Le Gabon, berceau de la Françafrique, a longtemps entretenu des liens forts avec la France, ancienne puissance coloniale, . Mais au fil du temps, la mondialisation aidant, les relations entre Paris et Libreville se sont fissurées.
Aujourd'hui spectatrice du coup d'État qui a évincé Ali Bongo du pouvoir, la France, fragilisée par le sentiment anti-français qui essaime en Afrique francophone, se range en qualité d'observateur. Confronté à un nouveau putsch dans l’une de ses anciennes colonies, le gouvernement français avance avec prudence. "La France condamne le coup d'État militaire qui est en cours au Gabon", a sobrement déclaré le porte-parole du gouvernement, Olivier Véran, le 30 août, quelques heures après l’intervention, à la télévision gabonaise, des forces armées ayant écarté le président Ali Bongo. La diplomatie française "réaffirme son souhait que le résultat de l'élection, lorsqu'il sera connu, puisse être respecté", a poursuivi le porte-parole lors d'une conférence de presse à l'issue du Conseil des ministres.
Le Gabon loge l’un des quatre bases militaires permanents de la France
La France déploie l’une de ses quatre bases militaires en Afrique dans cette ancienne colonie depuis 1960. Ses troupes sont connues sous le nom d'Éléments français au Gabon (EFG) depuis 2014, baptisée Camp de Gaulle, où servent 380 militaires. Les trois autres bases sont installées au Sénégal, à Djibouti, et en Côte d'Ivoire. Après la prise de pouvoir par l'armée gabonaise, les regards se sont tournés vers les bases militaires étrangères présentes dans ce pays. L'armée française dispose également d'un centre d'entraînement au combat pour les soldats africains dans les forêts du Gabon. Le camp de Gaulle est utilisé pour former les soldats des pays membres de la Communauté économique des États de l'Afrique centrale ( Cameroun, Tchad, Sao Tomé-et-Principe, Guinée équatoriale, Congo, RDC, Angola, Burundi et Centrafrique). Les autorités françaises avaient précédemment annoncé que le nombre de soldats français au Gabon serait réduit jusqu'en 2024 et que l'objectif était de passer à 200 soldats. La France a effectué plusieurs interventions militaires au Gabon, notamment en 1964 et en 1990 pour garder au pouvoir Omar Bongo, le père d'Ali Bongo au pouvoir de 1967 à 2009 et auquel son fils a succédé,de 2009 à 30 août 2013.
D’importantes relations économiques entre la France et le Gabon
Ali Bongo a été déchu et "mis à la retraite", le 30 août, à la suite d'un coup d'État, d’ Oligui Nguema, son neveu, général des Armées et chef de la Garde républicaine, désigné président de la Transition. Le Gabon est connu pour ses réserves de pétrole, de bois, de manganèse et des réserves d'uranium, exploitées entre 1961 et 1999 par Orano, ex-Areva. Le Gabon est l’un des pays les plus riches d'Afrique, avec un PIB par habitant de 8.600 dollars. Le secteur pétrolier et minier, représente le cœur de l’économie gabonaise, avec 40 % des recettes fiscales, 52 % du produit intérieur brut (PIB), et 84 % des exportations.
Une présence française importante
Selon le registre consulaire des Français établis hors de France, 8000 expatriés français vivent au Gabon, colonie française de 1882 jusqu'à son indépendance le 17 août 1960. Le Gabon compte 2,4 millions d'habitants. 110 entreprises françaises y sont présentes, soit plus qu'au Nigéria ou au Cameroun. Quelque 81 grandes entreprises françaises y détiennent des filiales : Eramet (plus de 90 % du manganèse), Perenco, TotalEnergies et Maurel & Prom. Air Liquide, Spie Oil & gas, CMA CGM, Bolloré Africa Logistics, Colas, Rougier, Axa et Meridiam etc; 14.000 emplois et 3.5 milliards de chiffre d'affaires, soit près d'un cinquième du PIB nominal du Gabon sont générés par les entreprises tricolores, avec un stock d'investissement d'un milliard de dollars. Le Gabon est la huitième destination des investissements français, en Afrique, avec une présence marquée dans tous les secteurs économiques, en dehors du secteur bancaire.
Échanges commerciaux France-Gabon
La France est le premier fournisseur du Gabon en 2022, devant la Belgique et la Chine. Le Gabon est le 76ᵉ partenaire commercial de la France. Il représente moins de 0,1 % des exportations françaises dans le monde (536 millions d'euros), alors que la France détient 26 % de part de marché. Le Gabon est la première destination d'exportations françaises au sein de la Communauté des États d'Afrique centrale. Les exportations gabonaises vers la France, étaient de 310 millions d'euros en 2022 (43 %, pétrole & gaz naturel), les minerais métalliques (24 %, principalement le manganèse) et le bois (31 %). La Chine est le premier client et le premier partenaire commercial du Gabon. Dans les années 2010, le Gabon a diversifié ses partenariats économiques (Chine, États-Unis, Maroc, Inde, Australie, mais aussi avec son intégration dans le Commonwealth (britannique). L'exploitation des hydrocarbures, du bois et du manganèse constituent les principales activités de la Chine au Gabon. Les nouvelles autorités militaires ont garanti aux investisseurs étrangers, dont la France, une sécurisation de leurs biens.