Député national et ancien Premier ministre de la République démocratique du Congo (RDC), membre du présidium de la plateforme Lamuka et président du parti Nouvel élan, Adolphe Muzito a animé une conférence de presse le 15 février au Press Club Brussels, à Bruxelles, en Belgique, en marge du sommet Union européenne (UE) - Union africaine ( UA) qui y sera organisé les 17 et 18 février.
La conférence de presse a porté sur les attentes, les obstacles et les opportunités du sommet UE-UA pour l'Afrique et plus spécifiquement pour la RDC. Adolphe Muzito a notamment fait savoir qu’il est de ceux qui souhaitent la création d’un fonds souverain dans ce pays, qui sera sous-tendu par les actifs miniers du Congo. « Il faut chiffrer, titriser et évaluer. Nous avons combien de tonnes de minerais dans le sous-sol ? Nous sommes deuxième producteur de cuivre et premier producteur de cobalt. Le coltan, le lithium…Nous pouvons mettre cela sur le marché en titrisant et mobilisant des fonds. Une partie (de ces ressources. NDLR) pourra être mise en hypothèque pour lever des fonds », a déclaré l’ancien Premier ministre.
Pour lui, en aliénant des actifs ou en les mettant en caution pour dégager des financements, la RDC peut obtenir jusqu’à cinquante milliards de dollars américains. « C’est dans la durée car, aujourd’hui, nous sommes capables de mobiliser trente milliards de dollars sur le marché financier. Il suffit de présenter les états financiers du Congo, c’est-à-dire quel est notre bilan et quel est notre produit intérieur brut (PIB) ? On a un PIB de 55 milliards. En moyenne, les pays africains ont un niveau d’endettement faible par rapport à l’Europe. La Belgique, par exemple, a un PIB de 500 milliards de dollars américains et a une dette qui équivaut à un peu plus. La RDC a un PIB de 55 milliards mais on a une dette de 6 milliards, si on y intègre la dette intérieure. Cela signifie que l’on a un taux d’endettement qui approche les 10 ou 12 %, là où les autres on un taux d’endettement de 100% de leur PIB. Cela signifie que le Congo peut nouer des partenariats car il peut emprunter jusqu’à 60 ou 70 %. C’est vrai qu’il va poser un problème de consommation ou d’utilisation de l’argent dans la durée, mais on a cette capacité d’endettement », a expliqué Adolphe Muzito.
Selon le conférencier, même si on effectue une équation du service de la dette, c’est-à-dire ce que la RDC paye annuellement à titre d’intérêt et de quotité restant due, le pays approche les 200 ou 300 millions de dollars américains, alors qu'il a budget qui approche les huit milliards de dollars américains en ressources propres. « Et nous avons une balance de paiement qui approche les 15 milliards de dollars. Donc, avec un service de la dette de 300 millions de dollars, on est en dessous du ratio qui veut qu’on ne dépasse pas 15%. Aujourd’hui, en terme de service de la dette, on ne dépasse pas 2%. Mais, la dette elle-même est de six milliards de dollars. Donc, nous sommes capables de nous endetter. La question est celle de la gestion et non celle des agrégats proprement dits, c-à-d des rapports entre notre niveau de la dette, notre PIB, notre budget et notre balance de paiement », a argumenté l’ancien inspecteur des finances.
Financer le service de la dette
Par ailleurs, Adolphe Muzito a estimé que les recettes d’exportation peuvent permettre à la RDC de dégager un milliard de dollars chaque année pour financer le service de la dette qui, a-t-il fait savoir, est aujourd’hui à 200 millions. Il a ainsi estimé que le pays peut s’endetter, étant donné que la dette implique un délai de grâce pendant lequel le financement des infrastructures est à ses débuts. « C’est au bout de la cinquième année que vous pouvez commencer à payer, avec les surplus générés par les projets financés par l’emprunt », a fait savoir l'ancien Premier ministre.
Augmenter le budget de l’Etat
Il a précisé que son approche consiste à savoir comment augmenter le budget de l’Etat grâce aux ressources propres mobilisées sur le marché financier, comment ainsi constituer un fonds souverain et financer, via le marché financier international ou encore les partenaires bilatéraux comme la Belgique. « Ce n’est pas avec un budget de sept milliards de dollars américains en ressources propres que l’on peut financer un secteur comme l’enseignement, par exemple, notamment la gratuité de l’enseignement ; que l’on peut financer l’Etat dans sa fonction régalienne qu’est la sécurité à l’est du pays où on nous malmène par un petit pays. On a un PIB faible, mais on a tout, plus que le monde entier, en ressources naturelles. L’Occident a besoin de nos ressources et nous avons besoin de leurs capitaux. Il faut donc créer un rapport de force pour qu’ils viennent avec leur argent et leurs connaissances techniques », a déclaré l’ancien Premier ministre congolais.
Pour Adolphe Muzito, augmenter le budget de l’Etat consiste d’abord à mobiliser les ressources internes, à travers notamment la douane, le fisc et les recettes administratives, et aussi à savoir comment augmenter les ressources extérieures grâce à ce fonds souverain pour commencer à construire le Congo, en partant de l’évaluation de ses besoins propres.