Ukraine/Russie : la guerre des nerfs se poursuit entre Moscou et Kiev

Mercredi, Mars 2, 2022 - 11:46

De l'Allemagne à la Suède, en passant par la France et l'Italie, les pays européens ont décidé de fermer leur espace aérien aux compagnies russes, en représailles à l'attaque contre l'Ukraine par la Russie. En réponse, des sanctions  contre la Fédération de Russie se sont intensifiées.

Le ministère allemand des Transports a décrété une interdiction de vol pour trois mois des avions et des exploitants d’avions russes dans l’espace aérien allemand. Après avoir semblé hésiter, la France, elle aussi, a annoncé une mesure similaire. Même décision de l'Irlande, de la Belgique, des Pays-Bas, de l'Italie, de l'Autriche et de la Macédoine du Nord. « En Europe, le ciel est ouvert (...) à ceux qui connectent les peuples, pas à ceux qui commettent des agressions brutales », a justifié le Premier ministre belge, Alexander De Croo. « Il n'y a pas de place dans l'espace aérien néerlandais pour un régime qui applique une violence inutile et brutale », a souligné, de son côté, le ministre hollandais de l'Infrastructure, Mark Harbers. Le Luxembourg a aussi indiqué « préparer les notifications nécessaires pour fermer » son espace aérien aux compagnies russes. En Europe du Nord, la Finlande, qui a une frontière avec son voisin russe, la Suède, le Danemark ainsi que l'Islande ont également pris de telles mesures. Ces pays rejoignent notamment la Pologne, la République tchèque, l'Estonie, la Bulgarie, la Moldavie ou encore le Royaume-Uni.

Lors d'une réunion des ministres des Affaires étrangères de l'Union européenne(UE), « nous pousserons pour une fermeture à l'échelle de l'UE », a déclaré le chef de la diplomatie danoise, Jeppe Kofod. Pour lui, « l'invasion russe de l’Ukraine doit être contrée par les sanctions internationales les plus fortes possibles ». « Nous voulons que (la fermeture de l'espace aérien, NDLR) puisse être fait le plus vite possible, et le mieux et le plus rapide serait que ce soit fait au niveau européen », a affirmé le ministre suédois des Affaires européennes, Hans Dahlgren. En représailles, Moscou a commencé à interdire le survol de son territoire aux avions liés aux pays européens ayant annoncé de telles décisions, comme le Royaume-Uni, la Lettonie, la Lituanie, l'Estonie, la Slovénie, la Bulgarie, la Pologne et la République tchèque. À l'unisson, un nombre croissant de compagnies occidentales a déjà décidé de suspendre ses vols vers et au-dessus de la Russie pour une semaine, disant anticiper des mesures de rétorsion de Moscou. Ces sanctions sont conçues de manière à paralyser l'économie russe, punissant le gouvernement pour sa décision d'initier une intervention militaire en Ukraine.

L’Otan ne participe pas dans la guerre entre Moscou et Kiev

La France vient de renforcer sa participation au dispositif de l’Otan dans les pays baltes, en Pologne et en Roumanie, a annoncé le Premier ministre français, Jean Castex, à l’Assemblée nationale. « Un  pays comme la France ne peut recourir à la force que si elle est directement attaquée ou dans le cadre des systèmes d’alliance dont elle fait partie », a-t-il souligné, précisant que « l‘Alliance atlantique est défensive » et se « défend lorsque l’un de ses membres est agressé ». Il reconnaît enfin que « cette crise aura des conséquences majeures sur l'avenir de l'Europe » mais juge que « c'est le droit, la paix et la démocratie qui devront sortir vainqueurs ».

Le secrétaire général de l'Otan, Jens Stoltenberg, a déclaré à son tour que l'alliance « ne participera pas au conflit » entre la Russie et l'Ukraine, ajoutant que l'alliance « fournit toutes sortes de soutien militaire à l'Ukraine », mais n'y enverra aucun soldat. Dans ce contexte, il a précisé que l'alliance est « défensive et ne cherche pas la confrontation avec la Russie ». « Nous essayons d'aider l'Ukraine autant que possible, et les alliés de l'Otan ont imposé un lourd tribut à la Russie », a-t-il indiqué.

Poutine pose ses conditions pour le cessez-le-feu, Zelensky dit niet

Lors d'un échange, le 28 février, avec le président français, Emmanuel Macron,  président en exercice du Conseil de l'UE, Vladimir Poutine a posé comme conditions à l'arrêt des combats la reconnaissance de la Crimée en tant que territoire russe, la démilitarisation et « dénazification » de l'Ukraine, ainsi qu'un « statut neutre » pour le pays. Ses exigences ont été refusées par l'Ukraine, lors d’une première session de négociations, à la frontière biélorusse. « Ces pourparlers ont eu lieu sur fond de bombardements et de tirs », a dénoncé,  le 1er mars, le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, qui a réclamé un « cessez-le-feu immédiat » et le « retrait des troupes [russes] du territoire ukrainien ». Un règlement « n'est possible que si les intérêts sécuritaires légitimes de la Russie sont pris en compte sans conditions », a répété le Kremlin, ajoutant espérer que les négociations « mèneraient aux résultats espérés ».   « Nous n'avons pas dans nos plans une occupation des territoires ukrainiens, nous ne comptons imposer rien par la force à personne », assuré Vladimir Poutine, appelant les militaires ukrainiens « à déposer les armes ».

L'origine du conflit entre la Russie et l'Ukraine

La Russie demande à ce que l'Ukraine renonce pour de bon à rejoindre l'Otan (qui rassemble trente pays, dont la France et les Etats-Unis), estimant avoir été "trahie" par cette organisation. En décembre 2021, le ministère des Affaires étrangères russe exigeait que l'Otan retire « formellement » une décision de 2008 ouvrant la porte à l'adhésion de l'Ukraine et de la Géorgie. Les autorités russes ont alors demandé à ce que l'Otan cesse de mener des exercices militaires près de la frontière russe. Cette promesse de non-adhésion à l'Otan a été formulée dans les années 1990. Pour que l'URSS accepte la seconde option, le secrétaire d'Etat américain de l'époque, James Baker, assure au président russe, Mihkaïl Gorbatchev, que " la juridiction militaire actuelle de l'Otan ne s'étendra pas d'un pource vers l'Est".  En posant comme condition que l'Ukraine n'intègre pas l'Otan, Vladimir Poutine poursuit « sa stratégie de constituer des zones 'tampon' entre la fédération de Russie et les pays de l'Otan (...) Cela fait des années qu'il le dit », note Martine Mespoulet, professeure émérite à l'université de Nantes.  La guerre des nerfs ne fait que commencer.

Noël Ndong
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