Il y a des moments comme cela où le temps est suspendu à une seule voix. C’était une fin de mai à la Côte sauvage, à Pointe-Noire, un moment de grâce pour la jeune Betty, promise à un bel avenir.
Nous sommes un 27 mai à la Pyramide. Dans ce bar-restaurant, aussi chic que cool et bordé par l’océan Atlantique, le public est venu nombreux pour entendre rugir les Conquering Lions. Avant le passage de ce groupe phare de la scène reggae ponténégrine, c’est un autre lion qui apparaît sur les planches. Une voix, une guitare acoustique, un djembé, c’est simplement ce qu’il faut à Antar le Lion pour réchauffer l’atmosphère de ce début de saison sèche. A l’autre bout de la ville, loin de la Côte sauvage, une jeune fille s’agite dans tous les sens dans le quartier Ngoyo. Faut dire qu’elle est grave de grave en retard pour ce concert et c’est quand même très embêtant lorsque l’on sait que son nom est à l’affiche de cette belle soirée du mois de mai. « Il y a des jours comme cela où rien ne va », doit-elle penser dans le désordre des minutes qui défilent à l’horloge du temps. No panic Betty, la Pyramide t’a fait une petite place entre les deux sets des Conquering Lions. Ouf !
Alentours de 22 heures. Betty est enfin là, prête à monter sur scène. Prête ? Dans sa tête, pas tout à fait. Betty n’a que 21 ans, pratiquement aucune expérience du live et, pire encore, c’est comme si on la jetait dans la fosse aux lions, là où le groove et les good vibes des Conquering Lions résonnent encore. Tous les instruments se sont tus et Betty, plantée seule devant son micro, n’a pour elle qu’une bande son pour séduire un public multicolore. Autant de « mundélé » d’un seul coup, dans le public face à elle : stress total ! Marcus, son manager, est à la console déjà prêt à envoyer les MP3 ! Sous la lumière des projos, Betty devient Tity, meuf à part, comme indiqué sur l’affiche. A part, elle l’est ! Une fine silhouette qu’enveloppe un blouson avec une capuche qui lui couvre les yeux, un jean troué, un « no look » au naturel sans artifice ni maquillage !
Et puis... Quatre titres comme quatre coups de semonce dans la nuit ! Aucun pas de danse, rien qu’une voix ! Et quelle voix ! Dès le premier titre, « Djalabi », de table en table le public tombe sous le charme et chacun de s’approcher de la scène, prendre photos et vidéos pour saisir cet instant rare empli d’émotion, de fraîcheur, de talent pur. Après un remix sur un instrumental de « Monalisa » de Lojay-Sarz, la jeune interprète conclut son court - trop court - passage par un splendide cover de « Waiting in vain » de Bob Marley. Alors il pleut soudain des applaudissements et, au lendemain de cette magie, des commentaires ô combien élogieux sur les réseaux sociaux : « Très très forte », écrira le célèbre Fredy Massemba, « Elle a vraiment du talent » dira la chanteuse Zina Hope, « Elle nous a scotchés », affirmera Laurent Lamy, féru de musique jazz, « Je kiffe à mort » dira Hendry, récent vainqueur du Primus Vogby Tour, d’autres messages encore et encore qui nous disent que Tity aura éclaboussé de sublime la Pyramide en ce soir là. Dans un style Afro Soul, elle est assurément une meuf à part et son avenir dans le paysage musical congolais semble tracé. On vous aura prévenus.