Un sommet pour agir face aux menaces sur l'océan, le "One Ocean Summit" s’est tenu à Brest, en France, du 9 au 11 février.
Ce sommet de l’action océanique s’inscrit dans le même cadre que les grandes rencontres touchant le climat. Mais cette fois, un groupe de leaders mondiaux engagés était présent pour pousser la cause de l’océan, « grand oublié de la transition écologique ». Une rencontre qui entrait dans le cadre de la présidence française de l'Union européenne.
L'objectif fixé était clair : "mobiliser la communauté internationale et agir concrètement à réduire ces pressions sur l'Océan". De ce fait, 500 experts, durant trois jours, ont eu l’ambition d’obtenir des engagements signés par trente-cinq pays intitulés "Traité international sur la gouvernance de la haute mer".
L’idée remonte au 3 septembre de l’année dernière, à l’issue d’une sortie en bateau en Méditerranée du président de la République française, Emmanuel Macron. Il avait annoncé à Marseille la tenue de ce "One Ocean Summit", parce qu’il avait eu « le sentiment que l’océan était le grand oublié de la transition écologique. Il était important qu’enfin il ne demeure plus l’un des sous-dossiers des COP ».
De nombreuses voix dans le monde s’élèvent et plaident pour une COP océan. C’est dans ce sens que l'océanographe Paul Tréguer souhaiterait voir le rôle clé de l'océan en matière de régulation du climat et de biodiversité qui, jusqu’alors n'est pris en compte que "marginalement" dans les grands rendez-vous internationaux. Désormais, la commission en charge va essayer de construire, très concrètement, un agenda pour les mois à venir qui devra accélérer le calendrier international sur cette question.
L’année s’annonce, en effet, chargée en négociations : un traité international devrait être signé à New York, en mars 2022, et une conférence des Nations unies sur les océans sera notamment organisée fin juin à Lisbonne, au Portugal.
Pendant les trois jours, l’ensemble des débats a été accessible en plusieurs langues en visioconférence, afin de permettre à chaque personne sur la planète de pouvoir les suivre. Sur place à Brest, plusieurs expositions et animations, que ce soit à Océanopolis, sur le port du Moulin Blanc, ou encore à bord de la frégate Garonne, ont été proposées à la découverte du public.
A l’issue du sommet, certains acteurs n’ont pas hésité à affirmer leur scepticisme face à cette initiative. Pour la ministre congolaise de l’Environnement, du Développement durable et du Bassin du Congo, Arlette Soudan-Nonault, il faudrait aussi passer des déclarations aux actes : « Nous n’avons plus le temps. Nous devons légiférer tous ensemble et agir », a-t-elle exhorté, car elle ne veut pas, une fois encore, que les engagements pris collectivement soient oubliés dès que les lumières du sommet seront éteintes.
Une mobilisation internationale nécessaire
"La présidence française de l'Union européenne est une occasion qu'il ne fallait pas rater", explique Olivier Poivre d'Arvor, ambassadeur pour les pôles et les enjeux maritimes."Plutôt que d'organiser un sommet européen classique, nous avons choisi de prendre un groupe de dirigeants engagés". A l’issue de ce sommet, la France espère que de nouveaux pays ratifieront l'Accord du Cap, destiné à renforcer la sécurité des navires de pêche et à lutter contre la pêche illégale, pour qu'il puisse entrer en vigueur.
Une trentaine de chefs d'Etat et de gouvernement, dont la moitié présents à Brest, se sont ainsi engagés vendredi 11 février à mieux protéger l'océan, indispensable à la régulation du climat et riche en biodiversité mais mis à mal par les activités humaines. De fait, les océans occupent 70% de la surface du globe et jouent un rôle essentiel dans la lutte contre le réchauffement climatique. Ils nourrissent la population, abritent de nombreuses espèces. Pour autant, ils restent mal connus et mal protégés. Une mobilisation des Etats en faveur de l’océan s’impose alerte les experts !
Des représentants de l'ONU, de l'Union européenne, d'ONG, des dirigeants de géants européens du transport maritime par conteneurs également étaient présents sur place ou par vidéo, lors d'une séquence qui a duré près de quatre heures.
Parmi les participants en présentiel figuraient la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, l'émissaire américain pour le climat, John Kerry, le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi, dont le pays organisera la COP27 sur le climat en novembre, ou encore le président portugais Marcelo Rebelo de Sousa, qui accueillera fin juin un sommet de l'ONU sur les océans à Lisbonne. D'autres dirigeants ont participé par visio-conférence ou message vidéo, dont le secrétaire général des Nations unies, Antonio Guterres, le vice-président chinois Wang Qishan, le Premier ministre japonais Fumio Kishida, le Premier ministre britannique Boris Johnson, le Premier ministre indien Narendra Modi, ou encore Alassane Ouattara, président de Côte d'Ivoire.
Plusieurs événements internationaux doivent se tenir d'ici la fin de l'année qui pourraient renforcer la protection des océans : une réunion de l'ONU sur l'environnement fin février qui abordera la question d'un accord international sur le plastique, des négociations en mars à l'ONU sur un traité pour la haute mer, des COP biodiversité et climat et la conférence de Lisbonne.
L'objectif vise à créer à une impulsion politique forte autour de plusieurs projets : le lancement de négociations pour aboutir à un traité international de lutte contre la pollution plastique, le développement des aires marines protégées, l'aboutissement de discussions sur un traité international sur la haute mer ou encore la ratification d'un traité pour renforcer la sécurité des navires de pêche.
Haute mer : l'Union Européenne et la France lancent une coalition pour un traité de protection
Les vingt-sept Etats membres de l'Union européenne (UE) et treize autres pays ont formé une coalition pour conclure un traité ambitieux destiné à protéger la haute mer, actuellement en négociations, ont annoncé Emmanuel Macron et Ursula von der Leyen, vendredi, lors d'un sommet à Brest.
Cette coalition, initiée par l'UE et la France qui assure la présidence du Conseil de l'UE, "appelle à l'adoption cette année d'un traité ambitieux pour la préservation et l'usage durable de la biodiversité marine dans les zones au-delà des juridictions nationales", a précisé la présidente de la Commission européenne."Nous sommes très proches mais nous devons donner de l'impulsion pour le conclure cette année", a-t-elle insisté.
L'initiative est également soutenue par l'Australie, le Canada, le Chili, les Comores, l'Inde, Monaco, le Maroc, la Norvège, le Pérou, la République du Congo, Singapour, la Suisse et le Royaume-Uni. Il s'agit "de conclure ces échanges et d'avancer pour avoir enfin les outils permettant de protéger ces eaux internationales qui sont trop souvent une zone de non-droit écologique", a souligné le président français.
La haute mer commence où s'arrêtent les zones économiques exclusives (ZEE) des Etats, à maximum 200 milles nautiques (370 km) des côtes et n'est donc sous la juridiction d'aucun Etat. Elle représente plus de 60% des océans et près de la moitié de la planète, mais est souvent mal connue. Or les océans s'affaiblissent, victimes de ces émissions (réchauffement, acidification de l'eau...), des pollutions en tout genre ou de la surpêche.
Un traité sur la haute mer est négocié formellement sous l'égide de l'ONU depuis 2018 cependant les discussions été interrompues par l'épidémie de covid-19. La quatrième et théoriquement dernière session de négociations est prévue en mars, à New York. Les négociations portent sur la création d'aires marines protégées, les ressources génétiques marines et le partage de leurs avantages, la réalisation d'études d'impact environnementales ainsi que le renforcement des capacités et les transferts de technologies notamment vers les pays en développement. Mais des points sensibles restent à régler.
"C'est un pas positif dans la bonne direction", a salué Liz Karan, de l'ONG Pew Charitable Trusts. Alors que les discussions vont reprendre en mars, "nous espérons que l'ambition exprimée au sommet "Un océan" se traduira dans des actions concrètes pour protéger le dernier bien commun de l'humanité", a-t-elle ajouté.
Au moins 80% des fonds marins cartographiés d'ici à 2030, promet l'Unesco
L'Unesco s'est engagée jeudi à ce qu'au moins 80% des fonds marins soient cartographiés d'ici à 2030.
"Seuls 20% des fonds marins sont cartographiés. Nous devons aller plus loin et mobiliser la communauté internationale pour qu'au moins 80% des fonds marins soient cartographiés d'ici 2030", annonce dans un communiqué Audrey Azoulay, la directrice générale de l'Organisation des Nations unies pour l'éducation, la science et la culture (Unesco).
Afin d'atteindre cet objectif, d'un coût de cinq milliards d'euros, trois axes sont envisagés : la mobilisation d'une flotte de cinquante navires dédiée à la cartographie des fonds marins, l'intensification du recours au sonar sur navire autonome et la transmission par les gouvernements et les entreprises des données cartographiques dont ils disposent.
"Connaître la profondeur et les reliefs des fonds marins est essentiel pour comprendre l'emplacement des failles océaniques, le fonctionnement des courants océaniques et des marées, comme celui du transport des sédiments", souligne l'Unesco, qui dirige l'initiative Décennie des sciences océaniques au service du développement durable (2021-2030).
"Ces données contribuent à protéger les populations en anticipant les risques sismiques et les tsunamis, à recenser les sites naturels qu'il convient de sauvegarder, à identifier les ressources halieutiques pour une exploitation durable, à planifier la construction des infrastructures en mer, ou encore à réagir efficacement aux catastrophes à l'image des marées noires, des accidents aériens ou des naufrages", ajoute l'agence, pour laquelle ces connaissances jouent aussi un rôle majeur dans l'évaluation des effets futurs du dérèglement climatique.
L'Unesco a, en outre, annoncé le 10 février se fixer pour objectif que l'éducation à l'océan figure dans les programmes scolaires de ses 193 Etats membres d'ici à 2025. Pour y parvenir, l'agence mettra à disposition des décideurs publics un référentiel commun de contenus pédagogiques.
"Grâce à cette boîte à outils, tous les Etats sont sur le même pied d’égalité pour placer rapidement l’océan au coeur des enseignements et accroître les connaissances des élèves dans ce domaine afin qu’ils deviennent des citoyens responsables et engagés", explique dans un communiqué Stefania Giannini, sous-directrice générale de l'Unesco en charge de l'éducation.