Guerre en Ukraine : des sanctions occidentales ont plutôt enrichi la Russie

Mardi, Mai 3, 2022 - 11:57

Malgré les sanctions occidentales, Moscou a empoché 63 milliards d'euros, grâce à ses exportations d'hydrocarbure (gaz et pétrole) depuis le début de la guerre en Ukraine, fin février, selon un rapport. En cause, la flambée des prix provoquée par la chute des importations.

Depuis le début de l'invasion de l’Ukraine, la Russie n’a cessé de brandir la dépendance des Européens à ses importations d'hydrocarbure comme levier contre les sanctions occidentales. Le géant pétrolier Gazprom a suspendu ses livraisons de gaz vers la Bulgarie et la Pologne, appliquant les menaces du président Vladimir Poutine de couper les approvisionnements à des pays  qui n’effectueraient pas le paiement dans sa monnaie nationale, le rouble. Jusqu’ici, les sanctions économiques n’ont pas ébranlé Moscou. Ses exportations d'hydrocarbure se sont même révélées très lucratives durant ces deux mois de guerre, note un rapport du Centre for Research on Energy et Clean Air (CREA). La Russie a ainsi gagné 63 milliards d'euros grâce à la vente de ses énergies fossiles depuis le 24 février et l'arrivée de ses troupes en Ukraine, souligne le rapport, dont  44 milliards d’euros, soit près des trois quarts de ses exportations envoyés à des pays de l'Union européenne. En détail, l'Allemagne (gaz, pétrole et charbon) pour 9,1 milliards d'euros, suivi par l'Italie (6,9 milliards d'euros), la Chine (6,7 milliards d'euros), les Pays-Bas (5,6 milliards d'euros), la Turquie (4,1 milliards d'euros) et la France, en sixième position (8 milliards d'euros). Ce qui a permis à Moscou d’effectuer des remboursements sur sa dette en dollars – alors que Moscou s’était engagée à ne les pays qu’en roubles - pour éviter le défaut de paiement sur deux  obligations souveraines à maturité 2022 et 2042, d’un montant de 564,8 millions de dollars et de 84,4 millions de dollars. La Russie n’a pas connu de défaut de paiement sur sa dette extérieure depuis 1917.

Le paradoxe des sanctions occidentales

Si les exportations d'hydrocarbure russe ont fait chuter au sein l'Union européenne suite aux sanctions, - de 20 % pour le pétrole et -40 % le charbon,  en retour, les prix ont flambé. Ce qui a permis de compenser cette baisse. Moscou essaie, par ailleurs, de diversifier sa clientèle. Les experts du CREA ont observé une reprise des expéditions de pétrole vers l'Inde, l'Egypte et d'autres destinations «inhabituelles ». Néanmoins, les exportations vers ces nouvelles destinations restent insuffisantes pour compenser la chute des exportations européennes. A cause du manque de pipelines, «les voyages sont bien plus longs et plus chers, ce qui rend ces destinations nettement moins attrayantes pour Moscou », justifie le rapport, qui encourage les gouvernements à accélérer la transition écologique et à mettre fin à tous les achats d'hydrocarbure, « afin de renforcer l'effet des sanctions et de contribuer à mettre fin à la guerre et aux crimes contre l’humanité commis par l'armée russe ». Et, si l'interdiction totale n'est pas possible, instaurer des droits de douane suffisamment élevés sur les importations en provenance de Russie, recommande le rapport.

Les prévisions ne sont pas avantageuses pour Moscou

Une récession de 10 % serait attendue en Russie pour l’année en cours. Si elle se confirmait, elle limiterait les capacités de Moscou à financer ses armées, alors que l’invasion a tendance à s’enliser et que la Russie doit remplacer son matériel. La situation soulignerait la puissance économique toujours détenue par l’occident, convaincu que cela enverrait « un message clair à la Chine, dont les velléités sur  Taïwan sont fortes », selon certains experts occidentaux en intelligence économique. Gazprom a déjà perdu 27% de ses ventes. La guerre en Ukraine va plomber la Russie, a averti le Fonds monétaire international.

 

 

Noël Ndong
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