Allemagne : vers la réduction de l’aide au développement

Bonn prévoit de réduire de 12% son aide au développement. Le ministre allemand des Finances, Christian Lindner, a présenté son projet de budget qui prévoit des dépenses à hauteur de 457,6 milliards d’euros. Mais tous les ministres du gouvernement n’adhèrent pas à ce plan. Par exemple, le ministère de la Coopération économique et du Développement va réduire de 10,8 milliards d’euros, alors que celui de la Défense devrait passer à plus de 50 milliards d’euros. Une augmentation qui serait due à la guerre en Ukraine et à ses conséquences  sur la nutrition mondiale, a expliqué la ministre du Développement, Svenja Schulze. Ce qui obligerait la première économie européenne à réduire sa contribution au Programme alimentaire mondial de 50 % à 28 millions d'euros. « Avant même que la guerre n'éclate, la pandémie de covid a touché les plus pauvres, alourdissant le fardeau sur leurs systèmes de santé et leurs économies. Et tout cela s'est ajouté à la crise climatique, qui frappe plus durement les pays les plus pauvres du monde, avec des sécheresses, des tempêtes, des inondations et de mauvaises récoltes », a déclaré Svenja Schulze.

Mais Bonn compte maintenir son engagement de consacrer 0,7 % de sa production économique, soit 23 milliards d'euros, à l'Aide publique au développement (APD).  L'Allemagne , l’un des plus grands pays donateurs au monde, soutient des programmes économiques, environnementaux, sociaux et politiques dans les pays en développement, notamment la lutte contre la faim et la pauvreté, la protection du climat et de la biodiversité, la santé et l'éducation, l'égalité des sexes, des chaînes d'approvisionnement équitables et le transfert de technologie. Mais les libéraux démocrates (FDP), partenaires du gouvernement de coalition,  ont une vision sceptique de l'aide au développement. Le FDP affirme que des économies substantielles sont possibles dans ce domaine - en mettant l'accent sur « la qualité plutôt que sur la quantité ». Le président du parti, le ministre des Finances, Christian Lindner, a présenté le projet de budget réduisant l'aide au développement de 1,6 milliard d'euros. « La voie à suivre ne peut pas être d'avoir de plus en plus de projets. Nous devons être plus efficaces. Tout doit être mis à l'épreuve, qu'il s'agisse de petites ou de grandes organisations, de projets bilatéraux ou multilatéraux », a plaidé la députée FDP, Claudia Raffelhüschen.

De nombreux parlementaires ont critiqué l'augmentation prévue des dépenses militaires. Ils trouvent les coupes dans l'aide au développement particulièrement bouleversantes : « Des millions d'autres sont susceptibles d'être poussés à la faim par la guerre », a déclaré Andrej Hunko du Parti de gauche socialiste. Dans cette situation, a-t-il dit, « investir cent milliards d'euros dans un fonds spécial pour la Bundeswehr signifierait une définition complètement erronée des priorités ». Les membres du Parti écologiste vert l’ont confirmé. « La sécurité, après tout, ne signifie pas seulement la sécurité militaire. Nous sommes responsables d'assurer un équilibre entre les dépenses de défense, la prévention des crises civiles et la coopération au développement fondée sur les droits de l'homme ».

Dans l’accord de coalition pour le nouveau gouvernement allemand, conclu par le SPD, les Verts et le FDP avant la formation du gouvernement en décembre, il y a l'engagement que l'aide au développement et les dépenses de défense devraient toutes deux augmenter au même rythme. « Si le budget régulier de la défense doit maintenant augmenter de 3,4 milliards d'euros et que le budget de la défense est en fait diminué de 1,6 milliard d'euros en même temps, c'est une violation de notre accord de coalition que les législateurs des trois partis ont du mal à comprendre », a déclaré la porte-parole de la politique de développement du SPD, Sanae Abdi. Un sentiment partagé par les organisations non gouvernementales allemandes. Le budget définitif sera présenté et voté fin juin.