Questions pour un cinéphile congolais : quel point commun dans les films « Parcours » de Saïd Bongo, « Elikia » de Michaël Thamsy, « Grave erreur 1 & 2 », « Subtile manipulation » et « Positif », tous signés par le réalisateur Richi Mbelele, « Ironie fatale » de Michaël Gandoh, « Trouble » de Dan Scott ou encore « Dibulu » d’Albé Diaho ? Oui, tous ces réalisateurs sont ponténégrins, mais encore ? La réponse tient en deux lettres : Zé !
Zé est le diminutif de Zéphirin Pépin Emery Gnonko, un homme à la croisée du quatrième art qu’est la musique et du septième connu pour être celui du cinéma. Entre lieux de tournages, muni d’un enregistreur, d’un micro perche et de quelques micros cravates, et Z.G Studio, son studio d’enregistrement et de postsynchronisation, Zé est celui qui communie avec talent l’audio au visuel. « J’ai commencé à apprendre seul la guitare à Boundji, c’était en 1988 et deux années plus tard, je formais un groupe à Brazzaville. L’histoire a commencé comme cela. D’abord auteur-compositeur et musicien, je suis devenu ingénieur du son, peut-être parce qu’il est plus facile d’être mieux servi quand c’est par soi-même. Je me suis formé en autodidacte, familiarisé avec la M.A.O, la musique assistée par ordinateur, et je me souviens même avoir fait du livre « Musique et PC » mon livre de chevet », rembobine Zé en évoquant ses débuts.
Son amour pour la musique est palpable à travers les guitares qu’il collectionne: des guitares électriques néo-zélandaises « Jansen » en passant par son modèle préféré, une « Silent » du constructeur japonais Yamaha. Zé, également chanteur, ajoute : « J’ai aussi trois basses et bien sûr d’autres instruments comme des synthétiseurs mais, actuellement, je suis plus sollicité par le cinéma que par la musique, même si j’aimerai trouver le temps d'enregistrer mon propre album ». Il faut dire que réalisateurs et producteurs de films n’ont que le mot Zé à la bouche, lui laissant peu de temps pour souffler. Et puis un long métrage, bah... c’est long ! : « Le cinéma est une approche très différente du son, elle requiert une grande concentration, car bien souvent l’enregistrement se fait en milieu hostile », explique-t-il.
« Que ce soit en intérieur ou extérieur, le lieu de tournage est souvent exposé à des bruits non désirés, venus d’un bar, d’une école, d’une église, d’un marché à proximité, voire encore de la circulation. Le silence – moteur – on tourne n’est jamais aussi simple que l’on croit pour le silence absolu. Il faut savoir rester attentif sur le signal entrant du son comme savoir manier la perche à bout de bras » précise Zé, orfèvre en la matière, avant d’enchaîner : « La post-synchro est une autre étape qui nécessite de postsynchroniser en studio certaines scènes avec les acteurs, sans compter qu’il faut ajouter les divers bruitages souhaités par le réalisateur, mixer dialogues, musiques et son ambiants. La post synchro est mal connue au Congo, chacun se demande comment font les Américains. Il suffit de regarder le Making Of du film "Titanic" pour comprendre le niveau d’exigence que demande le son au cinéma. En dépit des faibles moyens de l’industrie cinématographique au Congo, on essaie de s’approcher de ce niveau au maximum de ce que l’on peut ».