Cameroun: un nouvel épisode judiciaire autour du groupe Bolloré

Samedi, Janvier 8, 2022 - 12:00

Dans l’une des affaires impliquant le groupe français Bolloré au Cameroun, cent quarante-cinq villageois de la région de Kribi, dans le sud du pays, ont été déboutés, le 7 décembre, par la justice française.

Palmeraie à Kribi 1 au CamerounAlors qu’ils avaient saisi le tribunal de grande instance (TGI) de Nanterre, en France, il y a quelques mois, parce qu’ils s’estimaient lésés par les plantations de palmiers à huile de Socapalm, des Camerounais ont été déboutés le 7 janvier. Ils souhaitaient contraindre le groupe Bolloré à fournir des documents censés établir ses liens avec une société camerounaise qu'ils accusent d'attenter à leurs droits.

L’enjeu du délibéré était de permettre à la justice d’établir la responsabilité de Bolloré sur les activités de cette filiale camerounaise de Socfin, la maison-mère commune. Démontrer que les plantations camerounaises de Socapalm appartiennent au groupe français Bolloré ou que la relation commerciale est établie, via la maison-mère luxembourgeoise Socfin, était l’objectif de l’avocat des cent quarante-cinq villageois camerounais. 

Selon leur avocat, Fiodor Rilov, l'exploitation des palmeraies par la Société camerounaise Socapalm leur "inflige des préjudices au quotidien" en condamnant l'accès à des terrains et lieux de sépulture ainsi qu'en polluant les eaux.

Fin novembre, Me Rilov avait tenté de convaincre le tribunal de Nanterre (région parisienne) d'ordonner au groupe Bolloré de produire des pièces censées attester, soit du contrôle qu'il exerce sur la Socapalm, soit des relations commerciales établies avec elle via une holding belgo-luxembourgeoise, la Société financière des caoutchoucs (Socfin). 

Si tel était le cas, le géant français aurait été soumis au "devoir de vigilance" concernant les activités de la Socapalm au Cameroun car une loi de 2017 oblige les plus grandes entreprises à prévenir les atteintes graves envers les droits humains et l'environnement chez leurs sous-traitants et fournisseurs étrangers.

Le 7 janvier, le juge des référés a estimé que les activités de la Socapalm pouvaient être "susceptibles de porter atteinte aux droits fondamentaux" des riverains. Mais il a conclu que les riverains n'apportaient "aucun élément de nature à faire présumer l'existence d’un contrôle direct ou indirect de la société Bolloré SE sur la Socapalm ou sur la Socfin"

Le juge a retenu les arguments de la défense du groupe Bolloré, à savoir sa participation minoritaire au sein de la Socfin, "à hauteur de 38,75%".

L'avocat du groupe, Me Olivier Baratelli, s'est félicité de cette victoire judiciaire et a dénoncé auprès de l'AFP une procédure visant "à diaboliser et tenter d'utiliser la notoriété du nom Bolloré".

Pour sa part, Fiodor Rilov a indiqué à l'AFP que ses clients allaient interjeter appel. "On ne conteste pas la question de la participation capitalistique", a rappelé l'avocat, qui s'interroge surtout sur l'"intervention dominante" du groupe Bolloré dans la désignation des dirigeants de Socfin.

En mai 2019, dix organisations non gouvernementales et syndicats ont assigné Bolloré en France pour obtenir l'application de mesures améliorant les conditions de vie des travailleurs et riverains de plantations d'huile de palme au Cameroun. Cette procédure, distincte de celle des cent quarante-cinq riverains, est en cours.

Marie Alfred Ngoma avec l'AFP
Légendes et crédits photo : 
Une palmeraie à Kribi 1 au Cameroun / Crédit photo : Loozap.com
Notification: 
Non