Le directeur général de la Société nationale des pétroles du Congo (SNPC), Maixent Raoul Ominga, évoque dans cet entretien relatif au quarantième anniversaire de la Congolaise de raffinage (Coraf), les défis à relever dans le cadre du programme « Performance 2025 » qui devrait renforcer les capacités de cette société en lui permettant de couvrir 85% des besoins nationaux en produits pétroliers finis à l’horizon 2025.
Les dépêches de Brazzaville (L.D.B.) M. Maixent Raoul Ominga, vous êtes directeur général de la Société nationale des pétroles du Congo (SNPC) depuis 2018. Votre groupe compte parmi ses filiales la Congolaise de raffinage (Coraf) qui a pour activité principale le raffinage du brut. Pour son 40e anniversaire, quel bilan faites-vous de son activité et de son rôle au sein du groupe SNPC ?
Maixent Raoul Ominga (M.R.O.) : Tout d’abord, je vous remercie de l’intérêt que vous accordez au secteur des hydrocarbures et à celui du raffinage en particulier. La Coraf est une filiale détenue à 100% par le groupe SNPC avec une capacité nominale de 1 200 000 tonnes métriques par an. Elle est chargée de fabriquer les produits pétroliers finis consommés sur le marché local.
La Coraf a été mise en service en 1982 à la suite des travaux exécutés par la société française Tecnip. Elle a connu des problèmes dans son fonctionnement continu dans les années 1996, essentiellement à cause des difficultés pour acheter le pétrole brut. Les problèmes de trésorerie ont conduit à un arrêt de production d’environ trente mois. En 2000, la Coraf a repris ses activités après son changement de statut et devenant une filiale à part entière de la SNPC.
Avec ce redémarrage, les principaux défis étaient les suivants : le paiement du pétrole brut dans les délais ; le recouvrement à temps des factures de vente des produits pétroliers ; le fonctionnement continu de l’usine sans arrêt par suite d’incident technique ; la réalisation de la maintenance de l’usine ; la formation du personnel et le remplacement des agents mis à la retraite ; la réalisation des programmes d’investissement pour améliorer l’outil de raffinage.
La Coraf représente un outil stratégique pour l’indépendance énergétique du pays pour ne pas dépendre totalement des importations. Il est nécessaire de créer les conditions qui permettent de pérenniser l’activité de la CORAF afin de réduire la dépendance vis-à-vis des importations. A travers ces éléments, nous pouvons affirmer que la Coraf présente aujourd’hui un bilan satisfaisant. Elle joue son rôle en couvrant environ 60% du marché national contre environ 40% des importations.
L.D.B.: Les ambitions du groupe SNPC en matière de performance se déclinent dans le cadre du programme "Performance 2025". Comment la Coraf prévoit-elle de s’y inscrire ?
M.R.O. : La raffinerie de Pointe-Noire, outil de souveraineté énergétique mis en service depuis 1982, comprend des installations vieillissantes. Le programme 2023 de la Coraf a été élaboré en prenant en compte les orientations édictées par le programme "Performance 2025". Ce programme prévoit l’amélioration des performances de la raffinerie par l’optimisation et la fiabilisation des unités de production ; la réhabilitation et la sécurisation de stockage ; la fiabilisation des utilités. Actuellement, nous recherchons des partenaires et des financements pour mettre en œuvre ce programme.
Au plan organisationnel, le programme de transformation de la Coraf a été finalisé et sa mise en œuvre est en cours. Il s’agit, entre autres, de la révision de l’organigramme, de la mise en œuvre des plans de recrutement et de formation et de la refonte des fonctions comptabilité.
L.D.B.: L'Opep a décidé de baisser ses quotas de production pour soutenir les prix. Quelles sont les conséquences sur l’activité de la Coraf ?
M.R.O.: La Coraf acquiert le pétrole brut au prix du marché international et vend les produits pétroliers sortis de la raffinerie sur le marché local à un prix administré : le prix entrée distribution (PED). La hausse du prix de pétrole brut aggrave les charges d’exploitation et impacte négativement la trésorerie. Pour pallier ce déficit, le gouvernement intervient pour soutenir l’activité d’approvisionnement du pays en produits pétroliers finis.
L.D.B.: L'industrie pétrolière intègre aujourd’hui les notions de transition énergétique, de GNL, de nouvelles ressources. Face à cela, quelle est la stratégie de la Coraf ?
M.R.O.: Nous avons dernièrement déclaré lors de la conférence internationale et exposition sur les hydrocarbures au Congo que la transition énergétique est inéluctable. Toutefois, en fonction des pays, elle ne se réalisera pas au même rythme et de la même façon. En ce qui nous concerne, l’industrie pétrolière constitue la condition nécessaire pour le développement des infrastructures de production, de traitement, de transport et de stockage permettant d’assurer à terme, la souveraineté énergétique.
La question de la transition énergétique se pose aujourd’hui avec acuité. Elle implique nécessairement une adaptation de notre activité de raffinage à la préservation de l’environnement. En la matière, la stratégie de la Coraf va consister à réaliser des investissements appropriés tels : le traitement du jet pour la réduction de la teneur en soufre ; la mise en place des brûleurs mixtes pour réduire les rejets des nitrites et de gaz carbonique dans les fumées des fours ; la réduction du torchage des gaz ; l’amélioration des systèmes de traitements des eaux usées avant leur rejet dans la nature ; l’installation d’unités de production des carburants propres.
L.D.B.: Quelle est la part de la Coraf dans l’approvisionnement du marché national en produits pétroliers finis ?
M.R.O.: Actuellement, la Coraf satisfait 60 à 70 % des besoins du marché national en produits pétroliers finis. Afin de réduire les surcoûts à l’importation des produits pétroliers, la Coraf, dans le cadre de ses investissements, étudie les stratégies permettant d’accroître les quantités de produits à mettre sur le marché national. Le programme « Performance 2025 » prévoit une couverture de 85 % du marché national à l’horizon 2025.
L.D.B.: Pour ce 40e anniversaire, que pouvons-nous souhaiter à la Coraf ?
M.R.O.: La Coraf reste et restera un outil stratégique pour notre souveraineté énergétique. Elle occupe une place centrale dans le dispositif d’approvisionnement du pays en produits pétroliers finis. Après 40 ans d’existence, elle a connu un vieillissement de ses installations. Les investissements réalisés en 2015 ont permis d’en moderniser une partie.
Les récents audits qui ont été réalisés ont recommandé la modernisation des installations de la raffinerie et le rajeunissement de son personnel. Sa modernisation devient donc une priorité pour le Groupe SNPC et ce processus va occuper une place prioritaire durant notre mandat à la tête de la SNPC. Ce que l’on peut souhaiter à la Coraf, c’est de continuer d’assurer de manière permanente l’approvisionnement du marché national en produits pétroliers raffinés, afin de contribuer au bien-être des populations, suivant la vision exprimée par le président de la République, son excellence Denis Sassou N’Guesso, dans son projet de société, "Ensemble, poursuivons la marche".
Les efforts doivent donc être poursuivis pour accroître la capacité de traitement de la raffinerie, assurer la fiabilisation des installations et la pérennité de l’entreprise. Un accent doit également être mis sur le recrutement et la formation afin de disposer d’un personnel compétent capable d’assurer la conduite et la gestion de la Coraf pour les années à venir.