Des organisations humanitaires redoutent que le conflit en Ukraine abuse d’une grande partie de l’aide humanitaire destinée à l’Afrique.
Les craintes des organisations humanitaires sont justifiées par le fait que certains donateurs ont annoncé que 70 % de leur aide destinée aux personnes vulnérables au Sahel sera coupée. L'Agence norvégienne pour les réfugiés, Action contre la faim, Médecins du Monde et Oxfam s'inquiètent de la situation très préoccupante pour les déplacés internes au Burkina Faso. « Aujourd'hui, on a plus de 160 000 nouveaux déplacés internes. Ce qui monte le total à plus de 1,7 million de personnes déplacées internes depuis le début de la crise. Les effets seront dévastateurs, notamment dans le domaine de la santé, de l'insécurité alimentaire, de l'éducation, mais aussi sur les violences fondées sur le genre, avec plus de la moitié des femmes qui sont déplacées internes. Aujourd'hui, vu l'ampleur de la crise, on a peur que les fonds vers l'Ukraine détournent la lumière sur le Sahel », alerte la coordinatrice générale de Médecins du monde au Burkina Faso, Safia Torche.
Ces inquiétudes sont partagées également par le président -fondateur de l’Association internationale des médecins pour la promotion de l’éducation et de la santé (Aimes-Afrique), Serge Michel Kodom. « Cette inquiétude liée à la guerre va compromettre aussi sérieusement les conditions de vie déjà précaires de la population vulnérable qui bénéficie du soutien de nos organisations », a-t-il déclaré. Il appelle à une révision de la stratégie de communication pour que l’aide des pays vulnérables d’Afrique ne soit pas « pas complètement touchée par la guerre en Ukraine ».
Même constat pour Safia Torche, très préoccupée par les autres conséquences de la guerre en Ukraine, notamment l’augmentation du cours du blé. En effet, les prix des produits fabriqués à partir du blé ont augmenté. C’est la cas du pain et des autres denrées de première nécessité. La première victime est la population vulnérable, comme les déplacés internes, déplore la coordinatrice de Médecins du monde.
L’onde de choc de la crise ukrainienne et les sanctions européennes qui l’accompagnent s’étendront au-delà. Plusieurs économies pourraient en souffrir, à court et à moyen terme, notamment dans le secteur céréalier. La Russie et l’Ukraine jouent un rôle majeur sur le marché des céréales. La Russie est le premier producteur mondial de blé et l’Ukraine est le quatrième exportateur mondial de maïs et le troisième exportateur de blé. Les cours boursiers des céréales ont flambé. Une crise prolongée pourrait faire basculer l´économie globale dans la stagflation, ce qui serait le pire scenario. Mais, l'économiste Yves Ekué Amaïzo pense que les sanctions occidentales sur la Russie vont renforcer les échanges entre Moscou et le continent africain, en général. Les échanges entre la Russie et l’Afrique vont déjà augmenter dans les secteurs de la défense et de la sécurité. Elles pourraient également induire une augmentation des échanges commerciaux, la finance, l'approvisionnement en biens, le secteur de l’énergie ou l’alimentation.