Tout un univers gravite autour de la musique congolaise qui n’est pas que chanson ou danse, mais aussi art et passion de vivre, l’identité de tout un peuple qui s’exprime notamment à travers ses habitudes vestimentaires. Ces diverses représentations de la musique congolaise sont livrées par les cinquante-huit artistes plasticiens, sculpteurs et peintres en majorité, qui exposent du 24 juin au 15 juillet, à Wallonie-Bruxelles.
L'expositio Rumb’art, tenue à raison pour une première du genre, manifeste la place toute particulière que l’on réserve désormais à la rumba de manière vraiment expresse. Pan important de la culture des deux Congo, elle s’est toujours défendue toute seule, maintenant qu'elle est l’objet de l’attention de tous depuis son inscription au patrimoine immatériel de l’humanité. Aussi, à leur tour, les plasticiens ont démontré, faisant d’elle leur muse, ses diverses facettes qui font son charme. Dès le hall d’entrée du centre culturel belge, l’on est nez à nez avec des œuvres qui traduisent diversement l'ancrage de la rumba dans le vécu quotidien.
Dans la diversité des œuvres qui composent l’exposition Rumb’art, certaines créent la surprise. La beauté ou l’originalité que l’on décèle en découvrant l’une ou l’autre expliquait l’attroupement observé devant elle au vernissage, le 23 juin. Il y a notamment le "Joueur de maracas" et "Kumba", deux sculptures monumentales bien au centre de la salle devant lesquelles les visiteurs étaient nombreux à se photographier.
« Ces œuvres m’ont appelé, elles m’ont parlé. J’y ai senti beaucoup de force et en même temps une grande fragilité. C’est ce paradoxe et leur audace qui m’a plu. Faire danser dans le désespoir de ce que l’on voudrait jeter, c’est beaucoup de soleil dans une atmosphère cruelle », a commenté la soprano Isabelle Kabatu.
Réalisées à base de bouteilles de plastique froissées, leur grande originalité a causé la stupéfaction de plusieurs. Face à l’admiration suscitée, son auteur se plaisait à expliquer sa démarche : « Kumba est une femme potelée, elle n’a rien à avoir avec le canon occidental mais entre plutôt dans le canon typiquement congolais ». Jean-Alain Masela a renchéri : « Je suis parti de la kumba à la rumba, évoquant les origines cubaines de notre rumba avec le "Joueur de maracas" et quoique devenue rumba, elle en a gardé les germes comme en témoigne notre chère "Kumba", figure de la rumba moderne dansée par une femme contemporaine ».
Des thèmes variés
Les thématiques sont diverses, quand elles sont en vedettes, les stars sont présentées selon les époques et les styles. Pour sa part, Francine Mava a choisi de parler de la "Rumba au présent". A voir tous les murs tapissés de toiles du hall au deuxième niveau où est ouverte la nouvelle salle d’exposition, il n’était pas facile de tout scruter. C’est là que les thèmes sont les plus variés. "Le divertissement", c’est cette description que livre une des toiles de Denis Matemo et, pour le peintre populaire Moke Fils, c’est le "TP OK Jazz" qui excelle dans cet art et la représente au mieux, alors que Papy Malambu y voit le "Réveil de l’Afrique". Dans la perspective de la pérenniser, Bafululu évoque la "Rumba à travers les enfants". La Sape revient souvent, hommes en costume-cravate, femmes et même enfants sapés apparaissent sur plusieurs toiles aux couleurs chatoyantes. La coiffure n’est pas en reste avec Dikisongele qui renvoie à l’afro très à la mode en ce moment que l’on perçoit en regardant de belles têtes, impressionnantes tout de même, coiffées de bonnets.
« L’imagination s’est déployée à travers plusieurs expressions auxquelles l’on n’avait pas pensé avant », a confié au "Courrier de Kinshasa" Me Lema. Sans nul doute, Rumb’art est une exposition qui fait figure d’exception, selon le peintre, compté parmi les doyens encore vivants. Le thème est original en soi. Et il n’a pas tort. Par ailleurs, le résultat est impressionnant, il n’y a pas souvent eu autant de participants et le nombre d’œuvres exposées offre à la vue une multiplicité de déclinaisons de la rumba qui enchante. Coup de chapeau à la République démocratique du Congo, terre d’artistes qui a mis son génie à proposer cette exposition qui manifeste autrement la rumba à travers l’expression multiple des plasticiens kinois, associés à Kashando de Bukavu et Jean Kiat de Lubumbashi.