Nations unies : un rapport alerte sur les chiffres de la faim dans le monde

Jeudi, Novembre 23, 2023 - 10:45

Un rapport de l’Organisation des Nations unies (ONU) alerte sur les chiffres de la faim dans le monde qui repartent à la hausse. D’après la dernière édition du rapport sur l’état de la sécurité alimentaire et de la nutrition dans le monde, si la tendance perdure, l’Objectif de développement durable (ODD) qui consiste à éradiquer la faim d’ici à 2030 ne sera pas atteint.

Le document est publié conjointement par le Fonds des Nations unies pour l’enfance (Unicef), le Fonds international de développement agricole (Fida), l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et le Programme alimentaire mondial (PAM). 

Il révèle qu’entre 691 millions et 783 millions de personnes ont souffert de la faim en 2022. Si l’on considère la moyenne, qui s’établit à 735 millions, cela représente une augmentation de 122 millions par rapport à 2019, avant la pandémie de covid-19. Bien que les chiffres relatifs à la faim dans le monde soient demeurés stables entre 2021 et 2022, la population subit une crise alimentaire qui s’aggrave à de nombreux endroits. La faim a régressé en Asie et en Amérique latine, mais a continué à gagner du terrain en Asie de l’Ouest, dans les Caraïbes et dans toutes les sous-régions d’Afrique en 2022. L’Afrique est encore la région la plus touchée : une personne sur cinq souffre de la faim sur ce continent, soit plus du double de la moyenne mondiale. « Il y a une lueur d’espoir, certaines régions sont en bonne voie pour atteindre une partie des cibles nutritionnelles à l’horizon 2030. Mais globalement, nous devons mener une action mondiale intense et immédiate pour que les objectifs de développement durable puissent être réalisés. Nous devons renforcer la résilience face aux crises et aux chocs qui favorisent l’insécurité alimentaire des conflits au climat », a expliqué le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres.

La cible « Faim zéro » des ODD est sans nul doute un gigantesque défi à relever d’ici à 2030. Les projections indiquent, en effet, que près de 600 millions de personnes souffriront encore de la faim à cette échéance. Les grands moteurs de l’insécurité alimentaire et de la malnutrition sont la « nouvelle normalité ». «Nous n’avons pas d’autres choix que de redoubler d’efforts pour transformer les systèmes agroalimentaires et les utiliser comme levier pour atteindre les cibles de l’ODD 2 », ont écrit, dans l’avant-propos du rapport, Cindy McCain, directrice exécutive du PAM ; Catherine Russel, directrice générale de l’Unicef ; Qu Dongyu, directeur général de la FAO ; Alvaro Lario, président du Fida ; et Tedros Adhanom Ghebreyesus, directeur général de l’OMS.

La situation en matière de sécurité alimentaire et de nutrition est restée préoccupante en 2022. Le rapport indique qu’environ 29,6% de la population mondiale, soit 2,4 milliards de personnes, ne bénéficiait pas d’un accès constant à des aliments, tel que mesuré par la prévalence de l’insécurité alimentaire modérée ou grave. Parmi ces personnes, quelque 900 millions étaient en situation d’insécurité alimentaire grave. Dans le même temps, la capacité de se procurer des aliments sains s’est réduite à l’échelle mondiale : plus de 3,1 milliards de personnes (soit 42% de la population mondiale) n’avaient pas les moyens de s’alimenter sainement en 2021. Cela représente une augmentation de 134 millions par rapport à 2019.

Mieux combattre la malnutrition

Par ailleurs, des millions d’enfants de moins de 5 ans continuent de souffrir de la malnutrition : en 2022, 148 millions (22,3%) présentaient un retard de croissance, 45 millions (6,8%) étaient émaciés et 37 millions (5,6%) étaient en surpoids. En revanche, l’allaitement maternel exclusif a progressé : actuellement, 48% des nourrissons de moins de six mois en bénéficient, ce qui est proche de la cible fixée pour 2025. Il n’en demeure pas moins que des efforts concertés seront nécessaires pour atteindre les cibles relatives à la malnutrition à l’horizon 2030. Le rapport porte également sur l’urbanisation accrue, « mégatendance » qui influence les modes d’alimentation et les choix alimentaires. Sachant que sept personnes sur dix devraient vivre en ville en 2050, d’après les projections, il est impératif que les gouvernements et les autres acteurs qui s’emploient à lutter contre la faim, l’insécurité alimentaire et la malnutrition s’efforcent de comprendre les évolutions liées à l’urbanisation et d’en tenir compte dans l’élaboration de leurs politiques. Plus particulièrement, l’idée élémentaire d’une dichotomie entre zones rurales et zones urbaines ne suffit plus à cerner les incidences de l’urbanisation sur les systèmes agroalimentaires. Il est nécessaire d’adopter une perspective plus complexe fondée sur la notion de continuum rural-urbain, qui prend en considération tant le degré de connectivité entre les personnes que les différents types de lien entre les zones urbaines et les zones rurales.

Pour la première fois, cette évolution a été étudiée de manière systématique dans onze pays. De nouveaux éléments montrent aussi que dans plusieurs pays, la consommation d’aliments hautement transformés augmente également dans les zones périurbaines et les zones rurales. Malheureusement, des inégalités spatiales demeurent. L’insécurité alimentaire touche davantage les personnes qui vivent en milieu rural. Celle modérée ou grave concernait 33% des adultes en zone rurale et 26% en zone urbaine. La malnutrition chez les enfants présente aussi des particularités spatiales : la prévalence du retard de croissance est plus élevée dans les zones rurales (35,8%) que dans les zones urbaines (22,4%). La prévalence de l’émaciation est également plus forte en milieu rural (10,5%) qu’en milieu urbain (7,7%), tandis que l’excès pondéral est légèrement plus présent en ville (5,4%) que dans les campagnes (3,5%).

Afin de promouvoir efficacement la sécurité alimentaire et la nutrition, les auteurs du rapport recommandent que les interventions publiques, les mesures et les investissements soient guidés par une connaissance profonde des relations complexes et évolutives entre le continuum rural-urbain et les systèmes agroalimentaires. 

Boris Kharl Ebaka
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