Décès John Fru Ndi : des hommages se multiplient au Cameroun

Mercredi, Juin 14, 2023 - 14:22

L'opposant camerounais, John Fru Ndi, est décédé le 12 juin, à près de 82 ans des suites d’une longue maladie. Il était plusieurs fois candidat à la présidentielle. Au lendemain de sa disparition, des hommages se multiplient dans son pays.

 

« C'était quelqu'un de jovial, quelqu'un d'ouvert, qui aimait le contact, qui était un grand patriote, qui aimait sincèrement le Cameroun. Il l'a, d'ailleurs, démontré à deux reprises. La première, c'est quand il aurait pu, après les élections de 1992, aller vers une guerre civile. Tout le monde l’y poussait, y compris les cadres du SDF. Des gouvernements, comme celui de Sani Abacha, au Nigeria, voulaient absolument que le Cameroun bascule vers une guerre civile », a réagi le député national, Joshua Osih, premier vice-président du parti Social democratic front (SDF), suite au décès du père fondateur de cette formation politique.

« Il a défendu les couleurs du parti à la présidentielle de 2018. Et il a dit qu'il ne gouvernera pas le Cameroun sur le sang des Camerounais. Et la seconde fois, c'est quand la sécession armée a démarré, ils ont voulu que le SDF soit la branche politique de cette sécession, ce qu'il avait fermement refusé. Et ça nous a valu toutes les attaques sur sa personne », a-t-il poursuivi.

Joshua Osih a conclu qu'il « a été enlevé deux fois par ces sécessionnistes et nous pensons que c'est ce qui a peut-être précipité son décès. Donc, naturellement, je suis très triste, je suis affligé même et j'essaie de remonter et de trouver nos courages pour affronter la situation ».

L’avocat Akere Muna connaissait le « chairman » du SDF depuis une soixantaine d'années. En 1990, avec son frère Bernard Muna, Akere Muna a participé, à Bamenda, à la rédaction des statuts du SDF. « Ce qu'il faudrait relever dans le contexte actuel aujourd'hui, quand on nous parle d’anglophones, francophones, quand vous voyez le score de Fru Ndi en 1992, lors de la présidentielle, c'est qu'il a eu plus de 30% pour un pays qui avait 20% d'anglophones, souligne-t-il, ajoutant: « Donc le pays, de façon assez extraordinaire, a voté pour un anglophone, unilingue ».

Il poursuit : « C'était quelqu'un avec un charisme extraordinaire. Quelqu'un de simple, l’homme du peuple, il pouvait comprendre où sont les routes, les mauvaises routes, où vivent les gens. L'histoire du Cameroun ne peut pas s'écrire sans son nom, comme quelqu'un qui a activement fait redémarrer le multipartisme. » C’est en 1990 que John Fru Ndi avait fondé le parti SDF et avait failli gagner la présidentielle de 1992.

Grégoire Owona, ministre du Travail et de la Sécurité sociale, secrétaire général adjoint du Comité central du Rassemblement démocratique du peuple camerounais, le parti du président Paul Biya, a également salué la mémoire du défunt. « Au-delà de nos oppositions politiques, il aura été un grand patriote et un homme très pacifique qui aura contribué, à sa manière, à la construction de notre jeune démocratie. Je voudrais vraiment lui rendre hommage, parce qu'il a toujours été contre la violence et il a cru à la force des arguments beaucoup plus qu'aux arguments de la force pour accéder au pouvoir », a-t-il dit.

Pour l'opposant Maurice Kamto, déclaré second à la dernière présidentielle de 2018, « les souvenirs se bousculent » dans la tête face à la disparition d'un homme qu'il qualifie d’« atypique, courageux et charismatique » qui a marqué d'une empreinte indélébile la lutte politique pour la liberté et la démocratie. Selon lui, John Fru Ndi a su « lever une espérance folle chez le peuple camerounais, en particulier dans les années 1990, et a contribué de manière décisive au retour du multipartisme au Cameroun ».

« Dieu seul sait à quel point le contexte de son combat était extraordinairement difficile. Merci pour le terrain préparé », a écrit, pour sa part, Libii, président du parti PCRN, proclamé troisième à la dernière présidentielle de 2018.

Yvette Reine Nzaba
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