation de combats, fraternelle [...] qui n'est elle-même que lorsqu'elle est grande et sans peurs [...] Ma France, c'est Joséphine », a déclaré le chef de l'État, devant le cénotaphe de Joséphine Baker, qui a commencé son allocution en retraçant les moments forts de sa vie, de son enfance aux États-Unis, en passant par Paris pendant les années folles.  « Joséphine Baker mena tant de combats avec liberté, légèreté, gaieté, beauté dans un siècle d’égarement », a dit Emmanuel Macron, détaillant toutes les facettes de son histoire: « Héroïne de guerre, combattante, danseuse, chanteuse, Noire défendant les Noirs, mais d’abord femme défendant les humains, Américaine et Française ». Dans son soutien à l’entrée de l’artiste au Panthéon, le président de la République a déclaré :  « Elle fit à chaque tournant de l’histoire les justes choix, distinguant toujours les lumières des ténèbres. Et pourtant, rien, rien n’était écrit ».

La vie de légende de Joséphine Baker

Vedette atypique, Femme, Noire, résistante, espionne, artiste de scène et icône des années folles, née le 13 juin 1906, à Saint-Louis, dans le Missouri, aux Etats-Unis, Joséphine Baker arrive en France en 1925, adopte la nationalité française en 1937. Plus qu'une personnalité, c’est une  légende. La star met son talent musical à contribution dès les premiers mois de la Seconde Guerre mondiale, pour divertir les soldats français sur le front. Elle profite des réceptions auxquelles elle est conviée dans les ambassades et les pays étrangers pour recueillir du renseignement, qu’elle transmet à Londres à l'encre dans ses partitions. En 1963, à Washington, elle s'exprimera après Martin Luther King et son fameux « I have a dream ». 

Les quatre facettes de la diva : sa vie d’artiste libre, de résistance, son militantisme des droits civiques, la mère de famille. Jean-Claude Bouillon-Baker, un des douze fils  adoptés de Joséphine Baker, souhaite qu'on garde  de sa mère « un message de tolérance, raciale évidemment, d'altruisme aussi ». Sa panthéonisation intervient 46 ans après sa mort, le 12 avril 1975 à l'âge de 68 ans. 

Les cinq décorations de Joséphine Baker : chevalier de la Légion d’honneur, croix de guerre 1939/1945 avec palme de bronze, médaille de la Résistance, médaille commémorative des services volontaires de la France libre, médaille commémorative française de la guerre de 1939-1945. Son corps reste à Monaco où elle a été inhumée. En hommage à « une femme libre », la station de métro « Gaîté », dans le 14e arrondissement, sera rebaptisée « Joséphine Baker ». Le porte-parole du gouvernement, Gabriel Attal, a salué  un magnifique symbole : "Joséphine Baker incarne l'amour de la France qui peut venir aussi de personnes qui n'y sont pas nées".

Pour le romancier Pascal Bruckner, membre du collectif « Osez Joséphine », cette panthéonisation « symbolise l'image d'une France qui n'est pas raciste, contrairement à ce que disent un certain nombre de groupuscules médiatiques ». « C'est la France qui m'a faite ce que je suis, je lui garderai une reconnaissance éternelle », faisait savoir Joséphine Baker.

Noël Ndong
Légendes et crédits photo : 
Thibault Camus / POOL / AFP
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