Activités minières : la recherche géologique au point mort

Lundi, Juin 12, 2023 - 17:19

La République démocratique du Congo (RDC) n’a pas investi dans des partenariats stratégiques pour mieux exploiter ses richesses. A ce jour, le domaine public de l’État n’a valorisé que treize commodités sur près de 1 100 substances minérales répertoriées. Le prétexte du coût exorbitant de la recherche géologique ne tient plus la route.  Pour l’ancien ministre des Mines et expert, Willy Kitobo Samsoni, les 10 % de la redevance minière visent justement à donner les moyens nécessaires à l’État.

Depuis son indépendance, la RDC a enregistré peu d’avancée en matière de recherche géologique. Selon une certaine opinion très répandue, il s’agit carrément d’un réel problème de vision et de leadership dans l’ambition minière du pays. En se présentant sans une connaissance claire sur les innombrables ressources minérales, les autorités congolaises négocient à genou devant les sociétés qui veulent les exploiter. S’exprimant chez nos confrères de Mines.cd, Willy Kitobo Samsoni n’a pas tourné autour du pot sur la question du financement de la recherche géologique. « Les 10 % de la redevance minière avaient pour objectif d’aider l’État à réagir comme des sociétés privées, en faisant de la recherche. En cas de découverte d’un gisement, il était possible d’essayer de le mettre en partenariat avec des valeurs », a-t-il indiquéIl est allé plus loin en incriminant directement les sociétés du portefeuille de l’État qui, selon lui, « prennent le risque de laisser l’évaluation des gisements aux sociétés privées ».   

Toute la stratégie minière est définie par la loi qui n’entre pas réellement en application près de cinq ans après sa promulgation. Or, a dénoncé Willy Kitobo Samsoni, le pays ne peut pas fonder sa politique minière sur des indices alors que l’information géologique permet de sauter une étape et de négocier des investissements lourds. Dans la pratique, la tendance est de laisser les privés investir les moyens conséquents pour réunir l’information géologique et chercher par la suite à renégocier. Techniquement, il est très difficile pour l’État d’établir une base de départ de la négociation sans avoir les données géologiques. Il risque même de négocier en position de faiblesse pour des gisements bien souvent sous-évalués avec, comme seul atout pour l’État, le fait d’être propriétaire du sol et du sous-sol. Un tel dénouement compliquerait les étapes futures, notamment la possibilité de faire de la transformation localement. A terme, le recours systématique à des sociétés privées pour la recherche géologique et l’exploitation minière contribuera davantage à la perte des actifs miniers des sociétés du portefeuille. Passé sous le contrôle des sociétés privées, le gisement va bénéficier d’une rapide certification par souci de lever des fonds et d’attirer plus d’investissement et de visibilité.      

En définitive, l’État doit impérativement investir dans la recherche géologique et rejoindre d’autres grands pays miniers comme l’Afrique du Sud, par exemple, avec ses trente-neuf substances valorisées. « Après la découverte des gisements, l’État doit les certifier afin d’en connaître la valeur et améliorer ainsi la négociation de nos contrats », a insisté un expert, Jacques Eodi. « Sans la certification des gisements, le domaine public de l’État n’a véritablement aucune idée de la vraie valeur des ressources minérales qu’il détient et ne peut s’attirer les meilleurs investissements, lever des fonds à la hauteur de ses actifs et conclure les meilleurs contrats avec des privés », a-t-il ajouté. Présentée comme la championne en diversification minière devant la Chine, la Russie a valorisé plus de soixante substances minières. « Cet effort lui rapporte beaucoup d’argent et l’aide à résister aux chocs des prix sur le marché », a complété l'expert. L’autre précision de taille est le choix des minéraux à valoriser. Il est à privilégier ceux qui interviennent dans l’industrialisation en tant qu’entrants dans des secteurs comme l’agriculture, l’industrie minière et pétrolière, la céramique, la verrerie, la peinture et la papeterie.               

            

Laurent Essolomwa
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